Cet accord est officiellement prolongé de neuf mois, ce qui est conforme aux anticipations du marché, mais un point sera fait en juin.

La Russie, qui a pour la première fois cette année réduit sa production de concert avec l'Opep, milite pour qu'un message soit clairement adressé au marché sur une éventuelle sortie de l'accord. Elle redoute que les investisseurs anticipent une pénurie susceptible de provoquer une montée trop brusque des cours, ce qui inciterait les producteurs américains de pétrole de schiste, non concernés par cet accord, à augmenter encore leur offre et à continuer de gagner des parts de marché.

La Russie a en outre besoin de cours bien moins élevés que l'Arabie saoudite, pays moteur au sein de l'Opep, pour équilibrer son budget. Ryad, qui cherche à dégonfler son déficit budgétaire, compte pour sa part introduire en Bourse en 2018 sa compagnie publique Aramco, dont la valorisation bénéficierait à plein d'un prix du marché le plus haut possible.

Le ministre saoudien de l'Energie, Khalid al Falih, a annoncé à la presse que l'Opep et ses partenaires s'étaient entendus pour réduire pendant neuf mois supplémentaires leur production de 1,8 million de barils par jour (bpj). Cet accord, en vigueur depuis le 1er janvier, était censé expirer en mars.

L'Opep a également décidé de plafonner la production cumulée du Nigeria et de la Libye aux niveaux de 2017, sous 2,8 millions de bpj. Ces deux pays bénéficiaient jusque là d'une dérogation en raison des troubles sur leur territoire qui débouchaient sur des productions inférieures à la normale.

"PAS LA GÂCHETTE FACILE"

Khalid al Falih a jugé qu'il serait prématuré d'évoquer un abandon de cet effort pendant au moins deux trimestres en raison de l'arrivée de la période hivernale, marquée généralement par une baisse de la demande. Il a précisé que l'Opep ferait un point de la situation lors de sa prochaine réunion en juin.

"Lorsque nous sortirons de l'accord, nous le ferons très progressivement (...) pour être sûrs de ne pas perturber le marché", a-t-il dit.

L'Opep et la Russie produisent ensemble plus de 40% du pétrole mondial. Leur coopération a été essentielle pour permettre de réduire environ de moitié les réserves mondiales de pétrole depuis janvier.

Dans un communiqué conjoint, l'Opep et les pays extérieurs à l'organisation disent que la prochaine réunion en juin 2018 fournira l'occasion d'ajuster l'accord en fonction des conditions de marché.

Le Brent de la mer du Nord a fini en hausse jeudi pour se traiter au-dessus de 63,50 dollars le baril. Il avait fini l'année 2016 sous 57 dollars avant de tomber en juin à un creux sous 45 dollars.

Alors qu'avait lieu cette réunion à Vienne, les autorités fédérales américaines ont annoncé que la production de pétrole aux Etats-Unis avait augmenté de 3% en septembre à 9,48 millions de bpj. Elle a atteint un record la semaine dernière, à 9,68 millions de bpj, selon ces statistiques officielles.

Khalid al Falih a cependant affirmé que l'Opep n'aurait "pas la gâchette facile" face aux pics ponctuels de la production américaine.

Les stocks mondiaux restent supérieurs de 140 millions de barils à leur moyenne de cinq ans, selon l'Opep.

"Les cours seront bien soutenus en décembre avec de forts prélèvements dans les stocks mondiaux; on peut même envisager un baril de Brent à 70 dollars s'il se produit une interruption imprévue de l'offre", dit Gary Ross, un expert de l'Opep, fondateur du consultant Pira.

(Avec Ernest Scheyder, Adhmad Ghaddar et Vladimir Soldatkine, Juliette Rouillon, Catherine Mallebay-Vacqueur, Wilfrid Exbrayat et Bertrand Boucey pour le service français)

par Alex Lawler, Rania El Gamal et Shadia Nasralla