Washington (awp/afp) - Inutile de stimuler davantage l'économie américaine: avec un marché de l'emploi qui bat son plein et une croissance relativement solide, la banque centrale américaine sera la semaine prochaine dans la position confortable de n'avoir rien à décider... pour le moment.

Depuis 11 ans, les Etats-Unis profitent d'une croissance plutôt soutenue comparée à celle des pays développés. C'est aussi la plus longue période d'expansion de l'histoire contemporaine du pays.

Si la guerre commerciale contre la Chine maintient un climat d'incertitude permanent et a fait des victimes collatérales - l'industrie manufacturière et le secteur agricole -, les ménages américains restent confiants. Et leur propension à dépenser reste le meilleur gage de la croissance.

En outre, l'administration Trump a révisé en hausse la croissance pour le troisième trimestre (2,1% en rythme annuel) balayant les inquiétudes de certains économistes sur la perspective d'une récession à court terme.

Le rapport sur l'emploi, publié vendredi, a achevé de dissiper les doutes sur des indicateurs susceptibles de faire flancher la Réserve fédérale dans son intention de faire une pause après trois baisses d'affilée.

En novembre, l'économie de la première puissance mondiale a en effet créé 266.000 nouveaux emplois, bien plus que les 182.000 escomptés par les économistes.

Certes, une partie (54.000) s'explique par un élément purement technique: le retour dans les usines des ouvriers de General Motors après une grève historique de 40 jours.

Tout un pan de l'économie affiche pour autant clairement sa résistance, comme le secteur de la santé qui a créé 45.000 nouveaux postes en novembre, et 414.000 au cours des douze derniers mois, selon les données du ministère du Travail. Pour le seul secteur des loisirs et du tourisme, ce sont 45.000 emplois supplémentaires qui ont été comptabilisés en un mois, et 219.000 cumulés sur quatre mois (juillet-octobre).

Depuis la fin de la précédente réunion du Comité monétaire de la Fed qui avait fait tomber les taux d'intérêt dans une fourchette comprise entre 1,50% et 1,75%, le président de la Réserve fédérale (Fed) Jerome Powell s'est exprimé à plusieurs reprises, jugeant la politique monétaire "au bon niveau". Il a estimé que seules des données alarmantes pourraient faire réviser ce jugement.

La Fed annoncera sa décision mercredi à 14h00 locales (19H00 GMT).

"Sur la durée"

Alors que le président Donald Trump réclame encore davantage de baisses des taux, voire des taux négatifs à l'instar de la zone euro ou du Japon, la Fed a écarté cette option.

Mais le patron de la Fed sera très attendu sur sa vision des mois à venir.

La croissance va-t-elle se poursuivre? Alors que la Maison Blanche menace d'imposer, le 15 décembre, de nouveaux tarifs douaniers sur quelque 160 milliards de dollars de biens chinois, les frictions commerciales vont-elles porter un coup d'arrêt à la croissance? La Fed va-t-elle procéder à d'autres baisses en 2020?

Jerome Powell avait estimé récemment que le plein effet des baisses des taux, qui rendent les emprunts moins chers tout en favorisant investissements et consommation, se feraient sentir "sur la durée".

Mais les trois baisses précédentes vont-elles continuer de doper le moral aux ménages?

La consommation, qui représente plus de 70% du Produit intérieur brut (PIB) américain, demeure "le plus grand risque", souligne Rubeela Farooqi, chef économiste chez High Frequency Economics (HFE).

Pour l'heure, l'économiste Diane Swonk, de Grant Thornton, observe que la trêve apparente entre Pékin et Washington semble avoir attisé l'appétit des consommateurs et des entreprises.

"La détente dure depuis plus de 50 jours", a-t-elle déclaré à l'AFP, notant que les investisseurs espéraient que la nouvelle série de tarifs ne serait pas appliquée la semaine prochaine.

La fin de l'été avait été marqué par un ralentissement économique, une escalade dans le conflit sino-américain freinant les investissements et un secteur manufacturier tombant en récession. La Fed s'était alors résolue à abaisser ses taux directeurs trois fois de suite.

"La porte reste ouverte à d'autres baisses des taux", estiment des économistes d'Oxford Economics, projetant même une baisse en mars en raison des risques sur les perspectives de croissance et d'inflation.

afp/rp