J’ai reçu mardi un email tout à fait charmant d’un lecteur, visiblement satisfait des badinages financiers et autres divagations économiques de cette rubrique. Ce fidèle me demandait aussi, à titre personnel, pourquoi je ne fournissais pas de prévisions chiffrées un peu plus engagées sur la trajectoire des indices. La vérité, c'est que je ne me sens pas du tout légitime pour jouer les oracles boursiers et que je préfère, et de loin, mon rôle d’ethnologue amateur des marchés. Pour autant, le conseil le moins idiot que je pourrais donner est : sur la durée, les principaux indices évoluent en pente ascendante, donc si vous ne croyez pas au grand effondrement de l’humanité et si votre idéologie ne s’y oppose pas, vous devriez vous intéresser aux marchés actions. Jouer les prophètes de malheur fait vendre du papier et donne raison une ou deux fois par décennie, mais tort le reste du temps. Quant à jouer les prévisionnistes, c’est un jeu compliqué et assez aléatoire, même lorsque l’on est considéré comme supérieurement intelligent.

Les chiffres et la recherche académique le prouvent depuis un moment déjà. Pour enfoncer le clou, je vais faire appel à mon chouchou habituel, l’économiste Joachim Klement, qui a justement pondu un commentaire mardi sur ce sujet de saison (j’avais déjà mis le lien hier dans les lectures du jour, mais le revoilou). Voici les faits : à partir de la fin du mois de novembre, les banques d’affaires, les bureaux d’études et les sociétés de gestion commencent à révéler leurs prévisions pour la fin de l’année suivante. En particulier sur le niveau des indices boursiers. La mission est confiée à ce que l’on appelle communément des stratèges ou même des stratégistes. J’avoue que j’ai une préférence pour ce second terme, qui me fait penser à Goldorak. Un stratégiste, c’est une ou un spécialiste qui a une vision globale des choses et qui est généralement un professionnel aguerri et érudit dans les arcanes financières.

Klement a compilé les prévisions des stratégistes sur le S&P500 ces 20 dernières années et les a comparées avec la réalité. Le résultat est un peu cata. Ces spécialistes sont toujours trop pessimistes, en tout cas sur les deux dernières décennies. Pire, si vous vous contentez d'utiliser ces données pour savoir si ça va monter ou baisser sur une année, les stratégistes n’ont raison que 52% du temps, ce qui revient presque à jouer à pile ou face, note Klement. Pour ajouter l’injure à l’outrage, les analystes bottom-up (ceux qui anticipent le parcours individuel des actions en fixant des objectifs de cours) font mieux. En se basant sur leurs anticipations pour déduire si l’année sera haussière ou baissière, il est possible d’avoir la bonne direction dans 72% des cas. Et là, vous allez me dire : s’ils sont pessimistes, les stratégistes doivent quand même arriver à prédire les mauvaises années. Eh bien pas du tout : ils anticipaient des hausses en 2008, en 2018 et en 2022, les trois plus mauvaises années récentes du S&P500. Moralité, on peut continuer à lire les prédictions indicielles pour dans douze mois, pour peu qu’on prête surtout attention à la balance des risques et des opportunités qui les motive. C’est là-dedans qu’est la vraie plus-value.

Donc je ne sais toujours pas où vont les indices dans les jours à venir, mais je peux d'ores et déjà dire que l'Europe a rebondi hier mais que les Etats-Unis sont restés à quai, même si le Dow Jones a grappillé quelques points. Le S&P500 a baissé pour la quatrième fois consécutive et le Nasdaq 100 pour la cinquième fois. Pas beaucoup, mais la somme des dernières séances commence à peser. Le Nasdaq 100 a perdu 3,7% depuis qu'il a flirté avec 17 000 points le 27 décembre. Certains investisseurs avaient eu du pif il y a quelques jours en imaginant que le marché allait réviser un peu son sur-optimisme vis-à-vis du rythme de baisse de taux. C'est exactement ce qui s'est produit. La publication des minutes de la dernière réunion de la Fed puis des statistiques macroéconomiques plus robustes que prévu concernant le marché de l'emploi américain ont conduit les financiers à revoir leurs paris sur la politique monétaire. Ils sont désormais un peu mieux alignés avec les appels à ne pas s'emballer en provenance des banquiers centraux américains, tout en restant plus optimistes qu'eux. Comme je l'expliquais hier, la probabilité de voir la Fed abaisser ses taux d'un quart de point dès mars a pris du plomb dans l'aile, tout en restant majoritaire. Le marché obligataire a pris acte de ce petit retournement de situation en portant le rendement du 10 ans US à 4%, une première depuis la mi-décembre. Le jeu du chat et de la souris entre la Fed et le marché va continuer dans les jours qui viennent au gré des statistiques, à commencer par les chiffres mensuels de l'emploi aux Etats-Unis en décembre, attendus à 14h30 aujourd'hui. Des chiffres solides, positifs pour l'économie, renforceraient le sentiment actuel selon lequel la Fed va rester vigilante sur une éventuelle reprise de l'inflation. Il sera aussi question d'inflation en Europe à 11h00 avec les données de décembre. Les statistiques publiées hier en France et en Allemagne réduisent le suspense : l'inflation devrait continuer sa décrue et donner plus de latitude à la BCE pour agir sur ses taux. La hausse des actions en Europe hier n'est pas étrangère à un petit regain d'optimisme sur une baisse des taux. Deux continents, deux ambiances donc.

