Le débat concernant l'évolution de la posture de la BCE peut néanmoins encore être ouvert durant la première partie de l'année, est-il écrit dans ces "minutes" du conseil des gouverneurs du 25 janvier.

Au vu d'une inflation qui peine à décoller franchement, ils insistent toutefois sur la nécessité de surveiller la volatilité de l'euro et d'éviter de provoquer une réaction brutale des marchés financiers par un changement de ton.

Le conseil des gouverneurs de la BCE dit vouloir faire preuve de patience alors que le marché s'attend à ce qu'il mette fin d'ici la fin de l'année à son vaste programme de rachats d'actifs lancé en 2015 pour soutenir l'activité et l'inflation.

"Des changements dans la communication ont été globalement jugés prématurés à ce stade", est-il écrit dans ce compte-rendu. "La politique monétaire va continuer à se développer (...) de manière à éviter des ajustements brutaux et désordonnés à un stade ultérieur."

"Certains membres ont exprimé leur préférence pour un abandon du biais accommodant (...) Cependant, la conclusion a été qu'un tel ajustement était prématuré et pas encore justifié par une confiance accrue."

Le biais accommodant fait référence à l'engagement de la BCE à amplifier son programme de rachats d'actifs si nécessaire. L'abandon de cette formule représenterait le changement le plus minime possible dans le message de l'institut de Francfort. Il serait en outre essentiellement symbolique dès lors que peu d'investisseurs, si ce n'est aucun, envisagent une augmentation de ces rachats.

PATIENCE ET PERSÉVÉRANCE

Le retrait de ce biais accommodant sera probablement la prochaine étape franchie par la BCE sur la voie de la normalisation de sa politique, peut-être dès la prochaine réunion du conseil des gouverneurs le 8 mars, ont déclaré des sources proches des débats à Reuters.

Les analystes de Barclays pensent pour leur part que la BCE ne commencera à ajuster son message qu'au mois d'avril, d'abord par un abandon de ce biais accommodant et ensuite par un accent mis sur l'évolution de la trajectoire des taux d'intérêt.

Barclays voit le programme de rachats d'actifs prendre fin en septembre et un premier relèvement de taux en décembre.

Signe de son inquiétude face au raffermissement de l'euro, le conseil des gouverneurs de la BCE a jugé que les déclarations de responsables américains sur les vertus supposées d'un affaiblissement du dollar risquaient de remettre en cause un accord conclu de longue date entre les grandes puissances économiques mondiales consistant à ne pas se fixer d'objectifs de taux de change à des fins de compétitivité commerciale.

"Il y a eu un large consensus entre les membres (du conseil) sur le fait que la récente volatilité du taux de change de l'euro était une source d'incertitude qui nécessitait de l'attention", est-il écrit dans les "minutes".

Un raffermissement de l'euro pourrait limiter l'inflation importée et contrarier les efforts entrepris depuis des années par la BCE pour porter la hausse des prix à un peu moins de 2%, son objectif.

"Le discours relatif à la position en termes de politique monétaire pourrait être revisité en début d'année dans le cadre d'un examen régulier lors des réunions à venir", dit la BCE.

"Même s'il y a des raisons d'être de plus en plus confiant en ce qui concerne la trajectoire d'inflation, la patience et la persévérance restent nécessaires en ce qui concerne la politique monétaire."

Le calme est toutefois globalement revenu sur le marché des changes depuis cette réunion et la parole des responsables américains s'est faite plus rare sur le sujet.

L'euro affiche certes encore un gain de 4,5% face au dollar en six mois mais il s'est replié de près de 2% depuis un pic atteint le 16 février.

Cette évolution pourrait conforter les responsables de la BCE qui acceptent un certain raffermissement de l'euro reflétant à leurs yeux la bonne santé économique de la zone.

(Bertrand Boucey pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)

par Balazs Koranyi