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LONDRES (awp/afp) - La Bourse de Hong Kong a fait mercredi une offre surprise de mariage sur sa rivale de Londres pour 32 milliards de livres, s'interposant ainsi dans ses fiançailles avec Refinitiv.

La Bourse de Hong Kong affirme qu'un tel rapprochement créerait un groupe avec "une assise mondiale, des actifs diversifiés, idéalement positionnée pour profiter de l'évolution du paysage macroéconomique", et créer une liaison entre les marchés de l'est et de l'ouest.

Cette offre survient toutefois alors que London Stock Exchange (LSE) est en passe de racheter le fournisseur de données financières Refinitiv pour 27 milliards de dollars.

"Le LSE est au milieu d'une autre transaction (...) c'est en partie pourquoi cette (proposition) est maintenant sur la table" a reconnu Charles Li, le directeur général du Hong Kong Exchanges and Compensation (HKEX).

Encore plus clairement, il a aussi insisté sur le fait que leur offre tient à condition que le projet de mariage avec Refinitiv "ne se poursuive pas".

Le LSE a de son côté accueilli sans enthousiasme les déclarations d'intentions de Hong Kong: "le conseil d'administration du groupe London Stock Exchange (...) confirme que le HKEX a fait une offre non sollicitée, préliminaire et hautement conditionnelle".

Il va l'étudier et donnera sa réponse "au moment opportun", ajoute-t-il dans un communiqué, insistant sur les "bons progrès sur sa proposition d'acquisition de Refinitiv".

Réticences politiques

Avec son projet d'union avec Refinitiv, basé à New York et l'un des principaux fournisseurs mondiaux de données pour les professionnels des marchés, le LSE veut concurrencer Bloomberg, en position dominante dans les salles de marché du monde entier.

Ce rachat est toutefois encore suspendu à une série de feux verts réglementaires et à l'aval des actionnaires du LSE.

Le mariage envisagé avec Refinitiv fait suite à l'échec d'une tentative de fusion à 21 milliards de livres du LSE avec le groupe boursier allemand Deutsche Börse, bloquée par les régulateurs européens en 2017.

Pour fusionner avec le LSE, le HKEX propose 83,61 livres par titre du London Stock Exchange (LSE) en cash et titres du HKEX, bien au-dessus du cours actuel.

Pour les plus de 350 millions de titres du groupe britannique, cela représente 31,6 milliards de livres (près de 36 milliards de dollars) en incluant la dette de quelque 2 milliards.

Cette demande en mariage surprise a fait bondir l'action du LSE de 5,91% à 7.206,00 pence, mais nombre d'analystes soulignaient que l'envolée aurait été supérieure si les chances de succès de l'opération ne semblaient pas ténues.

La présidente du HKEX Laura Cha a fait valoir que les deux places boursières étaient "très complémentaires" et qu'elle n'attend donc pas beaucoup d'"obstacles du côté des régulateurs".

Face aux craintes politiques qu'un rachat de l'emblématique Bourse de Londres par sa concurrente de Hong Kong pourrait susciter, Mme Cha a assuré que le LSE "continuerait à être régulée par la FCA" (Financial Conduct Authority), l'autorité des marchés britannique.

"Si vous regardez notre historique de propriétaire responsable du London Metal Exchange", la plateforme d'échanges spécialisée dans les métaux qu'elle a rachetée en 2012, "tout ce que nous avons fait c'est d'y investir, de l'améliorer", a-t-elle argumenté.

"Enjeux gigantesques"

Pour Richard Hunter, analyste chez Interactive Investor, "les enjeux de l'offre sont gigantesques en termes de relation est-ouest et elle a du sens stratégiquement".

Mais selon lui "l'opération est loin d'être faite", compte tenu des possibles problèmes de concurrence sans oublier la question politique vu le lien historique entre le Royaume-Uni et Hong Kong.

Neil Wilson, analyste chez Markets.Com, juge lui aussi que l'offre "audacieuse" a peut-être été encouragée par la baisse de la livre, qui rend les entreprises britanniques plus vulnérables aux tentatives de rachat.

Il anticipe que "le gouvernement britannique ne voudra peut-être pas voir un tel symbole (...) et actif stratégique être détenu par des étrangers".

D'autant que cela "l'offrirait aux Chinois par la porte arrière de Hong Kong", sans compter que "l'Union européenne a son mot à dire pour l'instant au moins" et que les Etats-Unis risquent "de ne pas aimer ça du tout".

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