Mon vocabulaire s'épuise pour décrire les mouvements actuels des marchés boursiers : yoyo, un pas en avant, un pas en arrière, montagnes russes, sinusoïde, latéralisation… Hier, les indices ont terminé dans le rouge aux Etats-Unis et en Europe. Depuis une quinzaine de jours, c'est la même rengaine : le canal d'évolution des cours est assez étroit. Les investisseurs n'ont plus l'air d'être aussi déprimés qu'il y a un mois, mais ils ne semblent pas non plus dans les meilleures dispositions pour reprendre des risques. Nous en sommes arrivés aux deux jours de la semaine susceptibles de faire bouger les lignes. Et je n'essaierai même pas de pronostiquer dans quel sens. Vendredi, l'institut statistique américain dévoilera le niveau de l'inflation de mai, un déterminant majeur de la politique de la Fed. Et dès aujourd'hui, la BCE fait le point sur sa propre politique monétaire. Laissera-t-elle entendre qu'elle va se mettre au diapason d'autres banques centrales en relevant ses taux de 50 points de base dans un avenir proche ? Telle est la question. Une fois de plus, c'est la forme, plus que le fond, qui risque de primer. A ce titre, je ne résiste pas au plaisir de vous conter une anecdote qui, je trouve, en dit long sur le monde dans lequel nous vivons.

Pour ce faire, je vais utiliser Numéro un, le plus grand des deux adolescents qui vit sous mon toit, ou plutôt devrais-je dire qui partage quelquefois un repas, une discussion, quelques minutes et parfois rien du tout. Or donc, l'intéressé me hèle il y a quelques jours pour me demander si j'aurais la gentillesse d'imprimer au bureau sur du papier A3 la présentation sur la Grèce que ses petits camarades et lui ont préparée pour la journée de l'Europe du lycée. Je me dois de préciser que pour cette manifestation d'une grande importance, puisqu'elle permettait de rater une matinée de cours, numéro un avait mis les petits plats dans les grands en commandant sur un site marchand une magnifique combo perruque-barbe de Zeus accompagnée de très seyants sourcils autocollants. Quant à ses compères, ils étaient allés piocher dans les réserves familiales des draps usagés en guise de toges et avaient investi dans du tzatzíki, histoire de pousser le cliché à son paroxysme.

De mon côté, j'ouvrais depuis le bureau la fameuse présentation que je devais imprimer. Laquelle ressemblait furieusement à ce que j'aurais pu faire en 1989 sur mon Apple IIC. Ou à un NFT, ce qui n'est pas si différent. Après avoir lutté contre une envie irrépressible de remplacer les photos pixellisées, de réaligner les bullets points des questions et renoncé à jeter le tout à la corbeille, j'optais finalement pour une approche plus retorse : imprimer cette horreur en me disant qu'après tout, Numéro un et ses amis n'auraient qu'à assumer le prix de ce travail manifestement bâclé. En confiant un peu plus tard les copies papiers à l'intéressé, je me fendis quand même d'un "mais comment vous avez pu faire un truc aussi moche en 2022, on dirait une présentation réalisée par mon grand-père sur son Bull Micral 30" (j’avais un grand-père 1.0). "T'inquiète barquette", me réplique numéro un, "c'est pour découper et afficher sur notre stand" (c’est-à-dire, si vous avez suivi, un stand composé de photos moches, d'un questionnaire, de Zeus, de gars en toge et d'une table accueillant une coupelle en plastique avec de la nourriture dedans). Je n'ai rien répondu, ricanant déjà de la bonne leçon de morale que je pourrais faire au lascar après le crash.

Le lendemain soir, retour de Numéro un après le lycée. "Alors, ça a été accueilli comment votre exposé des années 80 ?", lui demandais-je avec bassesse. "Bah super bien, on a été félicités et on a été élu meilleur stand du lycée", répondit l'effronté avec un petit sourire à mi-chemin entre le "OK boomer" et "t'es fini, papa". Et Numéro un de m'expliquer qu'ils ont eu 68 votes en leur faveur, que les seconds n'en avaient obtenu que 20 et que tous les autres étaient dans les choux. Il trouvait ça amplement mérité au vu du dispositif mis en place. "On les a fait rire avec le déguisement de Zeus, on a donné à manger à ceux qui répondaient bien à nos questions et un de nous quatre s'était installé à côté de la table de vote en disant, votez pour la Grèce, votez pour la Grèce". C'est le moment choisi par numéro un pour me trucider avec un "tu vois, il faut me faire confiance".

Toute cette anecdote pour dire que la façon dont on emballe les choses, je parle ici souvent de narration mais vous pouvez aussi comparer cela à du marketing, revêt une grande importance. C'est la même chose avec une banque centrale. Les paroles que prononcera Christine Lagarde auront un poids considérable puisqu'elles entraîneront les rouages macroéconomique de la zone euro dans un sens ou dans l'autre. La BCE publiera le communiqué de sa décision à 13h45 et Madame Lagarde, sans son déguisement de Zeus, commentera les choix en conférence de presse à partir de 14h30. Le courant principal pense que la banque guidera vers une hausse de taux de 25 points de base en juillet. Toute narration plus "faucon", par exemple en laissant planer le doute sur une éventuelle hausse de 50 points de base, accroîtrait la volatilité de la séance. La BCE doit aussi publier ses premières projections d'inflation 2024.