En Asie Pacifique ce matin, le Nikkei 225 gagne 0,3% à Tokyo. La Chine avait fait mine de rebondir mais les indices sont repassés dans le rouge en séance. La Corée du Sud est toujours à la peine (-0,4%), pendant que l'Inde et l'Australie évoluent non loin de l'équilibre, dans le vert pour Bombay et dans le rouge pour Sydney. Les indicateurs avancés européens sont baissiers. Le CAC40 démarre la séance en baisse de 0,6% à 7394 points. Le SMI cède 0,6% à 11 156 points et le Bel20 perd 0,3% à 3709 points.

Les temps forts économiques du jour

Le marché suivra les chiffres de l’inflation et des prix à la production en zone euro (11h00), mais surtout les données hebdomadaires sur l’emploi aux Etats-Unis (14h30), suivies des commandes de biens durables et de l’ISM des services américains (16h00). Tout l'agenda ici.

L'euro varie peu à 1,0935 USD. L'once d'or stagne à 2043 USD. Le pétrole reste proche de ses niveaux récents, avec un Brent de Mer du Nord à 77,92 USD le baril et un brut léger américain WTI à 72,75 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans remonte à 4%. Le bitcoin se négocie à 43 700 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Airbus : Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours relevé de 161 à 166 EUR.
  • Amundi : Barclays maintient sa recommandation de pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 68 à 70 EUR.
  • Ariston Holding : Barclays démarre le suivi à surpondérer avec un objectif de cours de 9 EUR.
  • BNP Paribas : Keefe Bruyette & Woods maintient sa recommandation de performance de marché avec un objectif de cours réduit de 78 à 77 EUR.
  • Crédit Agricole : Keefe Bruyette & Woods passe de sousperformance à performance de marché avec un objectif de cours relevé de 13,50 EUR à 15,50 EUR.
  • Delivery Hero : JP Morgan maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours réduit de 51 à 42 EUR.
  • Deutsche Bank : Keefe Bruyette & Woods passe de performance de marché à sousperformance avec un objectif de cours réduit de 13 EUR à 12,50 EUR.
  • Diasorin : HSBC maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours réduit de 120 à 115 EUR.
  • DWS Group : Barclays maintient sa recommandation de pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 37 à 40 EUR.
  • EQT : Barclays maintient sa recommandation de surpondérer et relève l'objectif de cours de 280 à 310 SEK. Deutsche Bank maintient sa recommandation d'achat et relève l'objectif de cours de 290 à 320 SEK. SEB Bank maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 267 à 293 SEK.
  • Hermes International : Stifel maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 1850 à 1950 EUR.
  • Julius Bär : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 70 à 57 CHF. Keefe Bruyette & Woods maintient sa recommandation de performance de marché avec un objectif de cours réduit de 59 à 57 CHF.
  • Marks & Spencer : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 180 à 310 GBX.
  • Mondi : Jefferies passe de acheter à conserver avec un objectif de cours relevé de 1600 GBX à 1650 GBX.
  • Munters Group : SEB Bank maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 140 à 175 SEK.
  • Next : Goldman Sachs maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours relevé de 8400 à 9500 GBX. JP Morgan maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours relevé de 7500 à 8000 GBX.
  • Partners Group Holding : Barclays maintient sa recommandation de pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 950 à 1040 CHF. Deutsche Bank maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 1000 à 1150 CHF.
  • Prysmian : Citigroup maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 43 à 46 EUR.
  • Rio Tinto : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 6500 à 6800 GBX.
  • Schneider Electric : Morgan Stanley maintient sa recommandation de pondération de marché avec un objectif de cours relevé de 155 à 168 EUR.
  • Société Générale : Keefe Bruyette & Woods maintient sa recommandation de performance de marché avec un objectif de cours relevé de 29 à 32 EUR.
