Créé en 1977, le groupe familial MEDIA 6, spécialiste du marketing du point de vente (Publicité sur le Lieu de Vente et agencement) vient de réaliser une acquisition majeure qui dopera son activité de plus d’un tiers. Désormais positionné en Europe, en Amérique du Nord et en Asie, avec un ancrage fort sur le cosmétique/luxe, l’industriel se montre confiant dans la dynamique commerciale après un exercice 2019 en repli. Le groupe a par ailleurs enregistré une légère progression de 3,3% de ses ventes au 1er trimestre 2020 en rappelant que ce premier quart de l’exercice n'est pas représentatif de l'activité globale qui reste caractérisée par une saisonnalité avec un 2nd semestre historiquement plus élevé que le 1er.

Laurent Frayssinet, MEDIA 6 trouve sa raison d’être dans le fait que "50% des achats se décident sur le point de vente". Est-ce bien toujours le cas ?

"Oui, car contrairement à ce que l’on aurait pu craindre avec le développement du e-commerce ou l’arrivée des milléniaux, les consommateurs    ne désertent pas les points de vente dans les domaines du premium et du luxe sur lesquels nous avons un positionnement fort. L’impulsion d’achat générée par l’expérience vécue en magasin reste d’autant plus d’actualité, en particulier dans le travel retail, qui se développe fortement, non seulement dans les aéroports mais également les gares ou les bateaux de croisière."

Source : société

Quel regard portez-vous sur les résultats annuels publiés dernièrement ?

"Le recul de l’activité, qui s’est élevé à 9,6% au 1er semestre et a été ramené -3,4% au second, pour atterrir sur un CA annuel à fin septembre de 77,1 M€, est bien sûr un peu frustrant.  A noter que la baisse fut essentiellement concentrée sur l’activité Métal en Europe (près de 15% du CA n.d.l.r.) et une partie de notre activité en Chine, notre filiale récemment acquise DDF. Dans ce contexte, notre profitabilité a cependant très bien résisté grâce à l’amélioration de notre marge sur coûts directs et la bonne maîtrise des frais fixes, ce qui a permis à notre résultat opérationnel courant de ressortir quasiment stable, à 4,2 M€. Enfin, notre trésorerie nette est sortie renforcée, à 18 M€."

Source : Media 6

Plusieurs activités ou filiales ont plombé ces résultats. Avez-vous trouvé les clés pour les redresser ?

"En 2019, l’activité qui a le plus souffert est l’activité Métal, dans laquelle nous avons connu en fin d’exercice des décalages de programmes clients sur notre premier trimestre 2019/20, qui commence en octobre. Heureusement, le démarrage du nouvel exercice s’en retrouve favorisé et cette activité offre des perspectives intéressantes pour la fin de l’année, même si nous gardons toujours une certaine prudence face aux décalages potentiels. Combiné à une bonne maitrise des frais fixes, cette activité Métal doit donc se redresser cette année.

En Chine, la filiale DDF qui a rejoint le groupe encore récemment et qui est positionnée sur la bijouterie et l’horlogerie, a été restructurée en 2019 afin de l’aligner sur l’organisation de MEDIA 6 en Chine, dont le chiffre d’affaires a progressé de 20% l’an dernier. Cette réorganisation couplée à la dynamique commerciale de DDF déjà prometteuse au premier trimestre devrait permettre d’atteindre l’équilibre opérationnel cette année.

Enfin, Mediacolor en Espagne souffre de son positionnement sur le marché compliqué des mèches de cheveux, mais notre travail commercial entrepris depuis 2 ans se traduit actuellement par des prises de commandes pluriannuelles face à des concurrents affaiblis. Au total, cela fait environ 18% de notre chiffre d’affaires qui retrouve une dynamique positive en ce début d’année."

Cartographie des sites MEDIA 6 - Source : société

L'évènement majeur de ce début d'exercice 2020 est la finalisation de l'acquisition de la société canadienne Interior Manufacturing Group (IMG – CA 29 M€ environ), spécialisée dans la réalisation d'agencements de points de ventes de luxe sur le marché nord-américain. Quelles sont les raisons stratégiques de cette opération, son prix et son financement ? En quoi cette acquisition modifie-t-elle le profil du groupe ?

