Paris (awp/afp) - Plusieurs géants du transport maritime mondial ont annoncé vendredi et samedi suspendre le passage de leurs navires en mer Rouge, une route commerciale majeure, après des attaques perpétrées par des rebelles Houthis du Yémen.

Le danois Maersk, l'allemand Hapag-Lloyd, le français CMA CGM et l'italo-suisse MSC ont fait savoir que leurs navires n'emprunteraient plus la mer Rouge "jusqu'à nouvel ordre", au moins jusqu'à lundi ou jusqu'à ce que le passage "soit sûr".

La mer Rouge est une "autoroute de la mer" reliant la Méditerranée à l'océan Indien, et donc l'Europe à l'Asie. Environ 20.000 navires transitent chaque année par le canal de Suez, porte d'entrée et de sortie des navires passant par la mer Rouge.

Ces dernières semaines, les rebelles yéménites, proches de l'Iran, ont multiplié les attaques près du détroit stratégique de Bab al-Mandeb, qui sépare la péninsule arabique de l'Afrique.

Les Houthis ont prévenu qu'ils viseraient des navires naviguant au large des côtes du Yémen ayant des liens avec Israël, en riposte à la guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza.

Plusieurs missiles et drones ont été abattus par des navires de guerre qui patrouillent dans la zone.

Samedi encore, le Commandement militaire américain au Moyen-Orient (Centcom) a annoncé qu'un destroyer américain opérant en mer Rouge avait abattu 14 drones lancés depuis des "zones du Yémen contrôlées par les Houthis".

Le ministre de la Défense du Royaume-Uni, Grant Shapps, a de son côté rapporté que le destroyer britannique HMS Diamond avait abattu dans la nuit de vendredi à samedi un "drone d'attaque présumé qui visait la marine marchande en mer Rouge".

Vendredi, un porte-conteneur du leader mondial du transport maritime MSC, le MSC Palatium III, a été touché par un missile balistique, selon le Centcom. L'attaque a été revendiquée par les Houthis.

Le groupe MSC a précisé samedi qu'aucun membre d'équipage n'avait été blessé. Le navire a subi des "dégâts limités dus à un incendie" et été "mis hors service".

Détour par le Cap de Bonne-Espérance ___

MSC ajoute qu'"en raison de cet incident et pour protéger la vie et la sécurité de nos marins, jusqu'à ce que le passage de la mer Rouge soit sûr, les navires de MSC ne transiteront pas par le canal de Suez".

"D'ores et déjà, certains services seront reroutés pour passer par le Cap de Bonne-Espérance", tout au sud de l'Afrique, indique MSC.

Ce contournement de l'Afrique va considérablement rallonger les trajets: pour relier Rotterdam à Singapour, le détour rallonge le voyage de 40%, passant d'à peu près 8.400 milles marins (15.550 km) à 11.720 milles (21.700 km), selon le cabinet S&P Global.

Plusieurs navires, notamment de Maersk et de MSC, ont déjà emprunté ce chemin ces derniers jours, détaille le cabinet.

MSC demande à ses clients de faire "preuve de compréhension dans ces circonstances graves".

Le même jour, le premier transporteur maritime français CMA CGM a "décidé d'ordonner" à tous ses porte-conteneurs "dans la région qui doivent passer par la mer Rouge, de rejoindre des zones sûres" ou de ne pas sortir des eaux jugées sûres, "avec effet immédiat et jusqu'à nouvel ordre".

"La situation continue de se détériorer et les inquiétudes en matière de sécurité augmentent", affirme l'armateur dans un communiqué.

La Chambre internationale de la marine marchande (ICS) appelle de son côté "les Etat ayant une influence dans la région" à s'efforcer "de toute urgence de mettre un terme aux actions des Houthis qui attaquent les marins et les navires marchands, et de désamorcer ce qui constitue désormais une menace extrêmement grave pour le commerce international".

Selon l'ICS, basée à Londres, 12% du commerce mondial passe normalement par la mer Rouge.

L'organisation ajoute que l'évitement de la mer Rouge implique des surcoûts et des retards qui pénalisent le secteur et la marche du commerce.

Selon S&P, de plus en plus de transporteurs demandent désormais des primes de risque supplémentaires pour ces trajets.

afp/rp