Je ne suis pas sûr que les banques centrales voient d'un très bon œil l'emballement en cours sur les actifs à risque, parce qu'il intervient probablement un peu tôt par rapport à leur agenda caché. Je m'explique. Aux États-Unis, la Fed a besoin de maintenir une certaine pression négative sur l'économie pour s'assurer que la décrue de l'inflation va continuer et que l'évolution des prix se rapprochera de la zone réputée économiquement optimale de 2% environ. Si l'économie redémarre trop tôt, alimentée notamment par le retour d'un sentiment positif sur les marchés financiers, les efforts accomplis jusque-là par la banque centrale pourraient avoir été vains.

Or les marchés actions disent actuellement "votre plafond de taux est bientôt touché, on entrevoit à terme le retour à une politique monétaire plus conciliante". Et le marché obligataire va dans le même sens. Certes de façon moins exubérante, mais dans le même sens. Le rendement de la dette américaine à 10 ans, 3,52% ce matin, est très loin de ses pics d'octobre. D'ailleurs il suffit de superposer le graphique du 10 ans US et celui du Nasdaq pour constater que l'indice technologique monte quand le rendement obligataire baisse, et vice-versa depuis le mois d'octobre. Rien de bien neuf là-dedans, mais la liaison est particulièrement limpide en ce moment.

Un Nasdaq qui a gagné plus de 2% hier, après avoir déjà gagné plus de 2% sur la séance précédente. L'indice a été tracté par Apple (+2,3%) et par tout le compartiment des semiconducteurs : Nvidia, Qualcomm et Advanced Micro Devices ont toutes repris plus de 6%. Le S&P500 (+1,2%) et le Dow Jones (+0,8%) en ont profité en prenant l'aspiration. En Europe, le vert était partout, mais dans des proportions plus modestes. Les principaux indices ont pris entre 0 et 1%, parfois un peu plus comme à Amsterdam ou à Stockholm. Seuls les dossiers les plus défensifs, dans les utilités, la santé ou la chimie, se sont retrouvés dans le rouge.

La question à plusieurs milliards de dollars est maintenant de savoir si la Fed estime qu'il faut remettre de l'ordre dans tout ça, histoire de ne pas reperdre la main. La semaine dernière, les tentatives de recadrage de quelques pontes de la banque centrale américaine ont échoué. Et il n'y aura pas de sorties de faucons dans les jours qui viennent, puisque nous sommes entrés depuis samedi dans la période réglementaire de silence qui précède la décision de politique monétaire du 1er février. Le marché est persuadé à 100% qu'une hausse de taux limitée à 25 points de base aura lieu. Les esprits contraires se sont évaporés. Mais l'enjeu résidera probablement dans le discours de présentation de la décision qui suivra. Jerome Powell a souvent été qualifié de "boucle d'or" par le passé. Pas à cause de sa coiffure de surfer californien, mais plutôt pour sa capacité à rester dans le tiède, c’est-à-dire ni trop chaud, ni trop froid, comme le bol de petit ours dans le conte. Mais le risque du moment, c'est que boucle d'or se transforme en papa ours et qu'il fasse entendre sa grosse voix pour calmer les ardeurs spéculatives actuelles.

En Europe, les banques centrales ont du pain sur la planche itou. La BCE et la Banque d'Angleterre rendront elles aussi des décisions de politique monétaire dans quelques jours, précisément le jeudi 2 février, précisément le lendemain de la Fed. Dans la zone euro, le débat fait aussi rage sur le rythme de progression des taux, alors que les économies souffrent. Mais d'ici le 2 février, c'est bien la Fed qui va tenir les marchés en haleine.

Plus près de nous, ce sont les indicateurs PMI avancés du mois de janvier qui vont animer la séance du jour. Pour mémoire, ce sont des indicateurs d'activité très prisés pour les principales économies. Ils sont généralement attendus en zone de contraction, mais sur la voie d'une amélioration ténue en Europe. Aux Etats-Unis, la contraction devrait aussi dominer, mais toute variation sera sujette à interprétation à l'aune des conséquences possibles sur la politique monétaire. Et là, c'est un peu le flou artistique : si les données sont plus robustes que prévu, elles seraient rassurantes d'un point de vue macroéconomique mais pourraient pousser les marchés boursiers à davantage de prudence sur l'évolution des taux. A l'inverse, des données dégradées renforceraient le scénario d'une Fed forcée de revenir à une politique plus accommodante, tout en faisant remonter les craintes de récession. On reste loin de la science exacte.  

Outre les PMI, l'actualité économique est marquée ce matin par deux informations principales. D'une part, les Etats-Unis ont interpelé Pékin sur le soutien de certaines entreprises chinoises à l'effort de guerre russe. D'autre part, l'Europe essaie de se réveiller pendant que les Etats-Unis font leur marché chez les industriels du vieux continent pour leur montrer que l'herbe est plus verte et plus grasse de l'autre côté de l'Atlantique. J'ai mis les liens vers trois articles à ce sujet en bas de page. Dans un autre registre, la saison des résultats prend son envol aujourd'hui avec plusieurs poids lourds de la cote américaine, dont Johnson & Johnson, Danaher et Verizon avant l'ouverture de Wall Street et Microsoft ou Texas Instruments post-clôture. En Europe ce matin, Swatch et Logitech ont ouvert le bal.

