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TÉHÉRAN (awp/afp) - L'"élément clef" à l'origine du drame du Boeing ukrainien abattu le 8 janvier près de Téhéran (176 morts) est une "erreur humaine", le mauvais réglage d'un radar militaire ayant été suivi d'autres dysfonctionnements, selon un rapport de l'Aviation civile iranienne.

Cette nuit-là, les défenses aériennes de la République islamique étaient en état d'alerte maximale par crainte d'une attaque américaine.

L'Iran venait d'attaquer aux missiles une base utilisée par l'armée américaine en Irak en riposte à l'élimination quelques jours plus tôt, dans une frappe de drone américaine à Bagdad, du général Qassem Soleimani, artisan de la stratégie régionale de l'Iran, et s'attendait à une réplique de Washington.

Dans ces conditions, à la suite du replacement d'une unité de défense aérienne de Téhéran, "il y a eu un manquement dû à une erreur humaine dans le suivi de la procédure" d'étalonnage d'un système radar, écrit l'Organisation de l'aviation civile iranienne (CAO) dans un rapport mis en ligne samedi soir sur son site internet.

Selon le document, cela a induit une "erreur de 107 degrés" dans le système utilisé par l'unité, ne permettant plus d'appréhender correctement la trajectoire des objets dans son champ.

"Chaîne dangereuse"

Cette faute initiale "est à l'origine d'une chaîne dangereuse [d'événements] qui bien sûr aurait pu être maîtrisée si d'autres mesures avaient été prises", écrit la CAO.

Mais selon son document, présenté comme un "rapport sur les faits" et non comme le rapport final de l'enquête, d'autres erreurs ont eu lieu dans les minutes fatales qui ont suivi.

L'Aviation civile relève ainsi un défaut dans la transmission au centre de coordination des unités de défense des données sur la cible repérées par le radar.

Un général iranien avait déclaré en janvier que nombre de communications avaient été brouillées cette nuit-là.

La CAO note qu'en dépit des informations erronées dont il disposait sur la trajectoire de l'aéronef, l'opérateur du système radar aurait pu identifier sa cible comme étant un avion de ligne, mais au contraire, il s'est trompé dans l'analyse et il y a eu "mauvaise identification".

Le rapport note également que le premier des deux missiles tirés sur l'avion a été mis à feu par l'opérateur d'une batterie de défense "sans que celui-ci eut reçu de réponse du centre de coordination" dont il dépendait.

Le deuxième missile a été tiré trente secondes plus tard en tenant compte "de la continuité de la trajectoire de la cible détectée", ajoute le rapport.

Le vol PS-752 de la compagnie Ukraine International Airlines (UAI) reliant Téhéran à Kiev a été abattu le 8 janvier par deux missiles.

Les 176 personnes à bord de l'appareil, un Boeing 737, majoritairement des Iraniens et des Canadiens, mais aussi 11 Ukrainiens (dont les neuf membres d'équipage) ont péri dans la catastrophe.

La tragédie a suscité une forte réprobation en Iran, surtout après qu'il eut fallu trois jours pour que les forces armées reconnaissent avoir abattu l'avion "par erreur" après qu'un opérateur de batterie de missiles l'eut pris pour un missile.

Depuis des mois, le Canada et l'Ukraine réclament que l'Iran envoie les boîtes noires de l'appareil à l'étranger pour que les données en soient extraites et analysées, la République islamique ne disposant pas des moyens techniques de le faire.

Boîtes noires

Fin juin, le Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) français a indiqué que l'Iran lui avait officiellement "demandé [son] assistance technique" pour réparer et télécharger les données des boîtes noires.

Les travaux sur le "Cockpit Voice Recorder" (CVR), qui enregistre les conversations entre pilotes et les bruits dans l'avion, et le "Flight Data Recorder" (FDR), qui relève tous les paramètres de vol (vitesse, altitude, régime des moteurs, trajectoire, etc.), "devraient débuter le 20 juillet", selon le BEA.

Début juillet, le Canada a annoncé avoir obtenu de l'Iran un accord de principe en vue de lancer des négociations sur l'indemnisation des familles des victimes étrangères du Boeing 737 d'UAI.

Selon Ottawa, le "groupe de coordination" des pays dont des ressortissants sont morts dans le crash du vol PS752 (Canada, Royaume-Uni, Ukraine, Suède et Afghanistan), a signé un "protocole d'entente" ouvrant formellement la voie à des négociations avec Téhéran.

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