"Au-delà de votre processus de sélection ISR, avez-vous élaboré une politique de vote et de dialogue pour influencer les sociétés dans lesquelles vous investissez dans l’adoption des meilleures pratiques en matière de responsabilité sociale, de développement durable…
Absolument. La politique de vote et d’engagement* que nous avons défini a pour principale ambition d’instaurer un dialogue très nourri et continu avec les entreprises dans lesquelles nous investissons ou dans lesquelles nous souhaitons investir. Nous nous inscrivons ainsi clairement dans une démarche active d’accompagnement à long terme.

Cette politique est exercée dans le meilleur intérêt des actionnaires et/ou porteurs de nos OPC tout en respectant les différentes parties prenantes des sociétés émettrices.

Tous les secteurs d’activité sont concernés par cette politique y compris ceux qui peuvent faire débat d’un point de vue ISR, comme le secteur pétrolier que l’on retrouve dans notre stratégie actions Europe dédiée à l’engagement.

Lorsque nous sentons que les sociétés avec lesquelles nous échangeons ne sont pas réceptives, nous faisons le choix de ne pas maintenir notre intérêt.
Nous refusons d’entrer dans un jeu d’activisme actionnarial qui suppose une posture conflictuelle avec une société donnée car nous pensons que cela peut s’avérer improductif.

Sur quels sujets êtes-vous amenés à vous exprimer le plus souvent ?
Les sujets les plus fréquents concernent des enjeux de gouvernance liés à la succession, la rémunération, ou la nomination des membres indépendants au sein du conseil d’administration.
D’autres points plus spécifiques au développement durable peuvent être soulevés tels que la transparence sur les dépenses d’investissement en énergie ou sur la gestion des ressources humaines.

Sur quels sujets avez-vous constaté la plus nette évolution ?
Les résolutions qui concernent les rémunérations sont devenues très détaillées dès lors que le vote en assemblée générale sur ce thème a été rendu obligatoire.

Avez-vous relevé une recrudescence des résolutions liées à des enjeux ESG ?
Il n’y a pas encore eu réellement d’efforts sur des résolutions structurelles qui touchent à des problématiques environnementales ou sociales.

Avez-vous été à l’origine du dépôt de ce genre de résolutions ?
Non, pas jusqu’ici. Le dépôt d’une résolution est compliqué. Il faut être détenteur d’une certaine proportion du capital. Il peut supposer des pressions externes dans le cas d’un rattachement à un grand groupe bancaire.

Vous avez dans votre politique de vote des lignes directrices très précises…

Chaque gérant de DNCA vote pour les sociétés dans lesquelles il investit en fonction des grands principes définis. En principe, c’est le gérant qui détient la plus importante position sur la valeur qui vote pour la société.
Des discussions entre les différents gérants-analystes sont organisées chaque fois que nécessaire.

Si sur la base d’une analyse des éléments propres à une résolution spécifique donnée, un gérant estime qu’il est dans l’intérêt des porteurs ou actionnaires des fonds de DNCA de déroger, à titre exceptionnel, à un principe de la politique de vote, alors il lui sera possible de voter en ce sens.

Quel est le pourcentage des sociétés détenues sur lesquelles vous exercez un droit de vote ?
Les votes concernenet entre 300 et 400 entreprises et se concentrent sur trois mois dans l’année.
Le vote est obligatoire si le montant investi représente au moins 1% du capital de la société concernée ou 0,2% de la totalité des encours des OPC gérés.
Il y a un objectif de vote systématique pour l’ensemble des titres détenus en portefeuille par tout OPC géré bénéficiant du Label ISR (« OPC ISR »).
Nous interrogeons les entreprises en amont des assemblées générales pour préparer nos votes.
Le cas échéant, en l’absence de vote, nous expliquons systématiquement la raison de notre désistement dans notre rapport de vote.
Il nous arrive d’avoir des votes négatifs qui vont donc à l’encontre de certaines résolutions déposées.

Quel est votre pourcentage de votes contraires aux résolutions proposées ? Comment l’expliquez-vous ?
Le taux de votes contraires aux résolutions se situe entre 20% et 25%. Ils portent le plus souvent sur les augmentations de capital défavorables aux actionnaires minoritaires, les nominations d’administrateurs dont le profil ne conviennent pas et les rémunérations inappropriées.

Ces votes contraires peuvent s’appuyer sur les avis AFG « Alertes AG SBF 120». En effet, dans le cadre de son programme de veille sur les résolutions des Assemblées Générales, l’AFG publie les résolutions considérées comme contraires au code de gouvernance d’entreprise. Ces recommandations n’ont en revanche pas de caractère contraignant sur la politique de vote de l’équipe de gestion.


Pouvez-vous nous donner des exemples de sociétés avec lesquelles vous êtes entrés ou avec lesquelles vous allez entrer en dialogue ?

Nous allons établir un vrai dialogue avec la société LVMH à partir de l’année prochaine sur leur intégration des enjeux de développement durable pour comprendre leur positionnement, les efforts réalisés et les objectifs établis en matière de recyclabilité, et d’utilisation des matières premières dans les différentes chaines de production.
La même logique sera suivie avec des grandes compagnies pétrolières comme Total** ou Shell** afin de mieux appréhender leur stratégie sur l’électrification, le renouvelable, le stockage de l’énergie ou encore de grandes sociétés de télécommunication comme Orange** afin de mieux discerner leur implication dans le développement des « smart cities ».
Nous aurons à cœur de leur proposer des bonnes pratiques que nous avons observées dans leur secteur.

Avez-vous des discussions dans une approche collective : Forum pour l’investissement responsable ; Carbon Disclosure Project, autres…

Nous avons fait de l’engagement collaboratif avec les Principes pour l’Investissement Responsable mais nous trouvons que cela fonctionne peu.
Nous estimons que la manière la plus efficace de faire évoluer les comportements des sociétés est de les rencontrer directement. Nous pouvons ainsi leur expliquer concrètement notre vision et notre modèle d’évaluation pour in fine les convaincre d’aller dans la même direction.

De plus en plus d’entreprises veulent comprendre nos besoins et préoccupations d’actionnaires et sont enclines à s’inscrire dans un processus d’évolution.

La directive européenne sur les droits des actionnaires II dont l’entrée en vigueur est prévue l’année prochaine a-t-elle eu des implications sur votre politique de vote et d’engagement ?

Notre politique de vote et d’engagement était déjà très exigeante avant l’adoption de cette réglementation. Dès lors, cette directive n’a pas eu d’impact.

*La politique de vote et d'engagement s’applique à l’ensemble des fonds de DNCA Finance

**Total , Shell et Orange sont citées à titre d’exemple, les sociétés étant présentes au sein du portefeuille de DNCA Beyond European Leaders pour les deux premières et dans DNCA Invest Beyond Infrastructure & Transition pour la troisième, fonds labélisés ISR. Information au 31/10/2019 et pouvant évoluer dans le temps.

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