Dans le reste de l'actualité du jour, il y a des rumeurs d'intérêt de State Street pour le Crédit Suisse, sur la base d'une offre à 9 CHF. Les deux banques ont botté en touche. Les députés européens ont voté en faveur de la disparition des véhicules thermiques neufs à partir de 2035 dans l'UE. Malgré les doutes qui pèsent sur la dynamique économique, le pétrole ne cesse de grimper. Le baril de Brent flirte avec 124 USD. L'enthousiasme du marché pour le réveil chinois a été de courte durée : Pékin a décidé de verrouiller à nouveau un quartier de Shanghai dans le cadre de sa politique zéro-covid.

Les indicateurs avancés sont baissiers en Europe et hésitants aux Etats-Unis. En Asie Pacifique, les places chinoises et australienne baissent. Le Japon reste en apesanteur grâce à la faiblesse du yen, jugée favorable à cette économie fortement exportatrice, la seule parmi les plus puissantes du monde à ne pas avoir sifflé la fin de sa politique ultra-accommodante. Le CAC40 perdait 0,6% à 6408 points peu après l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

La décision de la BCE sur ses taux directeurs (13h45) et la conférence de présentation qui suivra (14h30) seront suivies de près. Les inscriptions hebdomadaires au chômage américain seront publiées à 14h30. Tout l'agenda macro ici. Ce matin, la Chine a fait état d'exportations plus dynamiques que prévu en mai.

L'euro remonte à 1,0730 USD. L'once d'or grappille quelques dollars à 1855 USD. Le pétrole gagne du terrain avec un Brent de Mer du Nord à 123,93 USD le baril et un brut léger américain WTI à 122,38 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans regrimpe à 3,04%. Le bitcoin revient à 30 200 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • ACS : Kepler Cheuvreux passe d'acheter à conserver en visant 27,95 EUR.
  • Atlantia : RBC passe de surperformance à performance de marché en visant 23 EUR.
  • Britvic : Morgan Stanley passe de pondération en ligne à surpondérer en visant 940 GBp.
  • Cellnex : Citigroup passe de neutre à achat.
  • Compass : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 1990 GBp.
  • Crédit Suisse : AlphaValue passe d'acheter à accumuler en visant 7,56 CHF.
  • Daimler Truck : DZ Bank passe d'acheter à conserver environ 30 EUR.
  • DNB Bank : Exane BNP Paribas passe de neutre à sousperformance en visant 192 NOK.
  • Elior : HSBC passe d'acheter à conserver en visant 3 EUR.
  • EQT : Société Générale démarre le suivi à conserver en visant 305 SEK.
  • Ferrovial : RBC passe de surperformance à performance de marché en visant 24 EUR.
  • Inditex : Jefferies reste à l'achat avec un objectif relevé de 26,50 à 27,50 EUR.
  • Informa : Kepler Cheuvreux passe de conserver à acheter en visant 655 GBp.
  • Nexi : J.P. Morgan passe de surpondérer à neutre en visant 10,80 EUR.
  • Partners Group : Société Générale passe de conserver à acheter en visant 1300 CHF.
  • Sodexo : HSBC passe de conserver à acheter en visant 85 EUR.
  • Spie : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 29 à 32 EUR.
  • TotalEnergies : Credit Suisse démarre le suivi à surperformance en visant 60 EUR.
  • Wacker Chemie : J.P. Morgan passe de neutre à souspondérer en visant 160 EUR.
  • Worldline : J.P. Morgan réduit son objectif de cours de 72 à 59 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Airbus a décroché 191 commandes nettes (364 brutes) sur janvier / mai, et livré 235 appareils (hors Aeroflot).
  • Bolloré, Albioma, Compagnie de l'Odet détachent leurs dividendes.
  • Worldline, Rubis tiennent leurs assemblées générales.
  • 14 investisseurs emmenés par Sycomore AM ont adressé une lettre ouverte au PDG d'Orpea. Le groupe a indiqué qu'un rapport d'audit a confirmé des dysfonctionnements et des fautes dans certains établissements.
  • EDF Renouvelables (Electricité de France) a mis en service quatre centrales solaires, dont deux flottantes, en Israël.
  • Soitec a publié des résultats en vive hausse au terme de l'exercice 2021/2022.
  • Icade finalise la cession d'un immeuble pour 219 M€.
  • Delta Drone International (filiale de Delta Drone) a signé un contrat d1 MAUD sur 3 ans avec Red 5.
  • 60% des collaborateurs ont participé au programme d'actionnariat salarié 2022 de Visiativ.
  • Getlink enregistre une forte croissance de son trafic en mai.
  • Europlasma réduit le nominal de son action de 2 à 0,0001 EUR.
  • Prodways Group renforce son accès au marché grâce à un nouveau partenariat de distribution avec Dental Axess.
  • L'Olympique Lyonnais confirme avoir connaissance de discussions entre ses actionnaires et des acheteurs.
  • Waga veut monter à 100% du capital de sa filiale américaine.
  • Broadpeak s'introduit sur Euronext Growth.
  • Abeo et Generix ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

Lectures