(Actualisé avec précisions)

par Michael Erman

WASHINGTON, 14 août (Reuters) - Kenneth Frazier, PDG du groupe pharmaceutique Merck, a annoncé lundi qu'il démissionnait du conseil des entrepreneurs américains, une commission consultative conseillant le gouvernement fédéral, soulignant que les dirigeants des Etats-Unis doivent "rejeter clairement les expressions de haine, de sectarisme et de suprématie d'un groupe".

Sa démission, même s'il ne le précise pas, survient en pleine polémique sur la réaction de Donald Trump à la suite de la mort d'une manifestante antifasciste lors d'un rassemblement organisé samedi à Charlottesville, en Virginie, par l'extrême droite suprémaciste américaine.

Le président américain a suscité la controverse en ne condamnant pas spécifiquement l'extrême droite, les néonazis et les suprémacistes blancs. Il les a finalement condamnés lundi dans une déclaration à la presse.

Kenneth Frazier, qui est noir, est pour l'instant le seul patron à quitter une des instances consultatives de Trump à cause de sa réaction à ce qui s'est passé en Virginie. Mais la puissante confédération syndicale AFL-CIO a fait savoir qu'elle réfléchissait au retrait de ses représentants au conseil des entrepreneurs.

Dans sa déclaration Kenneth Frazier souligne que "la force de notre pays découle de sa diversité et des contributions d'hommes et de femmes de fois, de races, d'orientations sexuelles et de convictions politiques différents".

"Les dirigeants américains doivent honorer nos valeurs fondamentales en rejetant clairement les expressions de haine, de sectarisme et de suprématie d'un groupe qui vont à l'encontre de l'idéal américain selon lequel nous naissons tous égaux", poursuit le PDG de Merck. http://bit.ly/2fFnITM.

"En tant que PDG de Merck et par conscience personnelle, je ressens la responsabilité de me lever contre l'intolérance et l'extrémisme", conclut-il.

SILENCE DES INDUSTRIELS

Dans la demi-heure suivant son annonce, Trump a pris acte de sa démission et contre-attaqué. "A présent que Ken Frazier de Merck Pharma a démissionné du conseil des entrepreneurs du président, il aura davantage de temps pour BAISSER LES PRIX ASTRONOMIQUES DES MÉDICAMENTS !", a-t-il tweeté.

La Pharmaceutical Research and Manufacturers of America, qui représente l'industrie et les lobbies pharmaceutiques au Congrès, n'a pas voulu faire de déclaration de soutien à Frazier ni commenter la réaction de Trump.

Le silence des industriels du secteur intervient alors que le président Trump est en train de mettre la dernière main à un décret sur le prix des médicaments qui va dans le sens d'une moindre réglementation du secteur et qui contient des mesures qui, disent certains, sont de nature à protéger les prix des médicaments, voire à les augmenter.

De façon individuelle, le patron du laboratoire Alnylam Pharmaceuticals, John Maraganore, a apporté son soutien à Kenneth Frazier. Il a déclaré sur Twitter qu'il était "fier d'être aux côtés de dirigeants comme Ken Frazier.”

D'autres dirigeants d'entreprises, comme Lloyd Blankfein, le PDG de Goldman Sachs, ont également réagi aux violences à Charlottesville.

"Lincoln: 'Une maison divisée contre elle-même ne peut subsister'. Isole ceux qui veulent nous diviser. Pas d'équivalence avec ceux qui nous réunissent", a-t-il écrit sur Twitter, citant un discours d'Abraham Lincoln.

La patronne de Hewlett-Packard Enterprises a dit approuver la décision de Kenneth Frazier.

"Je soutiens la décision de Ken Frazier. Je suis heureuse que nous ayons des dirigeants d'entreprises comme Ken pour rappeler à l'Amérique ses anges les meilleurs", a déclaré Meg Whitman, qui a été candidate au poste de gouverneur de Californie en 2010.

Ce n'est pas la première fois que des dirigeants de grandes entreprises américaines quittent des groupes consultatifs présidentiels pour protester contre sa politique.

Après l'annonce de Donald Trump de se retirer de l'accord de Paris sur le climat, le PDG de Tesla, Elon Musk, ou celui de Walt Disney, Robert Iger, ont claqué la porte du Forum stratégique et politique du président. (Avec Toni Clarke et Ginger Gibson à Washington, Sophia Kunthara à New York et Natalie Grover, Rachit Vats, Parikshit Mishra, Narottam Medhora à Bangalore; Henri-Pierre André, Arthur Connan et Danielle Rouquié pour le service français)