Berne (awp/ats) - La baisse des prix de l'électricité en Europe n'est pas une bonne nouvelle pour les finances publiques en Suisse. Un pays où environ 90% des centrales sont en mains étatiques.

Tous les citoyens helvétiques sont à la fois propriétaires des centrales électriques et utilisateurs du réseau. Si bien qu'en réglant leurs factures d'électricité, ils alimentent directement les caisses de l'Etat.

Les montants en jeu sont colossaux. Selon les statistiques de l'Office fédéral de l'énergie (OFEN), qui couvrent environ 80% du marché suisse de l'électricité, la consommation de courant a garni les caisses publiques de quelque 1,1 milliard de francs suisses en 2015. Cela correspond à 14% de l'ensemble des dépenses d'électricité dans ce marché. Et cela pourrait être encore plus important, sachant qu'une partie seulement de la TVA de 8% est comprise.

En tenant compte également de la "rétribution à prix coûtant du courant injecté" (RPC) et des diverses dividendes, le montant versé aux caisses publiques s'établit à 2,6 milliards de francs suisses, soit un tiers de la facture globale d'électricité. Sans la TVA, la part attribuée à l'Etat s'élève à 2,1 milliards, l'équivalent de 26% des revenus de ce marché.

Les sommes tombées dans les caisses publiques peuvent sembler importantes, mais elles l'étaient encore davantage par le passé. En 2010 par exemple, et sans tenir compte de la TVA, les entreprises ont contribué à hauteur de 2,6 milliards de francs suisses.

Baisse des prix

La contraction observée ces dernières années s'explique par la transition énergétique, qui a conduit à une baisse des prix de l'électricité en Europe. Celle-ci a entraîné une chute des bénéfices des entreprises électriques suisses et, corollaire, une diminution des rentrées fiscales et des dividendes pour le secteur public. Le recul a été si important entre 2010 et 2015 qu'il n'a pas pu être compensé par l'augmentation de la redevance hydraulique et la RPC.

Toutes les régions n'ont toutefois pas été logées à la même enseigne. Les cantons alpins ont profité d'une redevance hydraulique à la hausse pour compenser les pertes. Cela n'a pas été le cas des cantons du Plateau qui, en matière de revenus liés à l'électricité, doivent apprendre à vivre avec beaucoup moins d'argent que par le passé.

La transition énergétique a aussi des répercussions sur les consommateurs. Malgré des prélèvements étatiques moindres, l'électricité n'est pas devenue moins chère à partir de 2010. Au contraire, selon les statistiques de l'OFEN, le kilowattheure est passé en moyenne d'environ 16 centimes à plus de 17 centimes entre 2010 à 2015. Les coûts de production étant restés stables durant cette même période, à 5,12 centièmes par kilowattheure, la cause de cette augmentation est comptable.

L'économie en profite

Les entreprises d'électricité en Suisse ont dû procéder à des ajustements de valeur sur leurs centrales en raison de la baisse des prix en Europe. Des amortissements ont dû être effectués, tandis que l'endettement et les charges d'intérêts ont aussi dû être revus à la hausse.

Transition énergétique et baisse des prix en Europe ont toutefois profité à certains acteurs. C'est le cas des gros consommateurs d'électricité qui peuvent s'approvisionner à moindre coût depuis 2010. Ceux-ci paient moins pour se fournir en énergie, tout en apportant moins d'argent dans les caisses publiques.

La situation de ces acteurs n'est toutefois pas claire. Tant l'OFEN que l'Office fédéral de la statistique (OFS) ne publient que les prix officiels de l'électricité en Suisse, qui ne concernent quasiment pas cette catégorie des gros consommateurs. La part de cette énergie non incluse dans la consommation totale est considérable: elle se montait déjà à 28% en 2016.