Les marchés actions ont repris leur souffle hier, en mettant un terme à leur course haussière effrénée. Rien de grave à première vue, puisque les variations baissières ont été contenues, mais un petit coup de frein quand même. Première baisse en cinq séances pour le S&P500 américain. Première baisse en neuf séances (!) pour le CAC40 français. Série toujours en cours sur l'OMX 30 suédois, qui sort de neuf hausses consécutives. On reste dans une configuration positive, toujours portée par une économie américaine résistante (un peu), par la perspective de voir les taux directeurs baisser à la fin du printemps ou au début de l'automne (beaucoup), par les achats frénétiques d'investisseurs qui ne veulent pas rater la hausse du marché (passionnément) et par les valeurs liées à l'IA (à la folie).

Quant au "pas du tout", difficile de voir d'où il peut venir parce qu'on peut lire à peu près tout et son contraire. Je me faisais cette réflexion ce matin en jetant un coup d'œil à la une du site internet de Bloomberg. En milieu de semaine dernière, il y avait un gros dossier sur le fait que, contrairement à ce que le bon sens laissait penser avec des taux élevés, le secteur du private equity n'éprouvait pas vraiment de difficultés à trouver des financements. Bon évidemment, la fiesta d'il y a deux ans est terminée : les sociétés qui pouvaient lever des dizaines de millions en s'autoproclamant fintech ou en vendant des photos pixellisées comme des créations artistiques inédites n'ont plus voix au chapitre.

Mais ce matin, Bloomberg titre sur "les entreprises endettées recherchent des capitaux propres alors que les coûts d'intérêt grimpent en flèche". Bon, qui a raison alors ? Bloomberg ou Bloomberg ? D'autant plus qu'un troisième larron, Bloomberg, explique dans un troisième article que le marché des obligations d'entreprises aux Etats-Unis se dirige vers un record de levées de capitaux pour un mois de février, car les émetteurs "s'efforcent de répondre à la demande croissante des investisseurs dans un contexte de baisse des coûts d'emprunt". Donc si je résume, les coûts d'emprunt augmentent mais ils baissent, l'accès au marché des capitaux est largement ouvert mais il se referme et l'argent coule à flots mais le robinet est fermé. En réalité, on en revient toujours au bien vieux principe selon lequel on ne prête qu'aux riches : les entreprises de qualité n'ont pas vraiment de problème pour se financer et attirent aisément les investisseurs. Les autres éprouvent beaucoup plus de difficultés. Et celles qui étaient dans la zone grise, c’est-à-dire qui attendaient avec impatience les baisses de taux pour retrouver un matelas de sécurité, ont un peu les miquettes depuis que le calendrier se décale.

Dans la même veine, la peur d'un événement crédit entraînant un effet domino figure depuis plusieurs mois parmi les trois principales craintes des investisseurs. Je vais rester sur mon exemple Bloomberg puisque l'agence financière américaine m'aide en me donnant à nouveau ce matin une illustration facile. Sur la page de Une européenne de son site web, les quatre articles mis en exergue sont, un : "L'effondrement de l'immobilier en Allemagne menace davantage les banques que l'immobilier résidentiel américain". Deux : "Pour les prêteurs mondiaux, le cauchemar immobilier des États-Unis est arrivé". Trois : "La bombe à retardement des immeubles de bureaux vides" (une vidéo) et quatre : "C'est le moment d'acheter des biens immobiliers en difficulté à des prix défiant toute concurrence, selon le CEO d'Allianz". Je ne sais pas vous, mais moi, je trouve déjà pas mal de contradictions là-dedans.

Ce phénomène qui consiste à être un peu perdu dans les données et les annonces contradictoires n'est pas nouveau. Mais il a contribué à renforcer le sentiment d'invincibilité du marché. A force d'entendre ou de lire "attention, dans deux mois on court à la catastrophe pour la croissance / l'immobilier / les marchés actions / l'obligataire ou je ne sais quoi (rayer la mention inutile)" sans que cela ne se produise, le niveau de complaisance augmente.

