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PARIS, 15 mai (Reuters) - Un rapport parlementaire appelle le gouvernement à passer à l'action contre une loi américaine destinée à lutter contre la fraude fiscale mais exposant les "Américains accidentels" à des effets pervers, notamment des discriminations de la part des établissements financiers.

Du fait de la loi dite "Foreign account tax compliance act" (FATCA) promulguée en 2010 et applicable en France depuis la signature en 2013 d'un accord bilatéral avec Washington, les banques, assurances et entreprises gérant des opérations boursières sont tenues de transmettre au fisc des Etats-Unis des informations sur les revenus et les placements de leurs clients américains, sous peine de pénalités financières importantes.

Craignant d'être la cible de sanctions extraterritoriales de la part des Etats-Unis, de nombreuses banques "choisissent, à titre préventif, de se séparer de clients (concernés) ou d'en refuser de nouveaux", observent les auteurs de ce rapport publié mercredi, les députés Marc Le Fur (Les Républicains, LR) et Laurent Saint-Martin (La République en Marche).

Elles font également preuve d'un "respect exagéré de leurs obligations", qui exposent des citoyens français disposant également, de façon fortuite, de la nationalité américaine, à des obstacles allant "de tracasseries administratives à des cas de véritable discrimination".

Pour les deux députés, les pouvoirs publics doivent remédier à cette situation, tout d'abord en imposant aux banques "de cesser toute discrimination et (...) de ne pas se montrer plus diligentes" que demandé.

Par ailleurs ils estiment que le gouvernement "ne saurait rester sans prendre d'initiatives et doit impérativement entamer de véritables négociations" avec Washington, quitte à dénoncer l'accord FATCA faute d'avancées.

OUVRIR UNE "VÉRITABLE NÉGOCIATION"

"Il faut ouvrir une véritable négociation avec les Etats-Unis et rappeler à l'administration américaine son engagement de fournir des éléments de réciprocité. Cet accord, nous l'avons signé sous réserve de réciprocité", a déclaré Marc Le Fur lors de la présentation du rapport à la commission des Finances de l'Assemblée.

Le président LR de la commission des Finances, Eric Woerth, a quant à lui estimé que "si Donald Trump était européen, il aurait dénoncé le FATCA depuis longtemps parce que justement il n'y a pas réciprocité et il y a surpuissance d'un Etat".

Les "Américains accidentels" - qui seraient plusieurs milliers - sont des Français disposant également de la nationalité américaine, par filiation ou parce qu'ils sont nés sur le territoire des Etats-Unis.

Même s'ils n'ont pas d'attache particulière aux Etats-Unis où ils n'ont parfois résidé que quelques jours dans leur enfance, ces citoyens binationaux sont automatiquement considérés par le fisc américain comme des contribuables imposables sur l'ensemble de leurs revenus mondiaux.

Faute d'avoir déclaré leurs revenus aux Etats-Unis, ils peuvent donc parfois se retrouver en situation irrégulière à l'égard du fisc américain sans même en être conscients.

A l'inverse, la France, comme la quasi-totalité des pays à l'exception des Etats-Unis et de l'Erythrée, fonde les prélèvements sur un critère de résidence.

La situation de ces "Américains accidentels" est d'autant plus complexe que le renoncement à leur nationalité américaine nécessite des démarches longues et coûteuses.

L'Association des Américains accidentels (AAA) qui revendique 700 adhérents, a déposé un recours devant le Conseil d'Etat en octobre 2017 pour demander l'annulation de l'accord FACTA.

Quelque 300 de ses membres ont par ailleurs déposé en mars dernier une plainte contre X pour discrimination contre des établissements bancaires. (Myriam Rivet avec Leigh Thomas, édité par Sophie Louet)

Valeurs citées dans l'article : AXA, Crédit Agricole, Natixis, Société Générale