VIENNE, 13 août (Reuters) - La Commission d'enquête de l'Onu a réuni suffisamment d'éléments de preuve pour que le président syrien Bachar al Assad soit jugé pour crimes de guerre, a déclaré Carla del Ponte, membre de la commission, dimanche.

Del Ponte, qui a mené les poursuites pour les crimes commis au Rwanda et dans l'ancienne Yougoslavie, a annoncé la semaine passée qu'elle quittait ses fonctions en raison de l'incapacité du Conseil de sécurité de l'Onu à mettre en place un tribunal spécial pour la Syrie afin d'y juger les criminels de guerre.

Dans un entretien au journal suisse SonntagsZeitung, Clara del Ponte se dit convaincue que suffisamment de preuves ont été réunies pour qu'Assad soit condamné pour crimes de guerre.

"C'est la raison pour laquelle la situation est frustrante. Le travail préparatoire a été accompli. Et pourtant il n'y a ni procureur, ni tribunal", explique-t-elle.

Le gouvernement syrien dément les informations de la commission qui a documenté de nombreux crimes de guerre commis par les forces pro-gouvernementales et par les services de sécurité syriens.

Del Ponte, 70 ans, qui fut autrefois procureur fédéral en Suisse, a participé à l'enquête lancée en septembre 2012 qui a réuni des preuves sur l'usage d'armes chimiques, sur le génocide contre le peuple yazidi, les stratégies de siège et les attentats contre les convois humanitaires.

La commission d'enquête constituée en août 2011 a régulièrement publié les résultats de ses travaux mais ses appels sont restés sans suite. Le Conseil de sécurité de l'Onu ne semble pas vouloir transmettre l'affaire à la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye.

"Pendant six ans, la commission a enquêté. Maintenant le ministère public devrait continuer ce travail et traduire les criminels de guerre devant une cour spéciale. Mais c'est exactement ce que la Russie empêche de faire avec son veto au Conseil de sécurité de l'Onu", a expliqué Del Ponte.

La commission a enquêté sur tous les acteurs du conflit syrien, estimant que tous s'étaient livrés à des crimes de guerre.

(François Murphy; Pierre Sérisier pour le service français)