(Répétition sans changement d'une dépêche transmise jeudi)

* Les actions résistent, la volatilité baisse

* L'espoir sur le commerce porte les actifs risqués

* L'économie chinoise paraît se stabiliser

* Une avalanche de résultats se profile

par Patrick Vignal

PARIS, 23 avril (Reuters) - La sérénité des marchés a de quoi surprendre, les investisseurs témoignant d'un appétit modéré mais réel pour les actifs risqués et paraissant avoir oublié pour un temps de lourdes menaces qui sont pourtant loin d'avoir disparu.

La saison des comptes trimestriels des entreprises va gagner en intensité sans avoir perturbé pour l'instant ce fragile retour au calme qui permet au Stoxx 600 européen et au S&P-500 américain d'évoluer à des pics de respectivement huit et six mois, l'indice large de Wall Street n'étant plus qu'à moins de 1% de son record de septembre.

Des volumes étriqués et des flux sortants sur les actions, notamment européennes, parallèlement à un regain d'intérêt pour les obligations, indiquent toutefois que le climat n'a rien d'euphorique.

La peur d'une récession, qui avait refait surface le mois dernier après la décision de la Réserve fédérale de suspendre le resserrement de sa politique monétaire, est cependant moins présente, les rendements obligataires s'apaisent et la volatilité se traite au plus bas depuis fin septembre.

Attention toutefois à ne pas sous-estimer les risques qui pèsent sur l'économie mondiale comme sur les marchés financiers, avertit Axel Botte, en charge de la stratégie chez Ostrum Asset Management.

"Le changement de ton de la Fed a provoqué une accumulation de positions vendeuses de volatilité", note-t-il. "Cela traduit une certaine complaisance des intervenants face aux risques économiques et financiers".

La baisse de la volatilité et le regain d'attrait des actions s'expliquent en outre par l'espoir d'un accord commercial à court terme entre les Etats-Unis et la Chine et par le délai supplémentaire de six mois accordé par Bruxelles aux Britanniques pour s'entendre sur les modalités de leur sortie de l'Union européenne.

Cette décision ne fait pourtant qu'ouvrir une nouvelle parenthèse d'incertitudes, soulignent dans leur note hebdomadaire les experts de Fidelity International, qui se disent eux aussi surpris par la placidité des marchés.

La même analyse pourrait s'appliquer à la question des tensions commerciales, les investisseurs paraissant se contenter de la vague promesse d'un accord pas trop lointain entre les deux premières économies du monde.

LA CHINE RASSURE

Autre soutien pour les actifs risqués, des annonces venues de Chine indiquant que les mesures de stimulation mises en oeuvre par les autorités de Pékin portent leurs fruits et que la deuxième économie du monde se stabilise.

La Chine a ainsi enregistré une croissance de 6,4% au premier trimestre en rythme annuel, comme lors des trois derniers mois de 2018, déjouant les pronostics grâce notamment à une amélioration de la production industrielle et de la demande des ménages.

"Le bilan qu'on peut faire, c'est que l'économie chinoise poursuit sa phase de convalescence au premier trimestre avec des mois de janvier et de février qui étaient encore négatifs et un mois de mars qui au vu des dernières données confirme un début de stabilisation qui a toutes les chances de se poursuivre au deuxième trimestre", analysent les experts de Saxo Banque.

Ces signaux contribuent à faire monter doucement les actions dans des marchés plutôt tranquilles.

En outre, le rebond inattendu des ventes au détail aux Etats-Unis en mars est de bon augure avant la publication, vendredi, des chiffres de la croissance américaine au premier trimestre, attendue à 1,8% en rythme annualisé, contre 2,2% au dernier trimestre 2018.

Les inquiétudes pour la croissance restent néanmoins bien présentes, en particulier dans la zone euro où l'activité économique a débuté le deuxième trimestre au ralenti, selon les résultats préliminaires des enquêtes auprès des directeurs d'achat (PMI) publiés jeudi.

LES RÉSULTATS SOUS SURVEILLANCE

S'il ne faut rien attendre de fracassant de la décision monétaire qu'annoncera jeudi la toujours très accommodante Banque du Japon, la pluie de résultats qui se profile est plus menaçante avec, pêle-mêle, Boeing, Facebook, Microsoft, et Credit Suisse, qui publieront les leurs mercredi, puis Ford, Intel, Bayer , UBS ou encore Barclays, dont les comptes sont attendus pour le lendemain.

Les gérants veulent savoir si les résultats des entreprises justifient des valorisations particulièrement tendues. Dans ce contexte, la sanction en cas de résultats ou de prévisions inférieurs aux attentes pourrait être terrible.

Certains secteurs sont particulièrement sous surveillance, notamment les banques, qui souffrent dans un environnement de taux bas, et les valeurs technologiques, en première ligne dans l'affrontement commercial entre Washington et Pékin.

En attendant, un optimisme prudent se fait entendre, notamment de la part des équipes de Lyxor, qui évoquent des perspectives de bénéfice pour les investisseurs au deuxième trimestre.

"L'environnement d'alpha se normalise après des mois de montagnes russes", lit-on dans la note hebdomadaire rédigée par les experts de la filiale de gestion d'actifs de Société générale. "Le soutien apporté par les banques centrales mondiales, les mesures de relance en Chine et la dissipation des incertitudes politiques ont amélioré la confiance et la liquidité."

COMME EN 2016, MAIS EN MOINS BIEN

Le redressement des marchés depuis les plus bas de la fin de l'année dernière n'est pas sans rappeler celui de 2016, ajoutent-ils avant de questionner aussitôt la pertinence de la comparaison.

"Il sera toutefois de moindre ampleur à notre avis, dans la mesure où chacun des éléments moteurs (mesures de politique monétaire, relance chinoise, atténuation des incertitudes) sera confronté à des limites, en plus d'être désormais en partie intégré dans les cours", tempèrent-ils.

Ils énumèrent ensuite leurs préoccupations, au premier rang desquelles l'évolution des incertitudes politiques et les fluctuations des politiques monétaires, deux thématiques qui pèsent sur les marchés depuis des mois.

Une guerre commerciale reste identifiée comme le principal risque sur les marchés, sur fond de craintes généralisées sur la croissance, montre par ailleurs le sondage mensuel réalisé par Bank of America Merrill Lynch (BAML) auprès des gérants mondiaux.

Si la plupart des gérants notent que la croissance se tasse et que l'inflation refuse toujours de décoller, ils pensent à 70% qu'une récession mondiale n'interviendra pas avant le second semestre 2020. En attendant peut-être la prochaine alerte leur faisant craindre qu'elle soit au coin de la rue.

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GRAPHES-Le positionnement sur la volatilité, à nouveau en zone dangereuse (édité par Blandine Hénault)