Il n'est pas très plaisant d'écrire pendant des jours sur ces phases de marché baissières, d'autant que ça me fait parfois passer pour un oiseau de mauvais augure. Mais il faut bien quelqu'un pour dresser un tableau à peu près synthétique de la situation, alors je m'y colle bon gré, mal gré. Les indices boursiers américains, qui avaient bien résisté jusque-là, ont subi un nouveau coup de sabre hier, en décrochant assez lourdement en fin de parcours. L'indice large S&P500 a perdu environ 3%, tandis que le Nasdaq, riche en valeurs technologiques, s'est enfoncé de 3,75%. La flambée du prix des matières premières, or noir en tête, a permis au secteur pétrolier de faire cavalier seul, ou presque, dans le compartiment des hausses. Comme le soulignaient hier plusieurs de mes collègues, le réconfort actuel est dans l'anti-ESG en ce moment : énergies fossiles, armement, groupes miniers... Chassez le naturel, il revient au galop. 

En Europe, les indices ont déplacé des montagnes (russes) au cours de la séance, avec une amplitude de variation un peu dingue : sur le CAC40, l'écart entre les plus hauts et les plus bas de la séance à atteint environ 350 points, ce qui représente 5,9%. Fort heureusement pour le moral des troupes, l'indice parisien a clôturé sur une baisse relativement modérée de 1,3%, après avoir perdu près de 5% au pire de la séance. Le CAC40 a même brièvement gagné un peu de terrain durant la séance, mais la hausse n'a pas tenu. Les replis enregistrés hier ont plongé le DAX allemand et l'EURO STOXX 50 en "bear market" ou "marché baissier", ce qui signifie que les deux indices ont perdu au moins 20% sur leurs pics les plus récents. 

Tout ça pour dire que la volatilité est toujours extrêmement forte, et qu'elle s'est propagée aux États-Unis. L'indice VIX, dont je parle régulièrement, a fini par décaler fortement à la hausse hier, pour atteindre plus de 36 points. Un niveau très proche du pic d'octobre 2020 (qui coïncidait avec la seconde vague de coronavirus). Le VIX, basé sur les options à 30 jours du S&P500, est l'indicateur de nervosité le plus utilisé par les investisseurs.

Je crois que les marchés ont mis du temps à comprendre que les conséquences de la guerre en Ukraine ont fait disparaître la mini-fenêtre de tir dont disposaient les banquiers centraux pour reprendre le contrôle de l'inflation sans trop endommager l'économie. Il y a encore deux semaines, la Fed disposait de conditions plutôt favorables pour lancer son cycle de resserrement monétaire. Mais tout a changé. Et j'ai bien peur que cela ne soit le cas même en cas d'accalmie sur le front ukrainien, soit parce que le Kremlin prend le contrôle du pays, soit parce qu'une solution négociée est trouvée. "Le prix du gaz 20 fois plus élevé qu'il y a un an", titre le quotidien économique belge L'Echo ce matin. Le blé touche un plus haut historique, lui répond le Financial Times, pendant que Bloomberg multiplie les alertes sur la flambée inédite des prix du nickel. Cette multiplication de hausses de prix élimine de facto le coup de pouce du destin dont espéraient bénéficier les banquiers centraux pour leurs politiques monétaires. Pire, cela complique singulièrement leurs tâches.

Dans ce contexte, les initiatives vont se multiplier pour gérer les désordres économiques en cours et ceux qui se profilent. Le G7 va par exemple réunir vendredi ses ministres de l'agriculture, pour trouver des moyens de stabiliser les marchés alimentaires. L'Agence internationale de l'énergie a pour sa part publié un plan en dix points pour réduire la dépendance de l'Europe au gaz russe, que je vous recommande de lire d'autant qu'il est assez accessible : la preuve, j'ai presque tout compris. Le problème bien sûr, c'est que les remèdes, s'ils prouvent leur efficacité, mettront du temps à agir. En attendant, c'est l'inflation qui risque de s'insinuer partout. Je me demande ce que Christine Lagarde et son aréopage de banquiers centraux européens vont bien pouvoir dire jeudi à l'issue de leur réunion de mars. 

Les indicateurs avancés des bourses européennes sont encore baissiers ce matin, mais le niveau de volatilité élevé signifie que les investisseurs sont susceptibles de réagir brutalement, dans un sens ou dans l'autre, à n'importe quelle annonce. Ces derniers jours, c'est le calendrier des réunions de discussions entre émissaires Russes et Ukrainiens qui a eu tendance à provoquer des retournements de situation, même si je pense que tout le monde a bien compris désormais que les positions des deux camps sont pour l'heure inconciliables. Les marchés japonais enchaînent ce matin une 3e séance consécutive dans le rouge. Le CAC40 a ouvert en baisse de 0,6% à 5955 points... mais gagne près de 3% après 30 minutes de cotations. Volatilité, quand tu nous tiens...

Les temps forts économiques du jour

La production industrielle allemande (8h00) sera suivie aux Etats-Unis de la balance commerciale (14h30) et des stocks des grossistes (16h30).

