Rappelons que, sous le plan de Trump, le taux d’imposition pour les entreprises américaines passerait de 35% à 15%, un véritable Big Bang pour les bénéfices outre-Atlantique.

Seulement voilà. D’abord, nous avons appris à la fin d’été que le taux à 15% était trop agressif pour certains représentants au Congrès, vigilants au déficit budgétaire, qui  désapprouvent tout projet de loi qui augmenterait la dette nationale.  Par conséquent, les Républicains se sont mis d’accord sur un taux d’imposition à 20% pour les entreprises et Trump a tweeté par la suite que 20% serait « le chiffre parfait ».  Que ce soit 15% ou 20%, les marchés se sont montrés impassibles devant le changement. Bon, accord.

Ensuite, tout au long de l’année Trump a accumulé des échecs législatifs, couronnés par le rejet au Senat  de son fameux plan de santé censé remplacer ObamaCare. En effet, Trump n’a encore réussi à faire passer au Congrès aucune partie de son agenda. Pourtant, curieusement les marchés continuent à croire que le projet de réforme fiscale serait la première exception dans la liste des déboires législatifs de Trump. Nous sommes interpellés par le stoïcisme des participants sur les marchés financiers, qui semblent trop minimiser le risque de déception du plan fiscal.

Lundi, nous avons appris que les auteurs du projet de loi à la Chambre des représentants pourraient proposer une introduction graduelle du nouveau taux espacée sur cinq ans. Selon cet échéancier, le taux de 20% ne sera pas atteint avant 2022. Autrement dit, l’économie devrait attendre cinq ans avant que le taux de 20% (déjà révisé à la baisse) voit le jour. La proposition d’instaurer progressivement le nouveau taux réduirait à partir de 2018 le taux actuel à 35% de trois points de pourcentage. Si cette version passe le Congres, les retombées positives du plan économique de Trump seraient reportées d’ici plusieurs années. En outre, quel analyste n’a pas fait ses prévisions pour les bénéfices 2018 à base d’un taux d’imposition à 20% ?

Ceci est une information majeure pour les marchés. Néanmoins, les marchés actions n’ont à peine réagi à cette nouvelle lundi. Sans cet argent qui « tombe du ciel » pour les entreprises américaines, pourquoi les cours se maintiendraient à ces niveaux ? Si les marchés ne réagissent pas à la probabilité d’une version édulcorée du plan fiscal, nous devons conclure que le rallye sur les actions a perdu tout contact avec la réalité. Le fait de spéculer sur l’espoir d’une augmentation des bénéfices alors que l’environnement économique pourrait devenir moins attractif revient à miser uniquement sur la dynamique haussière des cours sans vrai fondement.  Investir dans les indices est plus que jamais un jeu de spéculation.