Entrepreneur dès la fin de ses études, Denys Sournac, 57 ans, s’est lancé dans l’aventure Medicrea il y a 27 ans. Sentant que sa technologie visionnaire ne pourrait atteindre l’ampleur mondiale qu’elle méritait avec ses moyens limités, il cherche depuis quelques temps à adosser sa PME à un gros acteur, forcément américain. C’est la référence du secteur, Medtronic, 1000 fois plus gros, qui devrait logiquement l’emporter moyennant un chèque de 181 M€ (soit 5,5x le CA) et un beau projet industriel pour l’entreprise lyonnaise.

Denys Sournac, qu’est-ce-qui a motivé le souhait d’adosser la société que vous avez fondé en 1993 à un grand acteur de la chirurgie de la colonne vertébrale ?

"Cela fait près de deux ans que je ne cache pas mon souhait de donner une dimension mondiale à notre technologie et l’entreprise qui la porte.

Pour grandir et donner une dimension mondiale à Medicrea, nous avions besoin d’un partenaire stratégique disposant de moyen financiers et marketing que nous n’avons pas en tant que PME. En rejoignant un acteur comme Medtronic, n°1 mondial des implants du rachis avec plus d’un tiers du marché, notre plateforme UNiD ASI™ va pouvoir, couplée à celle de Medtronic, devenir un standard mondial. C’était la brique qui leur manquait pour en quelques sortes augmenter l’intelligence du chirurgien comme sa vision et ses mains sont déjà augmentées".

 La crise sanitaire provoquée par la pandémie mondiale a-t-elle influencé les conditions de vente ?

"C’est difficile à dire. Les discussions avaient démarré au mois de septembre et ont pu reprendre en mai quand la situation se stabilisait de part et d’autre de l’Atlantique. En interne, nous avons anticipé la crise dès février, en mettant par exemple en place des mesures barrières bien avant le confinement. L’entreprise s’était préparée à une quasi-absence de chiffre d’affaires au 2e trimestre, et finalement les interventions ont commencé à être reprogrammées dès la mi-mai avec une forte reprise en juin. Un patient qui souffre peut difficilement attendre et l’activité perdue n’est que reportée, à 100%. J’estime que la valeur d’entreprise de 181 M€ qui ressort de cette OPA à 7€ par Medtronic est très correcte et qu’elle met Medicrea sur un nouveau chemin de croissance".

 Quel est l’avenir de Medicrea à Lyon et en tant que société cotée ?

"L’adossement de Medicrea à Medtronic est un beau projet qui met à l’abri ses employés et lui donne les moyens de se développer. Medtronic a l’intention de faire de notre campus de Lyon son centre mondial d’intelligence artificielle.  Pour ma part, je vais les accompagner pour assurer la continuité du projet et lui faire prendre de l’ampleur qu’il mérite. Ce sera inédit pour moi d’évoluer au sein d’un grand groupe, j’ai 57 ans et j’ai toujours été entrepreneur ! Quant à la Bourse, l’opération a toutes les chances d’aboutir : les investisseurs que j’ai sondés comptent apporter à l’offre et je ne serais pas étonné que Medtronic parvienne à acquérir 90% du capital et procède à un retrait de cote".

 Y a-t-il une probabilité de surenchère ?

"Je dirais qu’elle est limitée mais pas nulle car nous avons discuté avec la quasi-intégralité des acteurs américains qui comptent et elles ont toutes fait part de leur intérêt pour notre plateforme de chirurgie préopératoire à base d’intelligence artificielle qui correspond à la stratégie d’avenir de tous les gros acteurs. Je rappelle que notre technologie permet d’anticiper deux ans à l’avance les résultats cliniques et les éventuels phénomènes compensatoires post opération. Cette technologie suscite beaucoup d’appétit et nous sommes ravis que l’acteur de référence du secteur l’adopte et en face un standard mondial".