En Asie-Pacifique, le Japon a le vent en poupe avec un Nikkei 225 en hausse de 1,5%. L'ASX australien prend 0,44% en clôture, pendant qu'en séance, le SENSEX indien grappille 0,2%. Les marchés de Chine continentale, de Hong Kong, de Taiwan, de Séoul ou de Singapour sont encore fermés pour le nouvel an lunaire. Les indicateurs avancés européens sont une fois de plus haussiers autour de 8h00. Le CAC40 gagnait 0,25% à 7050 points peu après l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

Grosse séance sur les indicateurs PMI flash du mois de janvier pour les grandes économies, dont la zone euro (10h00) et les Etats-Unis (15h45). Outre-Atlantique, on aura aussi droit à l'indice manufacturier de la Fed de Richmond (16h00). Tout l'agenda ici.

L'euro reste ferme à 1,0874 USD. L'once d'or monte à 1932 USD. Le pétrole aussi, avec un Brent de Mer du Nord à 88,07 USD le baril et un brut léger américain WTI à 81,67 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans progresse à 3,52%. Le bitcoin évolue autour de ses meilleurs niveaux récents, proche de 23 000 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Accor : AlphaValue reste à accumuler avec un objectif de cours relevé de 34,60 à 35,60 EUR.
  • Ambu : SEB Equities passe de conserver à vendre en visant 85 DKK.
  • Dassault Aviation : Exane BNP Paribas passe de surperformance à neutre.
  • EasyJet : Liberum reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 430 à 500 GBp.
  • Ericsson : Goldman Sachs passe de neutre à vendre en visant 50 NOK.
  • Geberit : Jefferies reste à sousperformance avec un objectif de cours réduit de 341 à 338 CHF.
  • Hermès : Deutsche Bank relève son objectif de 1320 à 1530 EUR.
  • International Consolidated Airlines : Liberum reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 145 à 220 GBp.
  • Kesko : DNB Markets démarre le suivi à l'achat en visant 25 EUR.
  • LVMH : Cowen relève son objectif de 780 à 900 EUR.
  • Novartis : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 106 à 105 CHF.
  • Ryanair : Liberum reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 16 à 17 EUR.
  • Scor : Citigroup relève son objectif de cours de 19,45 à 24,23 EUR.
  • Shaftesbury : Panmure Gordon passe de conserver à acheter en visant 459 GBp.
  • Sonova : Barclays reste à surpondérer avec un objectif de cours réduit de 330 à 320 CHF.
  • Swatch Group : Morgan Stanley passe de souspondérer à pondération en ligne en visant 328 CHF.
  • Swedish Orphan Biovitrum : Handelsbanken passe d'acheter à conserver.
  • UBS : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 31,70 à 31,80 CHF.
  • Unite Group : Panmure Gordon passe d'acheter à conserver en visant 1038 GBp.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont données à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Interparfums : les revenus du T4 sont en progression de 47%, les prévisions sont confirmées.
  • Oeneo : les revenus du T3 sont en hausse de 14,5% en organique.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Engie annonce des volumes de distribution de gaz en baisse en 2022, dans un contexte de températures plus élevées.
  • Sanofi et CytoReason étendent leur collaboration pour développer de nouvelles recherches sur les maladies inflammatoires de l'intestin.
  • TotalEnergies accorde des rabais aux TPE et PME pour les contrats d'électricité.
  • LVMH renonce à son centre de recherche à proximité de Polytechnique.
  • Vinci Concessions investit 15 M€ dans la plateforme hydrogène Hype.
  • Technip Energies remporte un contrat auprès d'Aramco pour la modernisation des infrastructures de récupération du soufre de la raffinerie de Riyad.
  • Xavier Niel est officiellement candidat à la reprise d'une fréquence TNT dans le cadre du renouvellement de celles de TF1 et M6 Métropole Télévision.
  • Esker se développe au Benelux.
  • GL Events renforce son offre de structures temporaires avec l'acquisition de Locabri.
  • La Compagnie des Alpes réunit ses agences immobilières de montagne sous la marque "Maison Haute".
  • Carmat pense devenir rentable en 2027.
  • Vergnet signe un avenant de 0,4 M$ dans le cadre du contrat Yap en Micronésie.
  • Life is Strange 2 (Don't Nod) arrive sur Nintendo Switch en février.
  • Sur l'agenda : Eiffage, Interparfums, Somfy, Compagnie des Alpes, McPhy, Sidetrade, Cegedim, Groupe Partouche, Advicenne, BigBen, Nacon, Prismaflex, Eurobio

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont données à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Logitech : les ventes trimestrielles chutent de 22% à 1,27 Md$.
  • Swatch Group : le bénéfice opérationnel 2022 atteint 1,16 MdCHF, un peu moins que prévu.

Annonces importantes (et moins importantes)

Lectures