par Nidal al-Mughrabi

LE CAIRE, 10 mai (Reuters) - L'armée israélienne a pris le contrôle de la route qui coupe Rafah en deux, vendredi, encerclant de fait toute la partie Est de la ville du sud de la bande de Gaza.

Les habitants font état d'explosions et de tirs pratiquement ininterrompus à l'est et au nord-est de Rafah, où les combattants du Hamas et du Djihad islamique affrontent les soldats israéliens.

Le Hamas a dit avoir tendu une embuscade à des chars israéliens près d'une mosquée de l'est de la ville, signe que l'armée israélienne a progressé de plusieurs kilomètres dans ce secteur.

Israël a ordonné aux civils de quitter la moitié Est de Rafah, obligeant des dizaines de milliers de personnes à trouver un nouveau refuge. Rafah abrite plus d'un million de Gazaouis qui ont fui les combats dans le reste dans l'enclave.

"Aucune partie de Rafah n'est sûre. J'essaie de partir mais je n'ai pas les moyens d'acheter une tente pour ma famille", a déclaré à Reuters Abou Hassan, 50 ans, un habitant de Tel al Sultan, à l'ouest de Rafah, par le biais d'une application de messagerie instantanée.

"Il y a de plus en plus de gens qui quittent Rafah, même dans la partie Ouest, bien qu'elle n'ait pas été désignée comme une zone rouge par les forces d'occupation. L'armée israélienne cible tout Rafah, et pas seulement l'Est, avec des obus de chars et des frappes aériennes", a-t-il ajouté.

L'armée israélienne a dit avoir localisé plusieurs puits de tunnel dans l'est de la ville et affronter parfois au corps à corps les combattants du Hamas.

Elle a également indiqué avoir bombardé des sites de tirs de roquettes et mortiers.

AIDE HUMANITAIRE EN SUSPENS

Les chars israéliens avaient déjà pris le contrôle cette semaine du point de passage avec l'Egypte, menaçant très sérieusement l'acheminement et la distribution de l'aide humanitaire destinée aux civils, déjà très insuffisante, ont mis en garde les agences de l'Onu.

La situation à Gaza a atteint "un niveau d'urgence sans précédent", a déclaré vendredi à la presse Georgios Petropoulos, responsable dans l'enclave du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'Onu (OCHA), selon lequel l'aide pourrait se tarir "dans les prochains jours".

La perspective d'une opération terrestre majeure à Rafah fragilise l'alliance entre Israël et les Etats-Unis, dont le président Joe Biden a suspendu une livraison de bombes, une première depuis le début de la guerre, et menacé d'en faire de même pour toutes les armes "offensives" si le gouvernement israélien persiste dans son projet.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui dit l'offensive à Rafah indispensable pour venir à bout du Hamas, a rétorqué jeudi qu'Israël "se battrait avec les ongles" s'il le fallait.

Dans ce contexte, les négociations en vue d'un cessez-le-feu ont une nouvelle fois été interrompues jeudi sans accord ni sur la cessation des hostilités, ni sur la libération des otages israéliens détenus par le Hamas.

Le Hamas avait dit en début de semaine avoir accepté une proposition de trêve présentée par les médiateurs qataris et égyptiens, mais Israël l'a jugée inacceptable. (Nidal al Mughrabi au Caire, avec James Mackenzie à Jérusalem, rédigé par Peter Graff; version française Tangi Salaün, édité par Sophie Louet)