Londres souhaite discuter le plus rapidement possible de ses relations avec l'Europe après le Brexit pour rassurer à la fois ses entreprises, ses ressortissants et les investisseurs. Mais Bruxelles insiste pour qu'il y ait d'abord un accord sur les conditions du divorce, notamment financières.

"Nous devons passer à la négociation des questions les plus importantes autour de notre futur partenariat pour être sûr de parvenir à un accord qui renforce le Royaume-Uni et l'UR", dit le ministre du Brexit, David Davis, dans un communiqué.

Londres passe à l'offensive alors que deux poids lourds du gouvernement de Theresa May, le ministre du Commerce pro-Brexit Liam Fox et le ministre des Finances pro-européen Philip Hammond, ont publié dimanche une tribune commune plaidant pour une période de transition limitée dans le temps, signe d'un rapprochement entre les deux camps.

Les services de David Davis se disent prêts à rendre public leurs projets, y compris sur les futures relations douanières avec l'UE et sur la question délicate de la frontière entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande.

"Nous avons été très clairs sur le fait que les questions soulevées par notre départ (de l'UE) et notre futur partenariat sont inextricablement liées", dit-on de source au ministère du Brexit.

"Ces documents montrent que nous sommes prêts à élargir les négociations", ajoute-t-on.

L'IMPRÉPARATION DE LONDRES CRITIQUÉE

Les discussions se sont pour le moment concentrées sur la facture dont Londres devra s'acquitter pour quitter le bloc, sur les droits des ressortissants britanniques et européens et sur la frontière irlandaise. La prochaine session de négociations est programmée à la fin du mois.

La nouvelle initiative britannique semble destinée à répondre aux critiques de Bruxelles sur l'impréparation dont ferait preuve le gouvernement de Theresa May, auquel des responsables européens ont reproché le mois dernier non pas d'avoir des demandes inacceptables, mais de ne pas avoir de position du tout sur de nombreux dossiers.

Les négociateurs européens ont prévenu que le calendrier prévoyant une sortie du Royaume-Uni de l'UE en mars 2019 était déjà menacé.

Dans leur tribune publiée dans le Sunday Times, Liam Fox et Philip Hammond assurent au contraire que le calendrier sera bien respecté et que leurs pays quittera non seulement l'UE, mais aussi l'union douanière et le marché unique à la date prévue.

Les deux ministres soulignent qu'une période de transition sera nécessaire pour amortir les conséquences du Brexit mais ils préviennent qu'ils ne peut s'agir à leurs yeux d'une "porte dérobée" pour empêcher la sortie de l'UE.

"Nous pensons qu'une période transitoire limitée dans le temps sera importante pour protéger nos intérêts nationaux et fournir davantage de clarté aux entreprises - mais elle ne peut pas être illimitée; cela ne doit pas être une porte dérobée pour rester dans l'UE", écrivent Philip Hammond et Liam Fox.

Cette mise au point intervient alors que Philip Hammond a irrité les partisans du Brexit en évoquant la perspective d'un accord de sortie très progressif qui aurait maintenu le statu quo européen sur des questions critiques, comme l'immigration, bien après mars 2019 et jusqu'en 2022.

"ZONE SCHENGEN" ENTRE GB ET IRLANDE?

Les deux ministres proposent que le Royaume-Uni ait pendant la période de transition le statut de "pays tiers" et ne fasse plus partie des traités européens, tout en souhaitant que les frontières continuent à fonctionner normalement et que les entreprises puissent embaucher des employés européens.

"Pendant cette période, nos frontières doivent continuer à fonctionner avec fluidité; les biens achetés sur internet doivent continuer à traverser les frontières; les sociétés doivent rester en mesure d'approvisionner leurs clients dans toute l'UE, et nos groupes innovants et leaders mondiaux doivent être capables d'embaucher les talents dont ils ont besoin, y compris au sein de l'Union européenne", disent-ils.

Selon le Sunday Telegraph, Londres souhaite l'établissement d'une sorte de "zone Schengen" entre le Royaume-Uni et l'Irlande de sorte à ne pas altérer la liberté de mouvement des personnes et à pouvoir mettre en place un "système douanier allégé".

Le journal, qui cite une source anonyme au ministère du Brexit, ajoute que les ressortissants britanniques pourraient travailler librement en Irlande et réciproquement. Les autres citoyens européens pourraient entrer librement au Royaume-Uni par la frontière irlandaise mais pas y travailler.

Le ministère du Brexit contacté par Reuters n'a pas souhaité commenter cette information.

D'autres documents de travail portent sur la "continuité de l'accès aux biens au Royaume-Uni et dans l'UE" ainsi que sur la "confidentialité et l'accès aux documents officiels", dit le ministère.

Londres a également promis de fournir des documents sur le "futur partenariat" avant le prochain Conseil européen prévu en octobre. Le premier devrait porter sur les futures relations douanières.

(Tangi Salaün pour le service français)

par William James et Alistair Smout