Donc les "pas du tout" du moment, pour en revenir au propos initial, c’est-à-dire les trucs qui pourraient dérailler, sont quand même à chercher du côté de la dette (privée et publique) à cause des taux qui restent élevés. On suivra donc avec intérêt les nombreuses statistiques qui seront publiées cette semaine, en particulier l'inflation PCE qui sera publiée jeudi, et non vendredi comme je l'ai écrit hier. Comme quoi, il n'y a pas que Bloomberg qui dit tout et son contraire. La situation géopolitique tendue est aussi un facteur de déstabilisation, surtout l'enlisement du conflit russo-ukrainien. Emmanuel Macron a quand même lâché hier que l'envoi de troupes occidentales en Ukraine "n'est pas à exclure", même s'il n'y a aucun consensus à ce propos. Personne n'aurait imaginé une telle déclaration deux ans en arrière, au moment où la Russie est entrée en Ukraine. La vigilance s'impose sur ces deux points. De ce que l'on sait pour le moment, l'IA ne règle ni le surendettement, ni les bruits de bottes.

L'actualité financière du jour est dominée par la suite des publications de résultats d'entreprises et par les statistiques macroéconomiques qui seront publiées cet après-midi aux Etats-Unis. Au Japon, les rendements obligataires ont progressé après des données d'inflation plus élevées que prévu, qui ont renforcé la probabilité d'une hausse de taux dans les mois à venir. En Chine, l'Etat aurait injecté l'équivalent de 57 Mds$ dans les actions continentales en deux mois, selon les calculs réalisés par UBS à partir des flux entrants des plus gros ETF locaux. Ces efforts, conjugués à une flopée de mesures destinées à soutenir les secteurs immobiliers et financiers, pourraient permettre de ramener les marchés actions chinois en direction de l'équilibre en 2024. L'indice large MSCI China a perdu 10,6% en janvier mais gagne 9% en février. Le bilan n'est pas encore neutre. Tout va bien en revanche pour le bitcoin, qui a accroché les 57 000 USD pour la première fois depuis la fin 2021. La cryptomonnaie affiche 29% de hausse en 2024, ce qui en fait la plus prolifique des classes d'actifs de l'année, en tout cas pour ceux qui considèrent le bitcoin comme une classe d'actifs.

En Asie Pacifique ce matin, l'attentisme domine. Tokyo, Sydney et Bombay font du surplace. La Corée du Sud souffre davantage avec un KOSPI à -0,8%. La Chine monte à Shanghai (+0,7%) et baisse à Hong Kong (-0,2%) en séance. Les indicateurs avancés européens sont légèrement baissiers.

Le CAC40 ouvre à l'équilibre à 7930 points. Le SMI et le Bel20 démarrent en baisse de 0,2%, respectivement à 11 427 points et 3678 points.

Les temps forts économiques du jour

Aux Etats-Unis, les commandes de biens durables (14h30) seront suivies de l'indice FHFA des prix immobiliers (15h00) puis de l'indice de confiance du Conference Board et de l'indice manufacturier de Richmond (16h00). Tout l'agenda ici.

