J'ai bien l'impression que les journées de mercredi et de jeudi ont mis un sacré coup au moral des investisseurs. C'est visible dans la couleur des indices évidemment, mais aussi à travers mon indicateur maison breveté, le "syndrome de la boîte mail creuse". La plupart du temps, je reçois chaque jour un nombre excessif de messages qui sont filtrés et classés via des règles complexes dans des petits onglets qui répondent aux doux noms de "Analyse", "Sociétés de Gestion", "Communiqués des Sociétés Cotées", "Recrutement" ou "Alertes Bloomberg" par exemple. J'ai aussi "Communiqués Nazes" et "Sociétés de Bandits", mais je tairai le contenu de ces deux onglets pour ménager les susceptibilités. Globalement, entre 100 et 300 emails transitent quotidiennement dans ces tuyaux. Tout ça pour dire qu'il se produit quelques fois dans l'année le "syndrome de la boîte mail creuse", toujours après une séance boursière pénible. Comme celle d'hier. Lors de ces épisodes, les analystes préfèrent laisser passer l'orage pour éviter de dire des âneries, les entreprises évitent de publier des informations sauf si elles n'ont pas le choix et les gérants pratiquent une opportune politique de l'autruche. Ainsi quand j'ai aussi peu de messages que ce matin, je sais que la séance de la veille s'est mal passée.

A quel point ? Et bien disons que le marché a l'air de considérer depuis hier qu'une mauvaise nouvelle est une mauvaise nouvelle. Ces derniers mois, il avait plutôt tendance à s'en remettre au mantra "mauvaise nouvelle ? bonne nouvelle !", qui lui permettait de se raccrocher à l'espoir que les banques centrales allaient redevenir pro-croissance à force de voir s'accumuler les chiffres macroéconomiques dégradés en parallèle d'une réduction de la pression inflationniste. Mais l'économie étant une science désespérément inexacte, les choses ne se déroulent pas comme prévu. Il y a eu un fort décalage entre les attentes du marché et la teneur des nombreuses décisions de politique monétaire de la semaine. Pas vraiment sur les chiffres, puisque toutes les banques centrales ont relevé leurs taux d'un demi-point, comme cela était prévu. Mais plutôt sur les discours. Les investisseurs espéraient une fermeté teintée d'optimisme, ils ont eu droit à une fermeté mâtinée de prudence. Jerome Powell pour la Fed mercredi et Christine Lagarde pour la BCE jeudi ont fait comprendre qu'avant de se préoccuper du moment où les taux baisseront, il va falloir passer par la phase d'un ralentissement économique.

Cette narration à contrecourant de l'histoire dont les marchés s'étaient persuadés dernièrement a lourdement pesé sur les indices actions. Moins sur le marché obligataire, qui s'appuie sur le scénario de la récession depuis un moment déjà. Mon collègue Yves, qui préfère la compagnie des taux à celles des actions, me dit régulièrement que les analystes obligataires sont plus sophistiqués. Hier, la séance s'est terminée en baisse de plus de 3% sur le Nasdaq, le DAX et le CAC40 par exemple. L'indice français a été de surcroît trahi par ses vedettes du luxe, après des chiffres de consommation déprimants en Chine. Des chiffres qui pourraient rester en berne avec la montée des cas de coronavirus dans le pays et donc peser sur les dépenses de fin d'année. Au-delà des fortes baisses indicielles précitées, toutes les places ont accusé le coup en Europe hier. Les seuls îlots de résistance, Londres et Bruxelles, ont toutefois cédé autour de 1% à la clôture.

Dans le reste de l'actualité, l’Union européenne a adopté l’impôt minimum de 15% sur les multinationales après avoir surmonté les dernières réticences. L'ex-patron de la plateforme de cryptomonnaies FTX, Sam Bankman-Fried, a présenté une nouvelle demande de libération sous caution à la Cour suprême des Bahamas après avoir été retoqué une première fois. M'est avis que l'intéressé va avoir du mal à se soustraire aux griffes de la justice américaine. Elon Musk, pour sa part, a décidé de modérer directement Twitter sur les informations le concernant, pour des raisons que je vous laisse juger à partir de l'abondante couverture médiatique concernant l'affaire. Pourquoi pas après tout, puisque le joujou lui appartient. C'est sûrement un nouveau concept de liberté d'expression à plusieurs vitesses.

Ce matin, les marchés asiatiques souffrent dans le sillage de Wall Street, mais sans excès, même si le Nikkei 225 perd 1,9% à Tokyo. Les replis sont contenus en-deçà de 0,5% à Séoul et à Bombay, pendant que Sydney recule de 0,8%. La Chine est une fois de plus à contrecourant, avec un indice CSI300 (Shanghai et Shenzhen) en légère hausse et un Hang Seng (Hong Kong) qui grappille 0,4%. Les indicateurs avancés sont légèrement haussiers en Europe et neutres aux Etats-Unis à l'heure où j'écris. Je finis en rappelant que nous sommes le troisième vendredi du mois et que c'est synonyme de séance de compensation pour les produits dérivés. La compensation de décembre est aussi celle du 4e trimestre. C'est donc un peu la fin de l'année boursière, en tout cas sur un certain nombre de produits. Vu la tête des indices hier, il pourrait y avoir pas mal de volatilité. D'ailleurs, le CAC40 n'a pas respecté sa préouverture : il perd 0,2% à 6511 points dans les premiers échanges.

