Londres (awp/afp) - Le cours du bitcoin s'est emballé jeudi au point de frôler brièvement les 17.000 dollars, après avoir battu des records tout au long de la journée et s'être envolé de plus de 70% en une semaine.

La monnaie virtuelle évoluait encore sous les 14.000 dollars dans la matinée en Asie, avant de dépasser de nombreux seuils et d'atteindre son nouveau record à 16.777,08 dollars vers 16H30 GMT, selon des données compilées par l'agence Bloomberg.

Vers 17H20 GMT, il retombait toutefois assez nettement et valait 15.647,94 dollars.

Le bitcoin n'en finit plus d'atteindre des sommets, en battant à toute vitesse record sur record. A la mi-octobre, il s'échangeait encore à 5.000 dollars.

Sa valeur a été multipliée par 15 depuis le début de l'année, qu'il avait commencée autour de 1.000 dollars, suscitant l'inquiétude des autorités financières et la stupéfaction des analystes de marché, peu habitués à une telle flambée d'un actif.

"Nous avons du mal à nous renouveler dans le commentaire. L'évolution du prix est exceptionnelle et c'est quelque chose qui n'a pas d'équivalent. Cette dynamique est une bulle à l'évidence, nous ne savons simplement pas quand et comment cela s'effondrera", estime Neil Wilson, analyste de ETX Capital.

Cette course au record est nourrie par l'intérêt croissant de grands marchés américains, dont certains s'apprêtent à lancer courant décembre des contrats à terme de bitcoins, permettant de spéculer sur son évolution.

Ces Bourses donnent ainsi une certaine légitimité à cet actif aux yeux de certains acteurs de la finance traditionnelle qui goûtaient peu à ce produit d'un nouveau type jusqu'à présent.

La plate-forme boursière américaine Chicago board options exchange (Cboe) va lancer ses produits le 10 décembre et sera suivie quelques jours après par l'américain CME (Chicago Mercantile Exchange), un des plus importants opérateurs boursiers mondiaux.

Mais elles suscitent aussi de nombreuses critiques dans le monde de la finance. L'association des Bourses de produits dérivés FIA a ainsi critiqué une décision jugée précipitée et comportant trop de risques.

- Soutien de Goldman Sachs -

Même prudence pour le président de la banque britannique RBS Howard Davies, qui a estimé jeudi sur Bloomberg TV qu'acheter du bitcoin revenait à pénétrer dans l'Enfer de Dante, peinant à y voir "quelque chose de vraiment rationnel".

La banque d'affaires américaine Goldman Sachs a toutefois apporté jeudi un soutien important au bitcoin en indiquant être prête à faire l'interface entre acheteurs et vendeurs de produits financiers liés à la monnaie virtuelle.

"Nous sommes disposés à fournir des services de compensation à nos clients sur l'ensemble de gros contrats à termes", a indiqué par courriel à l'AFP une porte-parole de l'établissement.

Comme le nombre de bitcoins pouvant être mis en circulation est limité, tout regain de la demande se traduit immédiatement par un bond de sa valeur.

Désormais, la capitalisation totale de la crypto-monnaie s'élève à 272 milliards de dollars, loin devant sa concurrente Ethereum, qui pèse 41 milliards de dollars, selon les données du site spécialisé coinmarketcap.com.

Sans existence physique, le bitcoin, qui ne valait que quelques centimes en 2009 lors de son lancement, s'appuie sur un système de paiement de pair-à-pair basé sur la technologie dite "blockchain" ou "chaîne de blocs".

Il n'a pas de cours légal et n'est pas régi par une banque centrale ou un gouvernement, mais par une vaste communauté d'internautes et accepté dans un nombre grandissant de transactions (restaurants, immobilier, etc.)

De nombreux économistes de renom, à l'instar des prix Nobel Joseph Stiglitz et Jean Tirole, sont montés au créneau ces derniers jours contre la flambée du bitcoin, décrite comme une "bulle spéculative" susceptible d'"imploser".

Les banquiers centraux, maîtres des monnaies traditionnelles et garants de la stabilité financière mondiale, ont quant à eux multiplié les avertissements, à l'image du gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau, estimant que ceux qui investissaient dans le bitcoin le faisaient "totalement à leurs risques et périls".

Les régulateurs financiers de plusieurs pays ont également mis en garde les particuliers qui pourraient perdre gros à vouloir tenter le pari de ce placement très risqué.

La prudence a gagné jusqu'à l'incontournable plate-forme de ventes en ligne de jeux vidéo Steam, qui a annoncé refuser désormais le paiement en bitcoin, qu'elle acceptait jusqu'à présent.

L'attrait pour le bitcoin est tel qu'il fait l'objet de convoitises de la part de pirates informatiques. La plate-forme slovène NiceHash vient ainsi de se faire dérober pour près 60 millions de dollars de bitcoin, selon plusieurs médias.

afp/rp