L'euro est stable à 1,085 USD. L'once d'or se maintient à 2033 USD. Le pétrole rebondit, avec un Brent de Mer du Nord à 82,48 USD le baril et un brut léger américain WTI à 77,47 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans remonte à 4,27%. Le bitcoin s'échange à 55 900 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Accor : AlphaValue/Baader Europe maintient sa recommandation de réduction avec un objectif de cours relevé de 44,80 à 45 EUR.
  • Aixtron : Nomura passe d'acheter à neutre avec un objectif de cours relevé de 34 EUR à 37 EUR.
  • ASML Holding : Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours relevé de 875 à 1000 EUR.
  • Be Semiconductor : Stifel maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 110 à 150 EUR.
  • Bureau Veritas : AlphaValue/Baader Europe passe d'accumuler à alléger avec un objectif de cours relevé de 28,50 à 28,70 EUR.
  • Compagnie Financiere Richemont : Bernstein maintient sa recommandation de surperformance et relève l'objectif de cours de 153 à 166 CHF.
  • Covestro Ag : Morningstar cesse la couverture puis passe à conserver avec un objectif de cours de 52 EUR.
  • Danone : Landesbank Baden-Wuerttemberg maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 56 à 58 EUR. Morgan Stanley maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours relevé de 66 à 69 EUR.
  • Fresenius Medical Care : AlphaValue/Baader Europe passe d'accumuler à acheter avec un objectif de cours relevé de 47,40 EUR à 47,60 EUR.
  • Hermes International : Bernstein maintient sa recommandation de performance de marché avec un objectif de cours relevé de 1994 à 2436 EUR.
  • Ing Groep : Morningstar maintient sa recommandation d'achat et réduit l'objectif de cours de 19 à 17 EUR.
  • Kering : Bernstein maintient sa recommandation de performance de marché avec un objectif de cours relevé de 436 à 463 EUR.
  • Neoen : Morningstar passe de conserver à acheter avec un objectif de cours de 26,50 EUR.
  • Nestlé : HSBC maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours réduit de 118 à 116 CHF. RBC Capital passe de sousperformance à performance de secteur avec un objectif de cours réduit de 97 CHF à 96 CHF.
  • Pearson : AlphaValue/Baader Europe passe d'accumuler à acheter avec un objectif de cours relevé de 1245 GBX à 1277 GBX.
  • Randstad : AlphaValue/Baader Europe passe d'alléger à accumuler avec un objectif de cours relevé de 57,90 EUR à 58,30 EUR.
  • Schindler Holding : Octavian AG maintient sa recommandation d'achat et relève l'objectif de cours de 250 CHF à 265 CHF.
  • Schneider Electric : Bernstein passe de surperformance à performance de marché avec un objectif de cours relevé de 185 EUR à 188 EUR.
  • Schweiter Technologies : Stifel maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours réduit de 900 à 550 CHF.
  • Sika : Octavian AG maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours relevé de 225 à 240 CHF.
  • Sopra Steria : HSBC maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 260 à 290 EUR.
  • The Navigator Company : AS Independent Research passe de neutre à acheter avec un objectif de cours de 4,10 EUR.
  • Unilever : Morgan Stanley passe de pondération de marché à souspondérer avec un objectif de cours réduit de 4100 GBX à 3775 GBX.
  • Vinci : Goldman Sachs maintient sa recommandation d'achat et réduit l'objectif de cours de 136 à 134 EUR.
  • WPP : HSBC passe d'acheter à conserver avec un objectif de cours réduit de 1000 à 790 GBX.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Bouygues fait mieux que prévu en 2023 et vise une nouvelle hausse des résultats en 2024.
  • Edenred publie des résultats en forte hausse en 2023 et annonce deux acquisitions.
  • Eurofins affiche un Ebitda annuel en baisse à 1,36 Md€ et vise au moins 1,52 Mds€ cette année.
  • GTT prévoit une forte progression de son CA et de son Ebitda en 2024

Annonces importantes (et moins importantes)

  • BNP Paribas va récupérer les clients bancaires d'Orange.
  • Luca de Meo (Renault) défend un "Airbus de la petite voiture électrique".
  • Accor en pourparlers avec Dubai Holding pour financer les superyachts Orient Express, selon le FT.
  • Elis a finalisé l'acquisition de Moderna Holding aux Pays-Bas.
  • JCDecaux étudie la vente de ses 30% dans APG SGA.
  • Pluxee place une émission obligataire d’un montant de 1,1 Md€ à 4,5 (3,5%) et 8,5 ans (3,75%).
  • Le Tribunal de Commerce de Paris a validé les plans de sauvegarde accélérée de Casino et de ses filiales. Le processus entraîne une demande de liquidation de Rallye, Foncière Euris, Carpinienne, Finatis et Euris.
  • Peugeot Invest engage la cession du solde de sa participation dans Seb, placée à 106 EUR l'action pour un produit de 236 M€.
  • Hoffmann Green obtient le label Solar Impulse Efficient Solution et rejoint le Club Excellence de Bpifrance.
  • Lhyfe lance son premier projet au Royaume-Uni.
  • OSE Immunotherapeutics présente des résultats de phase I/II avec OSE-279 dans les tumeurs solides avancées au congrès 2024 de l’ESMO TAT.
  • Santé Canda repousse (avis de non-conformité-retrait) le masitinib d'AB Science dans la SLA, mais le laboratoire demande un réexamen.
  • Vantiva présente un répéteur Wi-Fi 7 au Mobile World Congress 2024.
  • Mon Courtier Energie se renforce en Espagne.
  • La variation de la valeur des stocks d'Adeunis pèsera à hauteur de 0,7 M€ sur son résultats d'exploitation annuel.
  • Le petit coin de la dilution : Crossject signe une OCA de 12 M€ en deux tranches, qui lui confère plus de 12 mois de visibilité financière.
  • Les principales publications du jour : Exail, Enogia...