  • Solvay : JP Morgan maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours réduit de 140 à 40 EUR.
  • Swatch Group : Stifel maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours réduit de 250 à 230 CHF.
  • Syensqo : JP Morgan démarre le suivi à surpondérer avec un objectif de cours de 148 EUR.
  • Ubisoft Entertainment : JP Morgan maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 27 à 26 EUR.
  • UBS Group : Keefe Bruyette & Woods maintient sa recommandation de sous-performance avec un objectif de cours relevé de 24 à 25 CHF.
  • Var Energi : SEB Bank maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours réduit de 42 NOK à 38 NOK.
  • Wärtsilä : Inderes maintient sa recommandation d'accumuler et relève l'objectif de cours de 12,50 à 13,50 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Sodexo affiche un chiffre d'affaires de 6,287 Mds€ au T1 2023/2024, en croissance interne de 8,2% et confirme ses prévisions et la cotation de Pluxee le 1er février.
  • Valeo et Applied Intuition s'associent pour fournir une technologie de jumeau numérique pour la simulation des systèmes avancés d'aide à la conduite.
  • Environ le tiers des 313 supermarchés et hypermarchés cédés par Casino iront à Auchan, les deux autres tiers à Intermarché, selon l'intersyndicale du distributeur.
  • LDC a publié des revenus en croissance organique de 4,8% à 4,55 Mds€ après neuf mois d’activité, grâce à un effet prix. Le T3 fiscal est marqué par une légère contraction. Les objectifs sont confirmés.
  • Euroapi se dote d’un directeur général adjoint en charge de la transformation en la personne de Ludwig de Mot, qui a du pain sur la planche.
  • Wendel boucle la cession de Constatia Flexibles à One Rock Capital Partners pour 1,21 Md€ de produit net de
  • Stef achète le néerlandais Bakker Logistiek.
  • Thermador fait part de la nomination de Laurence Paganini comme administratrice référente.
  • Implanet lance une augmentation de capital allant jusqu’à 7,34 M€ à 0,0655 EUR par action, pour financer sa continuité d’exploitation. Sanyou s’engage à souscrire à hauteur de 4,99 M€.
  • Crossject signe un contrat de soutien avec Syneos pour le lancement de Zepizure aux Etats-Unis.
  • Sensorion prolonge son partenariat avec l'Institut Pasteur.
  • Olympique Lyonnais prête Tino Kadewere au FC Nantes.
  • Les principales publications du jour : néant...

Dans le vaste monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Walt Disney et Reliance entament des vérifications préalables antitrust en vue d'un rapprochement potentiel dans le secteur des médias en Inde.
  • Ford enregistre ses meilleures ventes annuelles de véhicules aux Etats-Unis depuis 2020.
  • AP Moller Maersk a redirigé quatre des cinq porte-conteneurs bloqués en mer Rouge pour le long voyage autour de l'Afrique, afin d'éviter tout risque d'attaque.
  • Exxon Mobil prévoit une baisse des bénéfices pétroliers au quatrième trimestre.
  • Galapagos a signé un accord avec Thermo Fisher pour la fabrication décentralisée de son produit candidat CAR-T dans la région de San Francisco.
  • Endeavour Mining a démis de ses fonctions son CEO, Sébastien de Montessus, avec effet immédiat, en raison d'une "faute grave".
  • TUI prévoit un retrait de la cote en juin à Londres.
  • Basilea Pharmaceutica cherche un partenaire de commercialisation pour le ceftobiprole avant le verdict de la FDA.
  • Swedish Orphan Biovitrum annonce que son président Bo Jesper Hansen a démissionné pour des raisons de santé, avec effet immédiat. La société pharmaceutique a nommé Annette Clancy comme nouvelle présidente.
  • BYD lance la construction d'une usine de batteries sodium-ion en Chine. L'investissement atteint 1,4 Md$.
  • Qiagen prévoit d'augmenter ses investissements dans l'activité bio-informatique.
  • Mobileye s’effondre de 25% en bourse après des prévisions décevantes.
  • Les principales publications du jour : Constellation Brands, Sodexo, AB VolvoTout l’agenda ici.

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