Paris (awp/afp) - Les taux d'emprunt des pays les plus solides de la zone euro se sont tendus vendredi à la clôture des marchés obligataires européens, après des propos jugés rassurants du commissaire européen aux Affaires économiques sur l'Italie.

"Le marché a été influencé par des propos perçus comme rassurants" au sujet du dossier budgétaire italien, a indiqué à l'AFP Cyril Regnat, stratégiste obligataire chez Natixis. Cela traduit, selon lui, "une légère baisse de l'aversion au risque".

Pierre Moscovici a déclaré vendredi que les tensions sur les taux d'emprunts italiens ne présentaient pas de risque de contagion.

Il s'exprimait à l'issue d'une visite de deux jours à Rome au cours de laquelle il a remis une lettre au ministre italien des Finances Giovanni Tria, demandant des "explications" après l'annonce d'un projet de budget jugé "hors des clous" européens.

M. Moscovici a réitéré qu'il attendait des réponses de la part de M. Tria "avant lundi midi".

Le rendement obligataire italien à dix ans est monté en séance jusqu'à 3,808%, un plus haut depuis février 2014, sur le marché secondaire où s'échange la dette déjà émise. Il a entraîné dans son sillage une hausse des taux obligataires de l'Espagne et du Portugal, jusqu'à un revirement de tendance constaté dans la foulée de l'intervention de M. Moscovici.

Le "spread" - le très surveillé écart entre les taux d'emprunt italien et allemand à dix ans - s'est largement accru ces derniers jours. Il a atteint vendredi jusqu'à 336,23 points, un plus haut depuis fin mars 2013.

Bruxelles a entamé jeudi un bras de fer avec la coalition populiste au pouvoir en Italie en réclamant officiellement des "clarifications" à Rome sur son dérapage budgétaire "sans précédent".

Le projet de budget de l'Italie pour 2019 prévoit un déficit à 2,4% du Produit intérieur brut (PIB), très éloigné des 0,8% promis par le précédent gouvernement de centre gauche.

Le dérapage italien est "sans précédent dans l'histoire du Pacte de stabilité et de croissance", écrit la Commission dans un courrier où elle demande à l'Italie de lui présenter ses observations avant "le lundi 22 octobre à midi".

A quelque 131% de son PIB, l'Italie affiche le ratio d'endettement le plus élevé de la zone euro après la Grèce.

"On s'attend à ce que le budget italien pour 2019 soit rejeté par l'Union européenne la semaine prochaine", a expliqué auprès de l'AFP Antoine Lesné, responsable stratégie et recherche chez SPDR ETF (filiale de State Street Global Advisors).

Les acteurs du marché seront aussi très attentifs à la note qu'accordera jeudi l'agence financière Standard and Poor's Global Ratings à la dette souveraine à long terme de l'Italie.

Selon M. Lesné, "les investisseurs ont déjà pas mal allégé leur position sur la dette italienne". "Aussi il y a peu de liquidités sur ce marché, créant davantage de volatilité et exacerbant de ce fait les mouvements observés".

A 18H00 (16H00 GMT), le taux d'emprunt à 10 ans de l'Allemagne est monté à 0,460% contre 0,416% jeudi à la clôture du marché secondaire. Le rendement de même maturité de la France s'est tendu à 0,840% contre 0,797% la veille.

Le rendement à 10 ans de l'Italie s'est pour sa part détendu à 3,483% contre 3,686% jeudi.

Le taux d'emprunt de même maturité de l'Espagne a terminé à 1,735% contre 1,728% la veille.

En dehors de la zone euro, le taux d'emprunt britannique à dix ans a progressé à 1,576% contre 1,538%.

A la clôture des marchés européens, le taux d'emprunt à 10 ans des États-Unis s'est également tendu à 3,205% contre 3,1786% jeudi, tout comme celui à 30 ans, à 3,3819% contre 3,3634% et celui à deux ans à 2,9038% contre 2,8741%.

afp/rp