PARIS (awp/afp) - Après une semaine marquée par les minutes de la Fed et dense en résultats d'entreprises, la Bourse de Paris et ses homologues européennes devraient continuer à surveiller dans les jours qui viennent l'inflation et la trajectoire de l'euro comme le lait sur le feu.

"Nous sommes aujourd'hui clairement dans un marché qui reste haussier mais beaucoup plus incertain, donc qui peut se retourner", observe auprès de l'AFP Wilfrid Galand, responsable de la stratégie marché chez Neuflize OBC.

"Le choc de volatilité qu'on a connu (début février) n'est pas anodin mais le signal d'un changement profond dans les conditions de marché", où inflation et taux d'intérêt vont de plus en plus mener la danse, estime-t-il.

D'où l'attention particulière portée cette semaine aux commentaires émanant des banquiers centraux après la publication par la Fed et la BCE, respectivement mercredi et jeudi, des minutes de leurs dernières réunions de politique monétaire.

Si le compte-rendu "de la BCE ne nous a pas appris énormément par rapport à ce qui avait été dit lors de la réunion elle-même", du côté des Etats-Unis en revanche, "nous avons eu suffisamment d'éléments pour nourrir un peu de raffermissement du dollar face à l'euro", souligne Jeanne Asseraf-Bitton, responsable de la stratégie d'investissement de Lyxor AM.

"Les opérateurs se sont rendu compte que la Fed ne discutait plus de l'existence ou pas d'une inflation des salaires en raison de la pression sur le marché du travail mais de la rapidité avec laquelle ce mécanisme se mettait en place", explique M. Galand.

Selon lui, "c'est ce qui a fait réagir un petit peu brutalement les marchés" avec, notamment, un nouveau plus haut atteint mercredi sur le taux américain à dix ans.

Pour autant, il n'y aurait pas péril en la demeure: une remontée de l'inflation progressive et modérée semble en effet tenir le haut du pavé face au spectre d'un krach obligataire, qui a pu faire vaciller les marchés dernièrement.

Une très forte accélération de l'inflation "n'est pas notre scénario central, c'est clairement un scénario de risque", confirme Mme Asseraf-Bitton, pour qui nous avons plutôt affaire "à une montée progressive de l'inflation aux Etats-Unis et à une stagnation, voire un effritement de l'inflation globale en Europe".

Pour preuve, le taux d'inflation annuel de la zone euro a légèrement ralenti en janvier, à 1,3% contre 1,4% en décembre.

"Les anticipations d'inflation sont certes légèrement montées mais restent à des niveaux qui sont relativement faibles, toujours autour de 2%. En revanche, on voit que les attentes sur les taux d'intérêt montrent beaucoup plus d'anxiété", complète M. Galand.

- L'euro-dollar toujours en ligne de mire -

Dans ce contexte, l'audition mercredi devant le Congrès du nouveau président de la Fed, Jerome Powell, devrait être scrutée de près, tout comme la première estimation de l'inflation en février dans la zone euro et l'indice ISM d'activité dans l'industrie aux Etats-Unis.

Si les indicateurs publiés cette semaine ont pu dénoter un certain effritement de l'activité, les marchés européens ont en revanche trouvé du soutien dans un léger tassement de l'euro et des publications d'entreprises qui, pour la plupart, sont ressorties en ligne, voire supérieures, aux attentes.

"Les quelques enquêtes publiées dans la zone euro se sont avérées peut-être un peu moins dynamiques mais montrent qu'au fond, nous avons peut-être passé la phase d'accélération de l'activité en Europe et que nous nous installons dans un rythme de croissance qui est relativement soutenu", note Mme Asseraf-Bitton.

La croissance de l'activité privée (indice PMI) a en effet ralenti en février dans la zone euro, tout en restant élevée par rapport au pic de 12 ans enregistré en janvier.

Outre-Rhin, le marché a dû encaisser le recul marqué de deux indicateurs clé du moral des affaires (ZEW et IFO), semblant signifier que l'embellie économique en Allemagne aurait atteint son zénith.

Quant à l'évolution de la monnaie unique, elle devrait, pour Mme Asseraf-Bitton, continuer à donner le la au marché dans les semaines à venir, d'autant que les échéances électorales italiennes pourraient entraîner une légère dépréciation de l'euro, favorable aux marchés européens.

"Ce qui est surtout un facteur de soutien, c'est le sentiment d'une espèce de stabilisation" de la devise européenne dans une fourchette comprise entre 1,20 et 1,25 dollar, ce qui donne "un peu de répit" au marché, conclut M. Galand.

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