C’est la première fois depuis une tripotée de mois que les chiffres de l’inflation réservent une bonne surprise aux Etats-Unis. La réaction des marchés actions est d’ailleurs éloquente, puisqu’ils ont pris la pente ascendante hier. Le Nasdaq 100 s’est offert une envolée de 2,85%, qui lui permet d’afficher 20% de hausse par rapport à ses plus bas de l’année remontant à juin. Il a pris le S&P500 en remorque (+2,1%), en laissant le Dow Jones à la traîne (+1,63%). Le plus vieil indice boursier américain compte moins de valeurs à fort effet de levier, ceci expliquant cela. Wall Street a carburé bien plus fort que l’Europe, où les gains ont rarement dépassé 1% en clôture, même si les investisseurs étaient déjà en possession de la bonne nouvelle.

J’écrivais hier que le verdict de l’inflation américaine de juillet donnerait probablement lieu à une réaction binaire et cela s’est vérifié. J’aurais même pu dire "primaire", tant les marchés ont rugi de plaisir en constatant que les prix ont stagné entre juin et juillet, alors qu'une légère hausse était attendue. Sur un an, ils restent en totale surchauffe (+8,5%), mais cette surchauffe a l'air de s'atténuer puisque la hausse atteignait 9,1% en juin. Je vais rappeler un peu plus loin pourquoi les financiers se réjouissent, mais avant cela il est important de comprendre ce qui a permis de refroidir (un peu) les prix.

Dans le détail, l'inflation générale américaine a ralenti parce que le prix de l'essence a fortement baissé. Celui du transport aérien aussi, pour des raisons analogues tenant aux prix de l'énergie. La fièvre sur le prix des voitures d'occasion s'est aussi calmée. Les loyers ont continué à progresser mais moins que prévu, ce qui a aussi contribué à l'effet de surprise. En revanche, la hausse des prix alimentaires ne faiblit pas (+1,1% sur le mois de juillet, +10,9% sur un an). L'inflation de base, qui exclut aliments et énergie, a limité sa hausse à 0,3%, un peu moins que prévu, mais reste élevée sur un an (+5,9%). En me relisant, je constate que j'ai écrit "prix" dix fois dans cette chronique (oui, jusque dans le titre maman, mais j'ai fait exprès). Je m'en excuse par avance auprès des puristes.

Le marché estime que le pic d'inflation est passé, ce qui redonne un peu de mou à la politique monétaire de la banque centrale américaine. Dans un premier temps, la Fed ne devrait pas infléchir son discours de fermeté, car elle combat aussi l'inflation avec ses mots. Mais les investisseurs savent anticiper. Ils pensent désormais que Jerome Powell et son équipe se contenteront d'une hausse de taux de 50 points en septembre, alors qu'ils redoutaient encore 75 points avant la publication de la statistique hier à 14h30. Ce n'est pas que l'investisseur soit versatile, c'est plutôt qu'il sait interpréter les signes, surtout quand ils vont dans son sens : celui d'un retour de conditions financières qui lui sont plus favorables. Voilà pour le sentiment immédiat. Un peu plus tard, le marché va se poser la question du rythme de réduction de l'inflation et se torturer les méninges sur l'inflation de base, qui devrait reculer moins vite que l'inflation générale. Mais je ne jouerai pas le rôle du rabat-joie ce matin, pour éviter de me faire injurier.

Changement total de sujet avec un point sur le Rhin. Une lectrice m'a demandé hier à quel point l'économie allemande serait affectée par une interruption de la navigation sur le grand fleuve, qui fait la une de nombreux médias. Etant aussi sec sur le sujet que mon potager l'est en ce moment, j'aurais été bien en peine de répondre sans une petite étude reçue ce matin à 6h45 du bureau d'études Liberum, opportunément titrée "Et si le Rhin était fermé au transport de marchandises ?". Voilà qui tombe à pic.

Les économistes Susana Cruz et Joachim Klement y expliquent que le Rhin est important pour deux raisons pour le commerce allemand : d'abord parce que la plupart des centres industriels sont situés à proximité du fleuve, parce qu'il donne accès au mode de transport intérieur le moins cher. Ensuite parce qu'il permet d'accéder à l'eau de refroidissement nécessaire à certains processus industriels. Quand le niveau d'eau baisse, les capacités de transport sont réduites en tonnage. Le niveau d'eau pris à Kaub est actuellement de 53 cm, ce qui est très faible. Mais pas aussi bas qu'en 2018, lorsqu'il était descendu à 30 cm et que cela avait considérablement perturbé l'économie allemande. Toutefois, les deux économistes expliquent que c'est surtout la durée des épisodes qui est importante, parce que les phases courtes ont tendance à être compensées facilement quand la situation redevient favorable. En l'occurrence le débit du fleuve est faible depuis 10 semaines maintenant. Leur modèle suggère que la production industrielle allemande pourrait avoir été amputée de 1 point de pourcentage en juillet et pourrait encore subir une choc de 0,4 point de pourcentage en août.

En Asie Pacifique, les marchés prennent le sillage de la bourse américaine ce matin. Les places chinoises et coréenne gagnent plus de 1%, tandis que l'Inde et l'Australie s'adjugent environ 0,9% à l'heure où j'écris ces lignes. La bourse de Tokyo est close pour un jour férié dédié à la montagne. Les indicateurs avancés européens sont positionnés pour une poursuite de la hausse, alors que plusieurs entreprises de taille respectable ont encore publié leurs résultats ce matin. Après la clôture de Wall Street, Walt Disney a brillé en publiant des résultats supérieurs aux attentes et en dépassant Netflix en matière d'abonnés. Sur l'agenda du jour, il faut aussi noter une nouvelle publication sur les prix, en l'occurrence les prix à la production américains à 14h30. 

