par Mark Bendeich et Sara Rossi

MILAN, 23 octobre (Reuters) - Trois semaines après la Catalogne, la Lombardie, riche province industrielle et financière de l'Italie, et la Vénétie voisine ont voté dimanche en faveur d'une autonomie renforcée à lors de référendums non contraignants.

Les habitants de la Lombardie se sont prononcés à 95% pour davantage d'autonomie, a annoncé tôt lundi le président de la région, Roberto Maroni, en citant des résultats préliminaires.

Le "oui" l'a aussi emporté sans surprise à une très forte majorité en Vénétie, selon les premiers résultats.

Contrairement à la Catalogne, en crise ouverte avec le pouvoir central à Madrid, il ne s'agit pas d'avancer sur la voie de la sécession, mais d'obtenir de Rome davantage d'autonomie en matière d'éducation, de protection de l'environnement, de sécurité au travail ou de fiscalité.

Un des objectifs est d'attirer les investisseurs étrangers et de tirer profit d'un autre divorce en cours, le Brexit - la capitale lombarde, Milan, est en concurrence avec Barcelone et d'autres villes pour accueillir le siège de l'Agence européenne du médicament, qui va quitter Londres.

"Nous ne sommes pas la Catalogne", a déclaré à Reuters Roberto Maroni. "Nous restons à l'intérieur de la nation italienne avec plus d'autonomie quand la Catalogne veut devenir elle le 29e Etat de l'Union européenne. Nous, non. Pas pour le moment", a poursuivi l'ancien ministre.

Membre influent de la Ligue du Nord, Maroni voit la Lombardie en concurrence avec la Catalogne sans pour autant courtiser ouvertement les entreprises qui quittent actuellement la région du nord-est de l'Espagne. "Nous ne nous réjouissons pas de voir des entreprises fuir la Catalogne. Nous verrons ce qui se passe mais je n'ai pour l'instant pas encore été contacté par des entreprises catalanes", dit-il.

La Ligue du Nord s'est fait connaître dans les années 1990 en réclamant l'indépendance de la Padanie, qui s'étend dans le nord de l'Italie depuis Milan jusqu'à Venise, le long du bassin fluvial du Pô.

La "Lega Nord" ne milite plus pour la sécession mais, au pouvoir en Lombardie et en Vénétie, réclame une meilleure répartition des recettes fiscales avec le gouvernement central.

SOLIDARITÉ FISCALE

D'après Maroni, la Lombardie reverse chaque année au Trésor italien 54 milliards d'euros de taxes de plus qu'elle n'en reçoit. Il veut réduire cet écart de moitié pour accroître les financements régionaux dans la recherche et le développement en faveur des PME familiales et les start-ups et dans des dispositifs d'exonérations fiscales pour les entreprises étrangères s'installant dans sa région.

Gian Claudio Bressa, secrétaire d'Etat chargé des relations avec les collectivités régionales, estime que l'enjeu dépasse la question de la répartition des impôts.

"L'Italie est un Etat unitaire basé sur la solidarité fiscale entre les régions", dit-il. "Pour obtenir davantage d'argent de l'Etat central, la Lombardie devrait démontrer que les services qu'elle propose sont meilleurs que ceux fournis par l'Etat. Si 27 milliards d'euros devaient servir à financer autre chose que ces services, l'Italie pourrait ne pas y survivre."

Les 7,7 millions d'électeurs lombards sont appelés à dire s'ils sont favorables ou défavorables à ce que la région demande au gouvernement "des formes supplémentaires et conditions particulières d'autonomie" dans le cadre de l'unité nationale.

En Vénétie, la question est similaire: "Voulez-vous que d'autres formes et conditions d'autonomie soient attribuées à la région de Vénétie ?"

Luca Zaia, président de la Vénétie, souligne que sa région est "la Catalogne d'Italie, composée de PME, 80% d'entre elles ayant moins de 15 employés, 600.000 entreprises, un PIB de 150 milliards d'euros, le plus bas taux de chômage en Italie de 6,8% et 5 millions d'habitants".

Les résultats des référendums ne sont pas contraignants mais la large victoire du "oui" va donner aux deux régions davantage de légitimité pour négocier avec Rome.

Le gouvernement italien juge que ces consultations ne sont pas nécessaires, même si elles s'inscrivent dans le cadre constitutionnel.

Le Parti démocrate du président du Conseil, Paolo Gentiloni, n'a pas donné de consignes de vote. (avec Giselda Vagnoni à Rome; Henri-Pierre André et Tangi Salaün pour le service français)