Le nouveau site baptisé "HQ2" sera "l'égal" du siège de Seattle, a affirmé le fondateur d'Amazon, Jeff Bezos, dans un communiqué. Le groupe veut une zone métropolitaine de plus d'un million d'habitants avec un aéroport international, un bon niveau d'éducation et un réseau performant de transports en commun.

Les villes ont jusqu'au 19 octobre pour présenter leur candidature. Amazon promet d'examiner soigneusement les incitations qu'elles offriront et fera son choix en 2018.

Les entreprises bicéphales sont rares et la distance entre les deux sièges pourrait compliquer la tâche au jour le jour de Jeff Bezos et de son équipe de direction, mais les investisseurs et analystes voient plutôt d'un bon oeil cette initiative qui aura pour avantage de réduire les coûts et les risques.

"Le groupe connaît une transformation radicale et fonde sa croissance sur une pensée disruptive. S'installer dans une nouvelle ville avec un nouveau vivier de talents est une bonne idée", résume Antony Karabus, directeur de HRC Retail Advisory.

Seattle, où Amazon emploie 40.000 personnes, est le 44e ville la plus chère du monde selon le classement du coût de la vie établi par l'Economist Intelligence Unit.

"Amazon est parti pour augmenter ses effectifs de 40% sur les 12 prochains mois et manque peut-être d'espace à Seattle", explique Josh Cummings, analyste chez Janus Henderson à Denver.

"L'ouverture d'un deuxième siège va lui permettre de réduire ses risques opérationnels en cas de catastrophe naturelle à Seattle tout en cessant de se concurrencer lui-même en termes de talents et d'immobilier commercial. Et la compétition qu'il crée (entre villes) lui permettra de réduire ses coûts par la suite."

Les prétendants n'ont pas tardé à se faire connaître. Dallas a dit avoir déjà contacté Amazon et Houston a fait part de son intérêt ; Chicago a assuré que son maire Rahm Emanuel en avait personnellement discuté avec Jeff Bezos.

John Tory, le maire de Toronto, a assuré que la ville canadienne était en "première ligne". St Louis et Pittsburgh ont aussi exprimé leur intérêt.

Plus de 50 villes ont la population souhaitée. Le Texas mettra en avant la présence du siège de Whole Foods Markets, la chaîne de supermarchés bio récemment acquise par Amazon, tandis que les Etats du MidWest feront valoir que le groupe de Jeff Bezos y a des entrepôts géants.

Le Parlement local du Wisconsin a récemment voté des mesures incitatives de trois milliards de dollars pour convaincre le taïwanais Foxconn d'y implanter une usine d'écrans à cristaux liquides, un investissement de dix milliards de dollars dans la circonscription de Paul Ryan, le président de la Chambre des Représentants à Washington.

Depuis 2000, Amazon a reçu plus d'un milliard de dollars de subventions d'Etats et de collectivités locales, selon l'ONG Good Jobs First qui recense les incitations financières et leurs contreparties en termes d'emplois. Le Texas a été l'Etat le plus généreux pour Amazon, suivi par l'Illinois, le Kentucky et l'Ohio.

Amazon, le vendeur de livres devenu l'ogre de l'e-commerce, emploie aujourd'hui plus de 380.000 personnes dans le monde contre moins de 25.000 quand il a déménagé dans le centre de Seattle en 2010.

Le chiffre d'affaires, de 34 milliards de dollars en 2010, est passé à 136 milliards à fin 2016 et le groupe a affiché ses ambitions dans la distribution physique et l'alimentation en rachetant Whole Foods Markets pour 13,7 milliards de dollars.

"Nous cherchons une ville qui soit désireuse de travailler avec nous et qui puisse bénéficier à nos clients, à nos salariés et à la communauté", a déclaré Amazon dans son communiqué.

A terme, l'établissement d'un deuxième siège pourrait préparer le terrain à une scission éventuelle d'Amazon Web Services, la division qui regroupe les activités de "cloud" en forte croissance, notent certains analystes.

"Dans l'immédiat, ils préparent leur prochaine phase de croissance mais plus tard cela leur donnera une marge de manoeuvre supplémentaire s'ils décident ou sont contraints de séparer le groupe", dit Josh Cummings.

L'action Amazon a fini en hausse de 1,21% à 979,47 dollars Wall Street jeudi.

(Avec les contributions de Karen Pierog à Chicago, Supantha Mukherjee et Aishwarya Venugopal à Bangalore, Karen Pierog à Chicago, Caroline Valetkevitch et Daniel Bases à New York; Véronique Tison pour le service français)

par Richa Naidu et Nandita Bose