ABUJA, 24 mai (Reuters) - Viols, torture, villages incendiés: Amnesty International accuse l'armée nigériane de s'être livrée, dans le cadre de sa lutte contre le mouvement islamiste radical Boko Haram, à de nombreuses exactions qui pourraient constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.

Dans un rapport de 89 pages rendu public jeudi, l'organisation de défense des droits de l'homme ajoute que ces crimes ont été perpétrés pendant des années et n'ont pas cessé en dépit de l'ouverture d'une enquête officielle en août 2017, dont les conclusions n'ont pas été publiées.

Sollicité pour des commentaires, un porte-parole de l'armée nigériane n'a pas souhaité répondre à Reuters.

Amnesty dit également avoir contacté l'armée qui lui a conseillé de joindre le ministère de la Justice.

Le document de l'ONG s'appuie sur des centaines d'entretiens.

"Les soldats nous ont trahis. Ils ont dit qu'on pouvait sortir de nos villages. Ils ont dit qu'on serait plus à l'abri et qu'ils nous donneraient un endroit sûr où on pourrait rester", raconte une femme désignée dans le rapport sous le nom de Yakura. "Mais quand ils sont arrivés, ils nous ont trahis. Ils ont arrêté nos maris et nous ont violées, nous les femmes."

Les témoins "disent que lorsque l'armée conduit des opérations dans leurs villages, ils incendient les maisons et ouvrent le feu aveuglément sur les habitants qui sont restés", ajoute le rapport.

La guerre contre Boko Haram dure depuis neuf ans et les soupçons d'exactions imputés à l'armée nigériane sont très anciens, mais l'armée n'a guère pris de mesures à ce sujet. (Paul Carsten Jean-Stéphane Brosse pour le service français)