Le CAC40 a démarré la séance en hausse de 0,55% à 6559 points.

Les temps forts économiques du jour

Deux statistiques aux Etats-Unis aujourd'hui à 14h30 : les prix à la production et les inscriptions hebdomadaires au chômage. Tout l'agenda macro ici.

L'euro est remonté à 1,0288 USD. L'once d'or se négocie 1786 USD. Le pétrole reperd un peu de terrain, avec un Brent de Mer du Nord à 97,20 USD le baril et un brut léger américain WTI à 91,77 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans s'établit à 2,78%. Le bitcoin est repassé au-dessus de 24 000 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Adecco : Citigroup reste à surperformance avec un objectif de réduit de 52 à 48 CHF.
  • Adyen : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif relevé de 2600 à 2650 EUR.
  • Ahold Delhaize : Goldman Sachs reste neutre avec un objectif relevé de 27,50 à 30 EUR.
  • Bachem: Credit Suisse reste à surperformance avec un objectif de cours réduit de 128 à 99 CHF.
  • Continental : Crédit Suisse reste à sousperformance avec un objectif réduit de 67 à 66 EUR.
  • Covestro : Oddo BHF passe de surperformance à neutre en visant 39 EUR.
  • Galenica: Baader Helvea passe d’accumuler à alléger en visant 76,9 CHF.
  • Komax : Baader Helvea passe d'alléger à accumuler en visant 300 CHF.
  • Mobimo: Research Partners reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 285 à 275 CHF.
  • Prudential: Jefferies reste à l’achat avec un objectif de cours relevé de 1600 à 1625 GBp.
  • QinetiQ : Stifel passe d'acheter à conserver en visant 392 GBp.
  • Scout24: J.P. Morgan reste à surpondérer avec un objectif de cours réduit de 73 à 70 EUR.
  • SNP Schneider-Neureither : Berenberg reste à l'achat avec un objectif réduit de 42 à 32 EUR.

En France

Résultat des sociétés :

  • Valneva réduit sa prévision de revenus pour 2022. Le premier semestre se solde par des pertes accrues.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • La division énergies de Vinci acquiert l'essentiel des activités des services IT de Kontron.
  • GPA (Casino) confirme un projet de scission de ses activités colombiennes Exito.
  • Bic va racheter la totalité du capital d'Advanced Magnetic Interaction.
  • Voltalia lance des projets sociaux au Brésil en parallèle de son développement dans les ENR.
  • Amoéba annonce que l'US EPA est "en voie d'approuver" son biocide pour un usage dans les systèmes de refroidissement fermés.

Dans le monde

Résultats des sociétés

  • Aegon : L'assureur a revu à la hausse ses prévisions de génération de capital d'exploitation et de flux de trésorerie disponible pour l'ensemble de l'année entre 2021 et 2023.
  • Daimler Truck : Le groupe a dégagé un bénéfice ajusté de 1 Md€ au T2, dépassant de loin les attentes des analystes grâce à une forte demande et à des effets de change positifs.
  • Deutsche Telekom : L'opérateur de télécommunications allemand a relevé ses prévisions de résultats.
  • K+S : Le groupe maintient ses perspectives annuelles en raison de la flambée des prix de la potasse.
  • KBC Group : Le bénéfice net atteint 811 M€ au T2, contre 793 M€ un an avant. Les prévisions sont relevées.
  • Metro AG : Le groupe allemand a publié un chiffre d'affaires trimestriel en hausse à 7,9 Mds€, assorti d'une perte de 290 M€. Le titre était en hausse en préouverture.
  • NN Group : L'assureur néerlandais a annoncé jeudi que son bénéfice de base au premier semestre 2022 a baissé de 12,1%l en raison de l'impact des événements météorologiques et de la vente de sa branche de gestion d'actifs.
  • Salzgitter : Le sidérurgiste allemand a confirmé ses perspectives financières 2022 même si son bénéfice semestriel a déjà atteint le bas de la fourchette de prévision pour l'ensemble de l'exercice.
  • Siemens AG : Le groupe est en pertes à cause d'une lourde dépréciation sur Siemens Energy. Les revenus sont un peu supérieurs aux attentes mais les objectifs sont réduits à cause de la dépréciation.
  • ThyssenKrupp : L'Ascensoriste a quasiment triplé son bénéfice d'exploitation sur le dernier trimestre écoulé.
  • Walt Disney: Le titre gagne hors séance après la publication des résultats trimestriels. Le groupe a dépassé Netflix en nombre d’abonnés et prévoit de relever ses prix.
  • Zurich Insurance : Le groupe a annoncé un programme de rachat d'actions de 1,8 MdCHF en marge de la publication de ses trimestriels.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Le premier actionnaire du Crédit Suisse, Harris Associates, a doublé ses parts à plus de 10% du capital.
  • L'australien CSL finalise l'achat de Vifor Pharma.
  • Partners Group cède 50% d’USIC à Kohlberg dans le cadre d'une transaction de 4 Mds$.
  • ABB rachète à Siemens ses activités dans le domaine des moteurs Nema à basse tension.
  • The Boeing Company a livré son premier 787 Dreamliner depuis plus d'un an.
  • Roche obtient une extension d'homologation pour le Ventana aux USA.
  • Bavarian Nordic a exprimé ses réserves quant au projet du gouvernement américain de diviser les doses de son vaccin contre la variole du singe en raison d'un approvisionnement insuffisant.
  • Nel obtient une commande de 8 M$ pour fournir des unités de ravitaillement pour véhicules électriques.
  • Principales publications du jour : Deutsche Telekom, Siemens AG, Zurich Insurance, Hapag-Lloyd, Orsted, RWE, KBC, NovozymesTout l'agenda ici.

Lectures