(Actualisé avec appel à la grève, réaction du ministre des AE)

par Andrew Cawthorne et Eyanir Chinea

CARACAS, 17 juillet (Reuters) - L'opposition vénézuélienne a appelé lundi à une grève générale de 24 heures jeudi, accentuant sa pression sur le président Nicolas Maduro au lendemain d'un référendum informel contre le régime marqué par une participation massive.

Après trois mois et demi de manifestations quasi quotidiennes, certaines violememnt réprimées par les forcse de l'ordre, la coalition Unité démocratique a annoncé une "heure H" pour marquer le début d'une nouvelle vague de protestation.

Celle-ci pourrait se traduire par des barrages routiers, des sit-in, une grève, voire une marche sur le palais de Miraflores, siège de la présidence, comme lors du bref coup d'Etat contre le prédécesseur et mentor de Nicolas Maduro, Hugo Chavez, en 2002.

Dans un premier temps, c'est une grève générale "pacifique" pour jeudi qui a été choisie.

Freddy Guevara, un des leaders de l'opposition, l'a présentée comme un "mécanisme de pression et de préparation en vue de l'escalade finale, qui sera la semaine prochaine".

L'opposition, a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse, entend en outre nommer un "gouvernement d'unité nationale", en parallèle semble-t-il à l'administration officielle.

CONSTITUANTE

Le président Maduro, dont le mandat prend fin début 2019, juge le référendum organisé dimanche sans valeur et propose pour sa part aux 30 millions de Vénézuéliens la création d'une assemblée constituante dont l'élection est prévue le 30 juillet.

La plupart des Vénézuéliens sont contre le projet de Constituante, chargée en principe de rédiger une nouvelle Constitution et qui pourrait abroger l'actuelle législature, où l'opposition est majoritaire.

"On ne veut pas de cette assemblée constituante qu'on cherche à imposer. On ne veut pas devenir Cuba. On ne veut pas être un pays privé de libertés", a résumé le leader de l'Assemblée nationale, Julio Borges.

Pour Freddy Guevara, maintenir l'élection de cette Constituante empêche toute possibilité de dialogue, un dialogue, a-t-il dit, que l'opposition serait disposée à avoir avec le gouvernement, "mais sans manipulations ni tromperies".

Trois questions étaient posées dimanche aux électeurs dans le cadre du référendum.

A une large majorité (98%), ils ont rejeté l'assemblée constituante voulue par le pouvoir, se sont prononcés pour que l'armée défende la Constitution en vigueur et pour la tenue d'élections avant la fin du mandat de Nicolas Maduro, ont indiqué les universitaires convoqués par l'opposition en tant qu'observateurs.

"MANIPULATION"

Près d'un quart de la population du Venezuela a participé au référendum. Cette participation se rapproche sensiblement des 7,7 millions de suffrages obtenus par l'opposition aux élections législatives de décembre 2015, et des 7,3 millions de voix rassemblées à l'élection présidentielle de 2013, remportée de justesse par Nicolas Maduro.

Dans l'opposition, on souligne l'importance de la participation, compte tenu du peu de temps pour organiser la consultation. Le scrutin s'est déroulé dans 2.000 bureaux de vote, contre 14.000 pour les législatives officielles de 2015.

Les médias publics ont pratiquement ignoré l'événement pour se concentrer sur la répétition qui était organisée par le pouvoir pour le scrutin du 30 juillet sur la constituante.

Le ministre des Affaires étrangères, Samuel Moncada, a accusé lundi la presse étrangère de faire le jeu de l'opposition et d'avoir exagéré la participation à ce référendum.

"On a assisté hier à une super expérience de manipulation de la réalité", a-t-il dit lors d'une conférence de presse.

La crise qui secoue le Venezuela a fait 95 morts depuis avril, et plusieurs milliers de blessés. Le dernier décès est survenu dimanche à Caracas. Une femme de 61 ans qui se trouvait parmi un groupe d'électeurs à Catia, un quartier pauvre de la capitale, a été tuée par arme à feu.

La crise politique et les violences qui touchent le Venezuela ont en toile de fond un marasme économique qui dure depuis des années, avec inflation galopante et pénurie de biens de première nécessité.

Le président Maduro, que l'opposition juge incompétent et autocratique, accuse les Etats-Unis de soutenir ses opposants dans l'objectif de contrôler les richesses pétrolières du pays.

(Avec Diego Oré, Andreina Aponte et Alexandra Ulmer à Caracas, Francisco Aguilar à Barinas, Danielle Rouquié et Gilles Trequesser pour le service français)