Non, l’économie européenne n’est pas moins vulnérable à la crise sanitaire actuelle, bien au contraire. Mais avec plus de 100 000 cas et près de 3500 décès dans une centaine de pays et territoires, la menace du Coronavirus s’intensifie et les cambistes délaissent pour de bon leurs carry trades, propulsant la monnaie unique vers des niveaux inédits depuis juillet dernier.

Pour faire simple, le carry trade est une stratégie populaire sur les changes qui consiste à profiter d’un différentiel de taux entre deux pays ou zones économiques. On achète une monnaie dite cible offrant un rendement plus intéressant (USD ou CAD par exemple) en vendant une devise dite de financement (actuellement EUR, JPY ou CHF).

Ce genre de positions a tendance à se déboucler très rapidement lorsque l’aversion au risque fait vaciller les indices boursiers puisque les investisseurs anticipent logiquement une réduction plus nette des taux les plus élevés. Ce phénomène, purement technique, s’observe actuellement sur plusieurs paires, dont EUR/USD.

Dans les faits, la Réserve Fédérale américaine a d’abord surpris les marchés le 3 mars dernier en décidant de ne pas attendre sa prochaine réunion prévue le 18 pour abaisser le loyer de l’argent d’un demi-point, une première depuis 2008 et la faillite de Lehman Brothers. La fourchette est désormais comprise entre 1 et 1.25%, contre 1.50%-1.75% auparavant.

Avec cette décision, qualifiée de réaction-panique par de nombreux observateurs, la FED a échoué à tempérer les inquiétudes. Certes, le solide rapport mensuel sur l’emploi de février dévoilé par l’Oncle Sam a un peu freiné la chute de Wall Street, cependant la nervosité des cours illustre très nettement la persistance des craintes de contagion du Covid-19 à l’échelle planétaire. Et les argentiers américains, qui disposent toujours d’une plus grande marge de manœuvre que la BCE, pourraient agir de nouveau le 18 mars.

Graphiquement, l’Euro a d’abord franchi un niveau-clé en clôture quotidienne (1.1219 USD) avant d’accélérer au-delà de 1.13 USD. Le niveau actuel de la monnaie unique, combinée à une forte augmentation de la volatilité, laisse peu de doute quant à la crédibilité d’un retracement vers 1.1219, voire 1.1138 et 1.1014 USD. Néanmoins les nombreuses inconnues, liées au développement de l’épidémie et au comportement des banques centrales dans pareil contexte, altèrent notre visibilité. Nous sommes provisoirement à l’écart.