Les temps forts économiques du jour

Les indicateurs PMI flash du mois de décembre pour les principales économies seront annoncées tout au long de la journée, notamment à 10h00 pour la zone euro et à 15h45 pour les Etats-Unis. Tout l'agenda macro ici.

L'euro est stable à 1,0646 USD. L'once d'or redescend à 1778 USD. Le pétrole recule à nouveau après son sursaut, avec un Brent de Mer du Nord à 80,96 USD le baril et un brut léger américain WTI à 75,83 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans se maintient autour de 3,48%. Le bitcoin s'échange toujours autour de 17 600 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Adva Optical Networking : Kepler Cheuvreux reprend le suivi à conserver en visant 18,50 EUR.
  • Air France-KLM : Société Générale passe de vendre à conserver en visant 1,38 EUR.
  • Bachem : Credit Suisse reste à surperformance avec un objectif de cours relevé de 92 à 100 CHF.
  • Bertrandt : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 50 à 45 EUR.
  • Bunzl : Barclays passe de pondération ligne à souspondérer en visant 2750 GBp.
  • BioMérieux : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 89,70 à 92,50 EUR.
  • Ceconomy : Oddo BHF passe de neutre à sousperformance en visant 1,60 EUR.
  • Coface : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 15,10 à 16,80 EUR.
  • Enagas : J.P. Morgan passe de neutre à souspondérer en visant 16 EUR.
  • ENI : AlphaValue reste à accumuler avec un objectif de cours relevé de 16,10 à 18,20 EUR.
  • Focus : Portzamparc reste à renforcer avec un objectif de cours réduit de 54,70 à 54,50 EUR.
  • National Express : Liberum passe d'acheter à conserver en visant 155 GBp.
  • Novozymes : Deutsche Bank passe d'acheter à conserver.
  • Oxford Biomedica : Stifel passe de conserver à acheter en visant 525 GBp.
  • Plastivaloire : TP ICAP Midcap reste à conserver avec un objectif réduit de 4,10 à 3,60 EUR.
  • Porsche AG : LBBW démarre le suivi à conserver en visant 98 EUR.
  • Prudential Plc : CMB International démarre le suivi à l'achat.
  • Red Electrica : J.P. Morgan passe de neutre à souspondérer en visant 16,50 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Airbus et Dassault Aviation signent la première tranche de 3 Mds€ du contrat SCAF, le système d'avion de combat du futur.
  • Renault propose le renouvellement du mandat de Jean-Dominique Senard à la présidence.
  • ALD lève 1,2 Md€ dans le cadre du rachat de LeasePlan.
  • Euronext finalise la vente de MTS Markets International.
  • Laurent Mignon succède à André François-Poncet au conseil d'administration de Bureau Veritas.
  • Nexity fait évoluer sa gouvernance.
  • Voltalia fournit pour la première fois de l'électricité à la City of London Corporation grâce à la mise en service de sa centrale solaire de South Farm au Royaume-Uni.
  • CGG vend sa bibliothèque de données multiclients sismique terrestre à Bon Ton Seismic pour 63 M$.
  • Navya affirme que le communiqué sur le financement de 30 M€ annoncé le 12 décembre a été publié par erreur et indique que l'opération n'a pas eu lieu.
  • Hydrogen Refueling Solutions, Snam4Mobility et CuboGas etHRS s’associent pour développer des solutions efficientes de mobilité hydrogène.
  • Nouveau directeur général chez Pherecydes Pharma.
  • Aures veut passer sur Euronext Growth.
  • Cibox émet 2 M€ de BORA en faveur d'IRIS, entraînant potentiellement environ 18% de dilution.
  • Europlasma a regroupé 10 000 actions anciennes (FR0013514114) en 1 nouvelle (FR001400CF13).
  • Cybergun monte un nouveau bidule.
  • Innelec a publié ses comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Washington ajoute 36 entreprises chinoises à sa liste noire des semiconducteurs.
  • Les procureurs français perquisitionnent le site de General Electric à Belfort dans le cadre d'une enquête sur la fraude fiscale.
  • Aker BP et ses partenaires vont investir 20,5 Mds$ dans de nouveaux projets pétroliers et gaziers.
  • Apollo Global Management et EQT vendraient Direct ChassisLink pour 3,6 Mds$, selon Reuters.
  • OC Oerlikon se renforce dans le luxe en rachetant Riri.
  • Bachem décroche un contrat d'au moins 1 MdCHF sur cinq ans.
  • Stora Enso envisage de céder une usine en Chine.
  • Honeywell obtient la validation de la justice pour un accord de règlement de 1,33 Md$ avec le Trust de l'amiante.
  • Montana Aerospace récupère de 43% du programme de rémunération de l'ex-maison-mère.
  • Ford augmente le prix de la variante la moins chère du pickup électrique F-150 à près de 56 000 USD.
  • Fraport candidate pour la concession de l'aéroport grec de Kalamata.
  • Principales publications du jour : Accenture, DTE EnergyTout l'agenda ici.

Lectures