"MEDIA 6 déploie une stratégie de présence globale auprès de donneurs d’ordre globaux... Think Global, Act Regional. Nous cherchions donc depuis des années à couvrir le territoire nord-américain et dès 2015 déjà, nous nous étions intéressés à IMG, qui n’était pas allé jusqu’au bout de son processus de vente. Quand les principaux dirigeants et actionnaires d’IMG ont relancé le processus au second semestre 2019, nous leur avons fait une proposition qui a été acceptée.

Au-delà de sa situation géographique, nous apprécions la culture d’IMG, proche de la nôtre du fait de son intégration industrielle et de son positionnement premium sur le luxe et la cosmétique. Avec IMG, nous sommes entrés dans le cercle extrêmement réduit des sociétés présentes industriellement sur les trois principaux continents. Nous ne communiquons pas sur le prix, nous pouvons juste dire qu’il comprend un earn out, que les dirigeants restent présents dans la société, et que nous avons financé l’acquisition par un emprunt d’environ 16 M€ au taux fixe de 1% sur 7 ans et sur fonds propres. IMG a réalisé une croissance annuelle moyenne de 11% depuis 2012 pour atteindre 29 M€ de CA estimé en 2019. C’est une société au bilan solide et à la profitabilité supérieure à la nôtre. Nous l’intégrerons dans nos comptes au 1er trimestre 2020.  Au-delà des synergies commerciales évidentes auprès des grands acteurs du luxe aux Etats-Unis, MEDIA 6 apportera en particulier les compétences de son studio de création ou du MEDIA 6 Lab, vitrine d’innovation du groupe pour le marketing expérientiel interactif et connecté. Nous comptons également dégager des synergies industrielles en leurs apportant notre savoir-faire sur la production série de PLV ou encore sur nos sources d’approvisionnement en Asie."

Quelques réalisations d’IMG (source : MEDIA 6)

MEDIA 6 dispose d’une trésorerie nette positive et dégage une marge brute d’autofinancement annuelle d’environ 5 M€. Avez-vous d’autres projets d’acquisition ? Quelle utilisation comptez-vous faire des 5,2% d’actions auto détenues ? Etes-vous attaché à votre cotation boursière ?

"Les cours actuels ne reflètent pas la valeur de l’entreprise et nous avons d’autres leviers de financement, donc l’intérêt est aujourd’hui effectivement limité. D’où nos rachats de titres sur le marché qui ont porté la part du capital auto-détenu à 5,2%. Concernant la croissance externe, nous sommes en veille d’opportunités dans un secteur en mouvement ces dernières années et avons régulièrement des dossiers à l’étude, c’est notamment pour cela que nous avons gardé des liquidités au bilan et eu recours à l’emprunt à taux avantageux pour acquérir IMG, mais nous restons prudents sur les projets d’acquisition et cela peut prendre du temps."

MEDIA 6 a fait l’objet d’un contrôle fiscal portant sur la période allant du 01/10/2015 au 30/09/2018. La proposition de rectification émise le 26/12/2019 fait état d’un montant de redressement de 870 K€ …

"Le montant de la proposition de rectification fera l’objet d’une provision au 1er semestre. Je ne peux en dire plus, cette proposition ayant fait l’objet d’une contestation globale auprès de l’administration fiscale."

Votre filiale ATELIERS NORMAND, acquise en 2015, est bien positionnée auprès des Chantiers de l’Atlantique. Profitera-t-elle des commandes très importantes annoncées dernièrement ?

 "Nos commandes fermes s’étalent maintenant jusqu’en 2024, et si nous sommes sélectionnés sur les projets de navires MSC sur lesquels nous sommes en train de plancher, notre visibilité s’étendra fin 2020 jusqu’en 2027, voire 2029 avec les options."

 

L'auteur est actionnaire de la société à titre personnel.