Dans le vaste monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres, sauf pour les échanges post-séance aux Etats-Unis, qui reflètent normalement bien la tendance)

  • Abrdn voit ses bénéfices chuter alors que la société cherche à réduire ses coûts pour se refaire une santé.
  • Munich Re relève son dividende et prévoit un rachat d'actions de 1,5 Md€.
  • Pubmatic s'envole de 37% hors séance après ses trimestriels.
  • Puma enregistre un premier semestre plus faible en raison des effets de change.
  • Workday plonge de 8% hors séance après ses trimestriels.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Chevron prévient que son projet d'acquisition de Hess (opération à 53 Mds$) pourrait être remis en cause par l'exercice du droit de préemption dont bénéficient Exxon Mobil et CNOOC sur le principal actif de Hess au Guyana.
  • La FTC lance une procédure pour bloquer le rapprochement entre Albertsons et Kroger.
  • UniCredit en pourparlers pour acheter le groupe de services bancaires polonais Vodeno à Warburg Pincus.
  • KKR, Macquarie Group, EQT, Antin et Global Infrastructure Partners sont parmi les acheteurs potentiels d'une part de Cellnex en Pologne, a rapporté Bloomberg.
  • Iberdrola a bouclé la vente de 6,2 Mds$ d'actifs à l'Etat mexicain.
  • Snam entre en pourparlers exclusifs pour acheter les actifs de stockage de gaz d'Edison en Italie.
  • Barry Callebaut va supprimer jusqu'à 2500 postes dans le cadre de mesures d'économies.
  • Les actionnaires critiquent le désastre de l'énergie éolienne chez Siemens Energy.
  • EQT lève 22 Mds€ pour son dernier fonds de private equity.
  • Micron lance la production de masse de puces mémoire destinées aux semi-conducteurs d'intelligence artificielle de Nvidia.
  • Roche évalue les options pour son médicament contre les maladies pulmonaires Esbriet, dont les ventes ont baissé en raison de la concurrence des génériques.
  • CRH prend le contrôle de la société australienne Adbri à 3,2 AUD par action.
  • Samsonite est courtisé et évalue ses options.
  • Expedia prévoit de supprimer 1500 postes dans le monde en 2024.
  • Standard Chartered suspend les nouveaux investissements offshore de ses clients chinois.
  • Genmab et AbbVie obtiennent une revue prioritaire de la FDA pour une thérapie contre le cancer du sang.
  • Gilead obtient l'approbation de la FDA pour une indication élargie de son traitement du VIH.
  • Schaeffler annonce une nouvelle usine aux Etats-Unis.
  • Sagard acquiert auprès Acceo auprès de GIMV.
  • Pharmanutra fusionne les filiales Junia Pharma et Alesco.
  • Devant les réticences des Etats-Unis, Shein pourrait se faire coter à Londres.
  • Les principales publications du jour : Lowe's CompaniesAmerican TowerBank of MontrealThe Bank of Nova ScotiaMunich ReFerrovial, Straumann, ASM International, Bouygues, Davide Campari, Puma, LagardèreTout l’agenda ici.

Lectures