A l’occasion d’un passage récent à Paris, Michel Leblanc et Xavier Lagrandie, gérants de portefeuilles Small & Mids Caps chez Lombard Odier, ont accordé une interview à AOF.

AOF : Comment analysez-vous le marché actuel ?

Michel Leblanc - Xavier Lagrandie : Depuis un peu moins d'un an, le marché est effectivement perturbé en raison de chocs comme le Brexit, le référendum italien ou encore l'élection de Trump. Mais les mouvements de marché importants et la volatilité générés par ces événements sont aussi des opportunités d'investissement. D'un point de vue macroéconomique, nous sommes très positifs, et depuis plusieurs années, sur l'Europe. L'accélération de la croissance est en germe depuis plusieurs années et les soutiens - taux et euro faibles, cours du pétrole encore bas - sont en place depuis 3-4 ans déjà. Enfin, les marchés européens devraient bénéficier d'un retour des flux.

Et du côté des entreprises ?

Nous rencontrons 400 à 500 dirigeants de sociétés par an. Dans l'ensemble, ils tiennent un discours plutôt constructif sur leurs perspectives et délivrent des résultats plutôt solides. Les performances du quatrième trimestre ont souvent été très bonnes. De plus, autre élément satisfaisant, les sociétés se montrent prudentes sur leurs niveaux de capex (investissements) et présentent des bilans globalement sains.

Dans ce contexte, quelles sont les spécificités boursières des small & mid caps ?

Une chose est sûre : ce sont elles qui profitent le plus de l'amélioration de la conjoncture. D'abord, lorsque le PIB progresse de 1%, elles enregistrent environ 3% de croissance de leur chiffre d'affaires. Ensuite, elles offrent un rendement des résultats (earning yield) d'environ 6%, supérieur à toutes les autres classes d'actifs. En termes de valorisation, les petites et moyennes capitalisations européennes sont plus attractives que leurs homologues américaines : le PER est en moyenne de 16-17% contre 20-22% aux Etats-Unis. Par ailleurs, nous ne voyons pas de prime excessive par rapport aux grandes capitalisations. Enfin, il plus facile de passer de 1 à 2 euros de chiffre d'affaires que de 1 000 à 2 000 euros !

Et d'un point de vue opérationnel ?

Le plus souvent, les petites et moyennes sociétés cotées sont focalisées sur un type de produits dont elles peuvent être leader mondial. Elles ont la capacité de prendre des parts de marché importantes sur des niches. Par exemple, dans le secteur des aides auditives, 85% du marché est dominé par trois entreprises européennes à ranger dans la catégorie mid & small. Nous apprécions aussi la réactivité dont peuvent faire preuve ces entreprises, face à des grosses sociétés : les prises de décisions sont souvent plus rapides. Enfin, nous constatons une très forte capacité à innover chez ces groupes.

Quels sont les thèmes d'investissement qui vous guident vers ces actifs ?

Nous regardons généralement quatre éléments. D'abord, la génération de free cash flow qui assure un rendement financier. Ensuite, le management. Troisièmement, nous préférons les entreprises qui ont un actionnaire de référence : 50% des mid & small caps sont des entreprises familiales. Enfin, nous essayons de mettre en avant un thème, comme la dépendance par exemple. Tous ces facteurs ont une caractéristique commune : ils n'ont rien à voir avec la macroéconomie. Ainsi, les mid & small permettent d'atténuer les chocs.