Un hack est “le fait de manipuler un système, dans la langue de Shakespeare 'hack” signifie “pirater”. Dans le cas d’Ethereum nous parlons aussi bien du hack, en tant que manipulation que de la scission de la blockchain. Faisons un bond dans le temps. 

Une brève histoire d’Ethereum

Que faisiez-vous en 2014 ? Si vous étiez en pèlerinage non loin de Zoug en Suisse à cette époque, vous êtes sans doute passés non loin d’un abri où les developpeurs d’Ethereum ont planché pour établir les fondements de la plateforme que nous connaissons aujourd’hui sous l'œil bienveillant des autorités suisses. D’ailleurs, à l’heure actuelle, la Suisse est favorable et accueille les bras ouverts les initiatives crypto-blockchains. La canton de Zoug veut devenir le berceau mondial du développement des projets crypto et le surnom de “Crypto Valley” a déjà été donné à cette zone géographique. Vitalik Buterin et ses équipes y sont sûrement pour quelque chose. Alors que le développement de la plateforme progressait rapidement au gré des arrivées et des départs des développeurs au sein d’Ethereum, le 17 juin 2016 a signé le tournant sans précédent pour la plateforme.

Une faille sur une DAO 

En 2016, une organisation anonyme décentralisée (DAO) a été formée sur Ethereum. Pour faire simple un DAO est similaire à un conseil d’administration d’une entreprise, mais cette fois-ci, le conseil d’administration est décentralisé et il est nécessaire de détenir une certaine quantité d’ether, la monnaie numérique d’Ethereum, pour obtenir un droit de vote. Une sorte d’approche techno-démocratique basée sur le code informatique de la blockchain sous-jacente permettant d’évincer la nécessité de passer par des structures centralisées pour des investisseurs-parties prenantes d’un projet. A cette époque, via une DAO, une vente de jetons, qui devait durer 28 jours, avait été lancée pour lever des fonds auprès d’investisseurs. En l’espace de trois semaines plus de 150 millions de dollars ont été levés auprès de plus de 10 000 investisseurs de la première heure. Mais des inquiétudes ont été émises par des développeurs quant à la vulnérabilité de la DAO face à un potentiel piratage d’un smart contract détenant les fonds des investisseurs. 

Le hack de la DAO 

Alors que les programmeurs tentaient de résoudre un problème technique majeur, un hacker a exploité la vulnérabilité et a siphonné les fonds du smart contract de la DAO. Cet événement a non seulement signifié une perte financière significative pour les investisseurs mais il a aussi remis en cause la fiabilité d’Ethereum. Il faut dire qu’à cette époque, la DAO piratée rassemblait plus de 10% de tous les ethers en circulation. Pour assurer la survie de la plateforme, des réponses exceptionnelles ont dû être apportées.

Le Soft Fork a échoué

Une première solution a été apportée par Vitalik Buterin : un soft fork (une modification rétrocompatible des règles de consensus sur la blockchain, qui peut être par exemple l’instauration de nouvelles règles entre les opérateurs) a été proposé pour mettre le hacker sur liste noire et l'empêcher de déplacer les fonds dérobés. Il s’est avéré que ce soft fork présentait lui aussi des failles le rendant vulnérable, une nouvelle fois, face à des hackers aux intentions perfides. Après que de multiples tentatives échouent pour récupérer les fonds et protéger le réseau, l’ultime solution a été posée sur la table : le hard fork d’Ethereum

Le Hard Fork d’Ethereum

Alors que les fondements moraux, conceptuels, techniques et philosophiques de la blockchain de Buterin sont remis en cause, un hard fork (modification non rétrocompatible des règles de consensus pouvant aboutir à une scission en deux d’une blockchain) a été exécuté après de nombreux débats. Cet événement a permis de ramener l’historique du réseau avant le hack de la DAO et a ainsi permis de restituer les fonds aux investisseurs via un nouveau smart contract. Dans la foulée, les problèmes techniques liés au smart contract défaillant ont été résolus. Mais l’aspect immuable et incensurable des blockchains est alors remis en cause. Il est désormais envisageable de revenir dans le passé si la majorité des développeurs et des parties prenantes le souhaitent. Pour que cet événement se produise, les développeurs n’ont pas le pouvoir unilatéral d’appliquer de telles modifications. Il est nécessaire que l’ensemble des mineurs et des opérateurs de nœuds (ordinateurs connectés à la blockchain) mettent à jour leur logiciel afin d’effectuer le rétropédalage. 

Ethereum se divise en deux

La majorité des parties prenantes sur Ethereum sont favorables au hard fork, et après des débats houleux et malgré que tout le monde ne soit pas d’accord sur ce changement, le 20 juillet 2016, au bloc 192 000, le hard fork s'exécute et Ethereum se divise en deux.

Hard Fork Blockchain
Source : blocknet.co

Ethereum (ETH) devient la “nouvelle chaîne" et de son côté la blockchain historique prend le nom d’Ethereum Classic (ETC). Ceux qui ont refusé d’accepter le
hard fork initié par Vitalik Buterin ont soutenu la chaîne originelle. Pour eux, quoi qu’il arrive, la blockchain doit rester immuable et incensurable et Buterin n’a pas respecté ces principes fondamentaux. 

Si les jetons ont été restitués sur la nouvelle blockchain (ETH) aux investisseurs, le hacker détenait toujours les jetons sur la chaîne originelle Ethereum Classic (ETC). Il est évident que ce hack via la DAO a fait beaucoup de bruit à l’époque malgré une communauté beaucoup plus petite qu’aujourd’hui et je n’ose imaginer les conséquences qu’aurait un tel événement à l’heure actuelle après une adoption bien plus massive. Si nous prenons du recul, Vitalik Buterin et ses équipes ont très certainement pris la bonne décision pour assurer la survie de la blockchain et l’amener à ce qu’elle est aujourd’hui : la plateforme de référence pour la construction de Dapps (applications décentralisées) basées sur des smart contracts. De son côté ETC n’a pas eu le même succès.

ETH vs ETC 

Ethereum Classic (ETC) se positionne 34ème du marché en termes de capitalisation en pesant plus de 3,5 milliards de dollars tout de même. Le jeton ETC affiche une performance de plus de 460% depuis le premier janvier 2021. 

ETC/USD
Source : Zonebourse

Ethereum
de son côté se positionne seconde du marché, derrière le bitcoin, avec une capitalisation gravitant autour des 330 milliards de dollars. Le jeton ETH affiche une performance de plus de 260% depuis le premier janvier 2021. 

ETH/USD
Source : Zonebourse

Si ETC surperforme ETH depuis 1 an, ce n’est pas le cas depuis la scission de juillet 2016 :

Tableau comparatif des cryptos ETC et ETH

Même si nous sommes sur des variations stratosphériques pour les deux cryptomonnaies, ETH affiche une performance six fois plus élevée que ETC en l’espace de six ans. 

Aujourd’hui Vitalik Buterin dirige d’une main de fer Ethereum et la plateforme est considérée aujourd’hui par un grand nombre de professionnels et de particuliers comme une des plateformes blockchain les plus prometteuses de ces prochaines années. Mais désormais, nous gardons en tête que les événements que nous avons mentionnés dans cet article sont envisageables dans l’avenir à l’échelle d'une blockchain.