par Patricia Zengerle et Warren Strobel

WASHINGTON, 21 mars (Reuters) - Le directeur du FBI James Comey a confirmé lundi pour la première fois que ses équipes enquêtaient sur l'influence de la Russie dans la dernière campagne présidentielle américaine et sur ses liens éventuels avec l'équipe de campagne du candidat républicain à la présidentielle Donald Trump.

James Comey et l'amiral Mike Rogers, directeur de l'Agence de sécurité nationale (NSA), ont clairement fait comprendre que leur enquête pourrait durer des mois.

Auditionné par la commission du Renseignement de la Chambre des représentants, le directeur du FBI a par ailleurs indiqué qu'il n'existait aucune preuve que Donald Trump ait été écouté pendant sa campagne sur ordre du président de l'époque, Barack Obama.

L'audition de James Comey et de Mike Rogers a duré cinq heures et demie. Les débats ont fait ressortir des divisions partisanes très marquées entre les républicains, majoritaires à la commission, et les démocrates.

James Comey, est directeur du FBI depuis septembre 2013, n'a pas voulu en démordre : le président russe Vladimir Poutine ne voulait pas simplement que la candidate du Parti démocrate à la présidentielle, Hillary Clinton, perde; il voulait que Donald Trump gagne.

Outre la Commission du renseignement, plusieurs commissions du Congrès des Etats-Unis cherchent à établir si la Russie a tenter d'influencer le résultat des élections, essentiellement en piratant les courriels des démocrates et en diffusant des informations embarrassantes. La Russie dément.

Le FBI enquête à ce sujet depuis le mois de juillet, a confirmé James Comey. Il a précisé que si le gouvernement russe avait certes en l'intention de faire du tort à la campagne de Clinton et aider Trump, les services de renseignements américains ne pouvaient pas forcément en déduire que ces manoeuvres aient infléchi l'issue du scrutin.

Les démocrates estiment que le directeur du FBI a défavorisé la candidature d'Hillary Clinton en publiant un communiqué peu avant le jour du scrutin pour relancer l'enquête sur l'utilisation par la candidate démocrate de ses mails privés quand elle était secrétaire d'Etat, pour, deux jours avant l'élection, dire que le FBI s'en tenait finalement à sa décision initiale de ne pas engager de poursuites pénales.

James Comey n'a pas donné de précisions sur l'enquête au sujet de la Russie, qui est secrète. Le fait qu'il y ait enquête ne signifie pas que des poursuites seront engagées, a-t-il dit.

"POUTINE DÉTESTAIT TELLEMENT CLINTON"

Il a été "relativement facile" pour la communauté du renseignement de se faire une idée, a dit le directeur du FBI.

"Poutine détestait tellement la secrétaire Clinton que le corollaire était qu'il avait une préférence claire pour la personne qui se présentait contre la personne qu'il détestait tant", a déclaré le patron de la police judiciaire fédérale.

Prié de réagir, le porte-parole de la Maison blanche Sean Spicer a lu une série de déclarations, dont certaines de l'administration Obama, selon lesquelles il n'y avait pas de signe de collusion entre l'équipe de campagne de Donald Trump et la Russie.

Il a ajouté qu'à sa connaissance, aucun responsable de la Maison blanche ne faisait l'objet d'une enquête de la part du FBI.

Dans un tweet avant l'audition, Donald Trump a écrit : "les démocrates ont inventé et poussé l'histoire russe comme excuse à une campagne déplorable."

Le député Adam Schiff, principal représentant démocrate à la commission du Renseignement, a détaillé les activités des associés de Trump ayant des liens avec la Russie et notamment son ancien directeur de campagne Paul Manafort et Michael Flynn, qui a été contraint de démissionner de son poste de conseiller du président à la Sécurité nationale pour avoir parlé à l'ambassadeur de Russie aux Etats-Unis et avoir ensuite donné un compte rendu inexact de cette conversation au vice-président Mike Pence.

"Est-il possible que tous ces événements et informations n'aient aucun lien entre eux et ne soient rien d'autre qu'une coïncidence très malheureuse ? Oui, c'est possible", a déclaré Adam Schiff. "Mais il est aussi possible, peut-être plus que possible, qu'ils ne soient pas une coïncidence, qu'ils ne soient pas sans lien, pas sans rapport."

James Comey a estimé que la Russie tenterait d'influencer la prochaine élection présidentielle américaine en 2020, et peut-être aussi, les élections au Congrès de mi-mandat l'an prochain.

"Ils seront de retour en 2020", a déclaré le directeur du FBI. "Ils seront peut-être de retour en 2018. Et une des leçons qu'ils pourraient tirer de tout cela est qu'ils ont réussi parce qu'ils ont introduit le chaos, la division et la discorde et semé le doute sur la nature de ce pays extraordinaire, le nôtre, et sur notre processus démocratique." (Avec Doina Chiacu; Danielle Rouquié pour le service français)