Pour agir au mieux dans le cadre de leur mandat, les argentiers européens disposent, à quelques ajustements juridiques près, des mêmes outils que leurs principaux homologue internationaux (FED, BOE, BOJ, etc).

C’est ainsi que pour éloigner le risque de déflation provoqué par les dernières crises qui ont frappé le Vieux-Continent, la BCE a notamment abaissé son principal taux directeur à zéro, adopté un taux négatif sur les dépôts et lancé un grand programme d’assouplissement quantitatif (QE). Toutes ces mesures réduisent l’attractivité de l’Euro.

Aujourd’hui, Francfort injecte toujours 30 milliards d’euros par mois dans l’économie à travers ce mécanisme de rachats de titres publics et privés. Depuis le début des grandes manœuvres, la banque centrale a augmenté son bilan à hauteur de 2400 milliards, diluant mécaniquement la valeur de la monnaie unique.

Et maintenant ?

Les observateurs s’attendent à ce que le programme prenne fin d’ici la fin de l’année, et probablement dès septembre. Une première hausse de taux, qui interviendra « bien après » la fin du QE selon la formule de la banque centrale, est envisagée d’ici mi-2019 selon le consensus des économistes. Quoi qu’il en soit, les attentes croissantes autour d’un retour à une politique plus conventionnelle soutiennent la devise européenne.

La réunion du 14 Juin

Aidée de nouvelles prévisions économiques, la BCE se réunit ce jeudi 14 juin à Riga en Lettonie. Pour la première fois depuis longtemps, cette échéance concentre beaucoup d’attentions.

Hypothèse 1, la moins probable

Le Conseil des gouverneurs pourrait continuer à jouer la montre, soit en différant l’annonce d’un arrêt du QE, soit en laissant la possibilité de le poursuivre jusqu’à la fin de l’année. Les facteurs qui pourraient motiver une telle prudence sont les suivants :
  • Le risque de guerre commerciale que laisse planer la politique protectionniste américaine, une fois encore amplifié par le revirement inattendu de Donald Trump au dernier G7.
  • La situation politique en Europe où les négociations autour du Brexit s’enlisent tandis qu’une coalition antisystème, dont le programme s’articule autour de nouvelles dépenses, a pris le pouvoir en Italie. La dette de la troisième économie du Vieux-Continent dépasse pourtant déjà 130% du PIB transalpin et représente près d’un quart de la dette publique de l’ensemble de l’Union monétaire. D’une façon générale, les projets populistes continuent de prospérer dans les économies les plus fragiles, menaçant par vagues successives la construction européenne.
  • Les dernières statistiques mitigées du cœur de l’Euroland (Allemagne/France) et le ralentissement de la croissance des Dix-Neuf, qui chute de +0.7% au quatrième trimestre 2017 à +0.4% sur les trois premiers mois de l’année 2018.
Hypothèse 2, la plus attendue

De nombreux analystes s’attendent cependant à ce que la BCE annonce dès ce jeudi qu’elle cessera ses rachats d’actifs après les injections de septembre, tout en rappelant que les taux ne remonteront pas immédiatement après. Plusieurs vents favorables soutiennent ce scénario :
  • La récente baisse de l’Euro offre une tolérance plus large à de potentiels arbitrages spéculatifs en faveur de la monnaie unique.
  • L’inflation qui enregistre une avancée spectaculaire au mois de mai, la hausse des prix à la consommation pointant à +1.9% sur un an. Bien qu’elle soit soutenue par les cours du pétrole, considérés comme un facteur temporaire, elle est désormais en ligne avec l’objectif de la banque centrale (proche mais inférieur à 2%).
  • Les récents propos de Peter Praet, chef économiste de la BCE, au sujet de la nécessité de discussions autour d’un arrêt de QE, montrent que les membres les plus accommodants de l’institution affichent désormais un certain optimisme en matière d’inflation.
  • Le niveau élevé des marchés pourrait enfin encourager le Conseil des gouverneurs à normaliser rapidement pour se laisser une marge de manœuvre supplémentaire en cas de ralentissement plus prononcé de la macro-économie européenne ou de nouvelles secousses boursières.