Paris (awp/afp) - Le conseil d'administration de Renault a donné jeudi son feu vert à un nouveau mandat de PDG de Carlos Ghosn qui a parallèlement nommé un numéro deux, conformément au souhait de l'Etat français de le voir préparer sa succession.

"Le conseil d'administration a décidé de proposer le renouvellement du mandat d'administrateur de Monsieur Carlos Ghosn qui sera soumis à l'Assemblée générale des actionnaires le 15 juin", a indiqué Renault dans un communiqué diffusé en soirée.

Soulignant les "résultats exceptionnels" obtenus sous M. Ghosn par l'entreprise, qui doit diffuser vendredi ses comptes pour 2017, le conseil d'administration, lui a "également renouvelé sa pleine confiance en tant que Président-Directeur Général de Renault et Président-Directeur Général de l'Alliance" avec les constructeurs japonais Nissan et Mitsubishi.

Les administrateurs ont fixé "trois objectifs prioritaires" pour le prochain mandat de quatre ans.

Le PDG devra, selon eux, "piloter les enjeux stratégiques du Plan Drive the Future", qui vise un chiffre d'affaires de 70 milliards d'euros en 2022 contre un peu plus de 50 en 2016.

Il devra aussi "engager les étapes décisives permettant de rendre l'Alliance pérenne" et "renforcer le plan de succession à la tête du Groupe Renault".

L'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi constitue un groupe aux équilibres complexes, entre intérêts français et japonais. Il repose aujourd'hui en grande partie sur la personnalité du dirigeant franco-libano-brésilien.

En outre, Carlos Ghosn, qui dirige Renault depuis 2005 et aura 64 ans en mars, a décidé, "après avoir reçu l'avis favorable du Conseil d'administration, de nommer Monsieur Thierry Bolloré aux fonctions de Directeur Général Adjoint Groupe, à compter du 19 février 2018", selon le texte diffusé à l'issue de la réunion qui s'est tenue toute la journée au siège de Boulogne-Billancourt.

M. Bolloré est arrivé chez Renault en 2012 après une carrière internationale, dont plusieurs postes en Asie, pour le manufacturier de pneumatiques Michelin et l'équipementier Faurecia. Agé de 54 ans, il était jusqu'ici directeur délégué à la compétitivité.

- Ancrage français -

L'Etat français, qui détient 15,01% du capital de Renault et 21,93% des droits de vote, insistait de longue date pour créer ce poste de numéro deux. Celui-ci aurait vocation à succéder ultérieurement M. Ghosn.

Le gouvernement n'avait pas caché sa volonté de voir un Français nommé à ce poste. Il s'inquiète notamment pour la pérennité de l'alliance et son ancrage français.

L'actionnaire public réclame aussi une feuille de route sur l'avenir de l'alliance, devenue le premier constructeur automobile mondial l'an dernier avec 10,6 millions de véhicules vendus.

"On travaille toujours avec Carlos Ghosn sur la définition de cette feuille de route. On n'a pas encore tous les éléments qui nous conviennent sur la meilleure intégration des deux entreprises" Renault et Nissan, a déclaré à l'AFP un porte-parole de Bercy en début de semaine.

Renault possède 43,4% de Nissan, qui détient lui-même 15% de Renault et 34% de Mitsubishi, dont il est premier actionnaire. L'alliance aux dix marques partage une large base industrielle commune, comparable à celle d'un groupe intégré, tout en conservant pour chaque entreprise une gouvernance propre.

M. Ghosn cumule les fonctions de président du conseil d'administration de Mitsubishi et de Nissan, tout en étant PDG de Renault et de l'Alliance.

L'Etat souligne la qualité de son bilan. Le groupe Renault, à lui seul, a affiché des ventes record (3,76 millions de véhicules) l'an dernier.

"L'entreprise est sur une bonne voie", estime-t-on à Bercy, même si des désaccords existent avec le PDG. Ainsi, la rémunération de M. Ghosn (7 millions d'euros en 2016) n'avait pas été approuvée par l'Etat en assemblée générale l'an dernier.

Concernant le poste de numéro deux, on estime chez Renault que Thierry Bolloré présente plusieurs atouts: "il connaît l'automobile, il sait travailler avec les Japonais et il connaît le fonctionnement de l'alliance".

Le choix de M. Bolloré semble cependant avoir provoqué une certaine ébullition au sein des instances dirigeantes. Le directeur à la performance, l'Allemand Stefan Mueller, considéré comme un concurrent sérieux pour le poste, a annoncé mercredi son départ, officiellement pour raisons de santé.

Et l'ancien patron de Total, Thierry Desmarest, administrateur chez Renault, a annoncé mardi qu'il quittait ses fonctions pour des raisons "exclusivement d'ordre personnel et d'âge".

afp/rp