Le début de l’essoufflement et les nouveaux modes de consommation :

L’INSEE a observé que l’essor des grandes surfaces commençait à légèrement ralentir dans les années 2000, au profit de la baisse du nombre de commerces traditionnels qui commençait à s’atténuer. Mais c’est depuis 2008 que les hypermarchés commencent à connaître leurs premières vraies difficultés. On peut en effet observer un repli des ventes et un ralentissement important du PIB dû à la crise financière mondiale. En 2013, les ménages faisant face à une montée du chômage, un recul de leur pouvoir d’achat et à une pression fiscale, étaient encouragés à modifier leurs modes de consommation.

La population, qui a connu ces dernières années de nombreux scandales alimentaires comme la vache folle, la viande de cheval, etc., a besoin de se sentir rassurée sur l’identité et la sécurité des produits qu’elle consomme. Les individus ont désormais des préoccupations sociales et écologiques. Il est ainsi question de réduire le gaspillage et de ne pas consommer de produits chimiques. Les inquiétudes face à la mondialisation se font sentir, nombreux sont ceux qui privilégient des produits du terroir, plus coûteux, mais correspondant davantage à leur idéal de vie plus sain et à leur recherche perpétuelle du « bien manger ». De plus, les consommateurs d’aujourd’hui sont stratèges et utilisent la technologie pour comparer les prix, profiter des bonnes affaires et gagner du temps. En effet, ils privilégient désormais le e-commerce et les commandes en ligne pour récupérer plus rapidement leurs courses grâce au drive, afin de ne pas s’attarder dans les magasins. Le plaisir d’autrefois de prendre la voiture et de se rendre en famille dans les grands magasins de libre-service s’est transformé en une corvée que les individus d’aujourd’hui évitent et solutionnent par ces nouvelles alternatives digitales. On peut d’ailleurs noter, selon une étude du Crédit Suisse citée par les Echos, que 20% du budget des millennials passe dans des achats en ligne.

Aujourd’hui, chaque personne ayant son propre mode de vie, affirme son individualité au travers de sa consommation et a une exigence croissante de rapidité et de praticité. Les agents économiques achètent plus de produits prêts à consommer, par exemple dans les sandwicheries et prennent moins le temps de se préparer à manger. Cette situation n’est pas spécifique à la France : avec l’arrivée de l’internet, ce sont toutes les enseignes autour du globe qui ont dû repenser leurs stratégies de distribution et de marketing. La grande distribution doit accentuer sa présence sur la Toile et soigner ses rayons de produits frais en développant notamment les produits du terroir et les produits bios. Pour faire face à la concurrence accrue des enseignes de hard discount telles que DIA, elles doivent chacune développer leur savoir-faire en matière de distribution, en améliorant leur service de drive et en continuant d’innover.

Un des objectifs principaux de la France cette année est de redynamiser les centres villes, ce qui présente une opportunité pour les grandes surfaces de se développer ailleurs que dans les grandes zones périphériques qui sont saturées.

Comment se comportent nos deux titres sur le marché boursier ?

On peut noter que l’année 2016 n’aura pas trop impacté les cours de bourse des sociétés issues de la grande distribution. Les deux groupes français cotés, Carrefour et Casino, ont su maintenir leur position de leader en appliquant une nouvelle stratégie de développement à l’international, notamment dans les pays en développement.
Ils n’ont pas essayé de reproduire le schéma de l’implantation des hypermarchés en Europe dans les années soixante, car les modes de développement des pays ne sont pas les mêmes. En effet, ils ont bien compris que les pays émergents bénéficiaient et reproduisaient l’expérience, la technologie et le savoir-faire des pays développés, ainsi le défi de la grande distribution n’est pas le même.

Carrefour, numéro un européen et numéro deux mondial de la grande distribution, l’a très bien compris, et utilise d’ailleurs les réseaux sociaux pour accentuer sa présence sur la Toile, promouvoir ses produits et rester compétitif (voir graphique ci-dessous).


Néanmoins, il a diffusé en ce début d’année les résultats de l’exercice 2016, qui paraissent décevants. A la suite de cette annonce, le 9 mars, son action a chuté de 5% et s’est positionnée à ce moment-là comme la plus grosse perte des valeurs du CAC 40, bien que son niveau de dividende par action reste stable à 0.70 €, comme l’année dernière. Le groupe a dévoilé ses perspectives pour l’année 2017 et reste optimiste quant à la pérennité du monde de la grande distribution. Sa filiale foncière Carmila, qui assure la dynamisation des centres commerciaux, devrait être introduite en bourse au second trimestre, de même que Carrefour Brésil, à la fin du premier trimestre ou au second trimestre également.
 

Cette introduction devrait lui permettre de rivaliser avec GPA, la filiale brésilienne du groupe Casino, activement présent dans le domaine de la grande distribution au Brésil. En effet, Casino a lui aussi présenté de mauvais résultats pour l’exercice 2016, mais s’est recentré sur l’alimentaire au Brésil, qui représente son deuxième marché, et sur l’amélioration de sa rentabilité en France. Ses dividendes augmentaient durablement jusqu’à atteindre 3.12€ par action en 2015, mais ont diminué jusqu’à 1.56€ à la suite des résultats de 2016. Toutefois, les dirigeants ne sont pas inquiets pour l’avenir du groupe. Ils avaient choisi l’année passée de regagner la confiance des investisseurs, notamment en se désendettant. Pour ce faire, Casino a cédé ses filiales vietnamiennes et thaïlandaises, ainsi que sa filiale brésilienne de distribution non alimentaire Via Varejo. Ces décisions devraient s’avérer payantes pour la croissance du groupe pour l’année 2017, et de surcroît pour son titre en bourse.

Voici un aperçu des cours de bourse des titres de Carrefour et de Casino, depuis la crise financière : 


Pour comparer avec nos voisins américains et asiatiques, un deuxième graphique mettant les différents cours en perspective :



Puisqu’on évoque beaucoup l’essor du hard discount au détriment des hypermarchés, voici une comparaison des cours des hypermarchés français et du pionner des pratiques de prix bas, DIA :