PEKIN (AFP) --Emmanuel Macron a dévoilé in extremis mercredi à Pékin une commande chinoise de 184 Airbus A320, à finaliser "sous peu", alors que l'avionneur s'apprête à accélérer la production de ce moyen-courrier en Chine et ne désespère pas d'y vendre aussi l'A380.

L'information a été livrée au détour d'une intervention par le président français au dernier jour de sa visite d'Etat en Chine: "C'est quelque chose qui sera totalement finalisé sous peu, mais qui m'a été confirmé par le président" chinois Xi Jinping, a-t-il indiqué.

Cette commande inédite, jamais annoncée auparavant, porte sur 184 moyen-courriers de la famille A320, destinés à 13 compagnies chinoises et pour livraison à l'horizon 2019-2020, a précisé l'Elysée.

Le montant au prix catalogue pourrait totaliser environ 18 milliards de dollars.

Mais l'avionneur européen, contacté par l'AFP, s'est refusé à tout commentaire sur de "quelconques commandes potentielles".

L'annonce présidentielle avait des allures de rattrapage au lendemain de la signature d'accords commerciaux, supervisée par les deux chefs d'Etat, durant laquelle ne figurait aucune nouvelle commande ferme pour Airbus.

Une absence remarquée: des informations de presse avaient évoqué la vente d'une centaine d'appareils.

Et le contraste était cruel avec Boeing, le rival américain qui avait dévoilé en novembre des commandes chinoises pour 300 appareils lors d'un voyage à Pékin du président Donald Trump.

Certes, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, s'était efforcé mardi de minimiser le sujet: "Ce qui compte, ce n'est pas la vente d'appareils", avait-t-il tranché, jugeant que l'enjeu portait plutôt sur "l'électronique embarquée" et les partenariats technologiques.

- Cadence accrue -

Pour autant, Emmanuel Macron a affirmé mercredi avoir eu l'assurance par Xi Jinping "que la Chine préservera son volume de commandes dans les années à venir et la parité des parts de marché entre Airbus et Boeing".

Le géant asiatique, deuxième marché aéronautique mondial, est partagé quasiment à égalité entre l'européen et son rival américain.

L'enjeu est de taille: Boeing estime que la Chine aura besoin de 7.240 avions commerciaux sur les 20 prochaines années, tous constructeurs confondus. Et le pays est, en particulier, très demandeur de monocouloirs pour répondre à l'explosion de son trafic aérien intérieur.

Dans ce contexte, la commande évoquée par M. Macron n'a rien de surprenant: l'écrasante majorité des commandes d'Airbus en Chine concerne son moyen-courrier vedette A320 ou ses versions remotorisées, et plus de 80% des quelque 1.500 Airbus actifs dans le ciel chinois appartiennent à cette famille.

L'avionneur européen possède d'ailleurs depuis dix ans à Tianjin, ville portuaire du nord de la Chine, une ligne d'assemblage pour moyen-courriers, dont sont sortis à ce jour quelque 350 appareils de la famille des A320.

Or, Airbus a justement conclu mardi "un accord cadre" pour faire monter en cadence la production du site, qui passera à cinq appareils par mois début 2019 et à six début 2020.

- Eldorado pour l'A380? -

Au-delà de l'A320, Airbus espère également profiter du décollage des gros porteurs en Chine, où il contrôle déjà plus de 60% du marché des long-courriers.

Un succès qu'il espère conforter avec l'ouverture à Tianjin, depuis septembre, d'un centre de finition pour A330, où il assure l'équipement cabine et les finitions d'appareils assemblés en Europe.

La Chine pourrait-elle offrir une planche de salut au modèle géant A380, lequel n'a pas engrangé de commande ferme depuis plus de deux ans?

Engagé dans une course contre la montre pour prolonger la durée de vie du programme, Airbus a entamé "des discussions préliminaires" pour effectuer en Chine les finitions et l'équipement cabines d'A380 vendus localement, sur le modèle des A330, a rapporté l'agence Bloomberg.

Un scénario que ne commentent ni l'avionneur, ni l'Elysée.

L'idée serait de convaincre des compagnies locales frileuses: aux yeux d'Airbus, la Chine fait figure de cible "idéale" pour l'A380, adapté aux marchés de masse et aux aéroports congestionnés, mais pour l'heure, seuls cinq appareils ont intégré les flottes chinoises.

Alors qu'Airbus traverse une période de turbulences, avec le remaniement de sa direction et l'épée de Damoclès de plusieurs enquêtes, Emmanuel Macron s'est voulu rassurant.

"Je souhaite que dans les toutes prochaines semaines et prochains mois, nous puissions clarifier la totalité" des problèmes de gouvernance, "qui sont plus à mes yeux des questions de personnes et de pratiques, que liées à l'entreprise elle-même", a-t-il insisté.

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