* Rentrée politique et législative dense

* L'exécutif attendu sur le budget 2019 par la droite

* Casse-tête autour de la réforme des institutions

PARIS, 19 août (Reuters) - Ebranlé en juillet par l'affaire Benalla qui a perturbé l'agenda parlementaire, l'exécutif va tenter de reprendre la main à la rentrée malgré un calendrier législatif chargé et une opposition déterminée à maintenir la pression sur Emmanuel Macron, qui s'est montré discret pendant l'été.

Après deux semaines de vacances, le gouvernement d'Edouard Philippe se retrouve mercredi pour un conseil des ministres qui sera suivi dans les prochaines semaines d'un séminaire qui doit permettre de fixer le cap et le tempo des prochains mois. Et de tourner la page de la première crise d'ampleur du quinquennat.

"L'enjeu de cette rentrée, c'est de solder définitivement l'affaire Benalla et de reprendre le travail de séduction de la droite modérée qui a été mise sur pause depuis cette affaire", estime Jérôme Fourquet, de l'Ifop.

Sur ce point, les intentions du gouvernement en matière d'économies dans le cadre des projets de budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale qui doivent être présentés fin septembre joueront un rôle crucial et seront scrutés de près, souligne le politologue.

"Si Emmanuel Macron ne donne pas de gages sur la réduction de déficits publics, ça risque d'être compliqué de convaincre pleinement cet électorat de droite modérée dont une partie était jusqu'à présent impressionnée et satisfaite des réformes économiques entreprises", ajoute-t-il. "C'est un sujet politiquement et économiquement très important qui va conditionner beaucoup de choses, il va falloir faire des choix et des arbitrages".

CASSE-TETE

Autre casse-tête pour l'exécutif, la question de l'avenir de la réforme constitutionnelle, promesse de campagne d'Emmanuel Macron, dont l'examen a été interrompu cet été en raison de l'affaire Benalla - du nom de l'ancien collaborateur du chef de l'Etat filmé en train de violenter des manifestants le 1er mai.

Une reprise dès la rentrée de l'examen de ce volet du texte, qui nécessite le vote d'une majorité des trois cinquièmes au Parlement réuni en Congrès ou un référendum, pourrait offrir une nouvelle tribune à une opposition déterminée à tirer avantage de l'affaire Benalla et des soupçons de conflit d'intérêt visant le numéro deux de l'Elysée, Alexis Kohler.

Laissant augurer de nouveaux débats animés, le chef de file des députés Les Républicains, Christian Jacob, n'a pas exclu de demander "une seconde commission d'enquête à la rentrée" sur le dossier Kohler - le secrétaire général de l'Elysée dénonce un "soupçon totalement infondé".

Face à ce dilemme, l'exécutif pourrait être tenté, comme l'a suggéré cet été le "patron" des députés LaRem Richard Ferrand, de se concentrer sur les deux autres volets de la réforme des institutions, qui comportent des promesses emblématiques de campagne d'Emmanuel Macron (dose de proportionnelle, réduction du nombre de parlementaires et non-cumul de mandats dans le temps), et de reporter sine die le volet constitutionnel.

"Pour Emmanuel Macron se pose la question du choix stratégique : est-ce qu'on renonce à avancer sur ce sujet qui est symboliquement important pour se concentrer sur d'autres dossiers plus prioritaires quitte à signer l'échec d'une réforme qui aurait dû symboliser le véritable passage au nouveau monde?", note Jérôme Fourquet. "Là, il va y avoir un calcul politique à faire".

Tout comme pour la date d'examen de la loi Pacte (Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises), maintes fois repoussée.

"Il est important de repartir à l'offensive avec cette loi", a dit à Reuters le député LaRem Stanislas Guérini à propos d'un texte jugé "très équilibré et qui va avoir des conséquences concrètes pour les Français en terme d'intéressement et de participation".

"C'est une loi pour les salariés", ajoute l'élu, qui table sur une arrivée à l'Assemblée "fin septembre, début octobre".

TROUVER DES POINTS D'APPUI

Parallèlement à la préparation des projets de loi budgétaires et à la présentation des autres chantiers (plan pauvreté, réforme des hôpitaux...), le gouvernement s'apprête à reprendre les concertations avec les partenaires sociaux, avec la volonté affichée de renouer le dialogue après une année de tensions.

"Il y a le constat qu'on ne peut plus dans la deuxième partie du quinquennat faire comme dans la première partie, a savoir une présidence jupitérienne qui fait fi de tous les corps intermédiaires et qui avance à marche forcée quitte à bousculer tout le monde", relève Jérôme Fourquet.

"L'exécutif fait le constat qu'il y a une impopularité qui est croissante et que face aux enjeux majeurs qui se profilent - le budget, la réforme des retraites - on ne peut pas y aller seul et qu'il faut s'assurer des alliés, des soutiens, de trouver des points d'appui parce que ces dossiers sont gigantesques et lourds de menace", ajoute le politologue.

Depuis la tempête politique de fin juillet-début août, Emmanuel Macron a fait le choix ces deux dernières semaines de la discrétion au fort de Brégançon (Var), se tenant à l'écart de l'actualité nationale. Les seules informations qui ont circulé ont concerné le volet international, avec des entretiens téléphoniques avec Donald Trump, Vladimir Poutine, Angela Merkel ou Recep Tayyip Erdogan, notamment.

Seule exception, la confirmation début août de la prise de fonctions prochaine à l'Elysée d'un "directeur général des services", conséquence directe des "dysfonctionnements" révélés par l'affaire Benalla de l'aveu même d'Emmanuel Macron. (Marine Pennetier, avec Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)