Même les bons connaisseurs du dossier Altran n'avaient pas vu venir l'annus horribilis que traverse actuellement le groupe de conseil. L'entreprise avait mis plusieurs années à se refaire une virginité après les affaires qui l'avaient mise à genoux au sortir de l'explosion de la bulle internet. Mais les vieux démons ont resurgi en juillet lorsque la société a révélé qu'un employé indélicat de sa récente acquisition, Aricent, avait contourné les procédures internes pour produire 10 millions de dollars de fausses factures. Un événement "isolé", c'est le terme utilisé par Altran, mais qui a laissé des traces. Les vendeurs à découvert s'en sont donné à cœur joie : ils avaient l'occasion de s'offrir le scalp d'un dossier à qui tout semblait à nouveau réussir (cf. la hausse du titre sur les 10 dernières années).
 

Depuis 2012, la surperformance du titre est très conséquente, même avec le trou d'air récent (cliquer pour agrandir)
 
Les pointages réalisés cette semaine montrent qu'Altran fait partie des cinq valeurs les plus "shortées" de la cote, avec une progression des positions au-dessus des 8% actuellement. L'action n'est pas encore au niveau de Casino et de Vallourec (entre 12 et 13%), les préférées des vendeurs à découvert depuis plusieurs mois, mais elle a dépassé des dossiers comme Technicolor ou CGG.
 
Selon le vieil adage chiraquien selon lequel "Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille", Altran n'est pas forcément au bout de ses peines. Le 9 novembre, l'Autorité de la concurrence révélait le lancement d'une enquête dans le domaine des sociétés de conseil, d'ingénierie et d'informatique en France, sur des soupçons de pratiques anticoncurrentielles. Le régulateur n'avait pas voulu donner de noms mais il est rapidement apparu qu'Altran en fait partie ('L'Humanité' l'avait initialement révélé). En parallèle, le groupe serait dans le collimateur du fisc français pour sa gestion de certaines notes de frais (une information obtenue par 'La Lettre A', que nous avions relayée).

Enfin, Altran a annoncé le 5 décembre le départ du patron de sa division nord-américaine, ex-Aricent, Frank Kern, pour cause de "départ à la retraite". Une situation qui est censée pouvoir s'anticiper, mais qui en l'occurrence ne l'a pas été puisque son successeur n'a pas été désigné. De là à penser que la rupture n'était pas préparée, il n'y a qu'un pas franchi par Invest Securities il y a quelques jours, lorsque le bureau d'études écrivait "si le motif évoqué par Altran est un départ en retraite, le profil Linkedin de Frank Kern le présente comme Directeur Général de Huntley Enterprises après son départ d’Altran Amérique du nord".

Bref, la prudence affichée par le marché actuellement est tout sauf imméritée. Un bon suivi de l'évolution de la vente à découvert s'impose.