L'euro se stabilise autour de 1,0866 USD, de même que l'once d'or, qui évolue autour de 1990 USD. La pétrole a légèrement reflué après ses pics, à 125,60 USD le baril de Brent et à 121,33 USD celui de WTI. Le rendement de la dette américaine remonte à 1,80% sur 10 ans et le Bund reste en territoire négatif à -0,02%. Le bitcoin reste dans la zone de 38 400 USD pièce.

Les principaux changements de recommandations

  • A.P. Møller – Mærsk : J.P. Morgan passe de surpondérer à neutre en visant 22 940 DKK.
  • BASF : Deutsche Bank passe d'acheter à conserver en visant 64 EUR.
  • Bavarian Nordic : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 415 à 290 DKK.
  • CaixaBank : Berenberg passe de conserver à acheter en visant 3,20 EUR.
  • Clariant : Vontobel passe d'acheter à conserver en visant 17 CHF.
  • CS Group : Portzamparc passe de conserver à acheter en visant 6,90 EUR.
  • Essentra : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 360 GBp.
  • Flutter : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 16 500 à 15 500 GBp.
  • GFT Technologies : Kepler Cheuvreux reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 46 à 53 EUR.
  • Hensoldt : MM Warburg reste à l'achat avec un objectif relevé de 20 à 30 EUR.
  • ITV : Bernstein passe de neutre à surperformance en visant 124 GBp.
  • Nokia : Inderes passe d'accumuler à acheter en visant 5,20 EUR.
  • SES S.A. : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 10 à 9,80 EUR.
  • Unipol Gruppo : Berenberg démarre le suivi à conserver en visant 6,58 EUR.
  • Unipolsai Assicurazioni : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 2,89 EUR.
  • Tenaris : AlphaValue reste à alléger avec un objectif relevé de 11,70 à 12,90 EUR.
  • Travis Perkins : Jefferies passe d'acheter à conserver en visant 1416 GBp.
  • Vallourec : AlphaValue reste à accumuler avec un objectif relevé de 10,10 à 12,30 EUR.
  • Veolia : HSBC reprend le suivi à l'achat en visant 40 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Orange et Masmovil vont fusionner leurs activités en Espagne.
  • Lors de sa journée investisseurs du jour, Danone fait part de ses objectifs de moyen terme.
  • Sanofi va investir 1,5 Md€ en France dans l'ARN messager.
  • Le PDG de TotalEnergies affirme que la major pétrolière ne ressent aucune pression du gouvernement français pour cesser ses activités en Russie.
  • Airbus signe avec Fortescue comme partenaire de son projet d'avion à hydrogène.
  • Valneva annonce le succès de son essai pivot de phase III avec son candidat vaccin contre le chikungunya.
  • Selon les informations de Bloomberg, KKR lorgnerait Albioma.
  • Icade améliore le profil de sa dette en rachetant des obligations.
  • Gaztransport & Technigaz obtient une commande de Hyundai Samho Heavy Industries pour la conception des cuves d'un nouveau méthanier.
  • Séché vise 1 Md€ de chiffre d'affaires d'ici 2025.
  • Nette hausse du trafic navettes de Getlink en février.
  • Amoeba émet une nouvelle tranche de son financement dilutif par OCA.
  • Geci tire 0,5 M€ sur son ORNAN.
  • Riber reçoit une commande pour une machine MBE.
  • Madvertise émet 1,1 M€ d'OC.
  • Mauna Kea s'associe à On Target Laboratories pour mener des recherches sur le diagnostic du cancer pulmonaire.
  • Grolleau investit dans l'éditeur de logiciels Nexence.
  • Le conseil d'administration de la Société Marseillaise du Tunnel Prado-Carénage maintient son soutien à l'offre publique malgré la grogne des minoritaires.
  • Cegedim équipe les thermes de Balaruc.
  • Enertime signe avec l'ADEME le contrat de subvention pour son projet de valorisation de la chaleur fatale de l’usine Verallia de Lagnieu pour un montant de 1,587 M€.
  • Groupe SFIT signe une commande en Scandinavie.
  • La Société Parisienne d'Apport en Capital prévoit l'acquisition de MyHotelMatch.
  • Lexibook, Inventiva, McPhy, GL Events ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et autres)

  • Lindt a dégagé des bénéfices records en 2021. La direction vise pour 2022 une croissance des ventes dans le haut d'une fourchette de 6 à 8%, assortie d'une marge opérationnelle de 15%.
  • Google négocierait le rachat de la société de cybersécurité Mandiant, selon The Information.
  • Adidas ferme jusqu'à nouvel ordre son site marchand et ses magasins en Russie.
  • Le bénéfice de Fresnillo progresse de 17% en 2021.
  • Monsanto (Bayer) attaqué en justice aux USA pour des décennies de pollution des eaux.
  • Uniper ne signera pas de nouveau contrat d'approvisionnement à long terme en gaz avec la Russie et prend une provision de 987 M€ sur le gazoduc Nord Stream 2.
  • Les principales publications du jour : Ashtead, Lindt, ICA Gruppen, D'Ieteren, FresnilloTout l'agenda ici.

Lectures