Pour être honnête, j'ai longuement cherché ce matin un moyen de ne pas trop m'appesantir sur la décision de politique monétaire que la banque centrale américaine va prendre ce soir, qui fera les gros titres de la journée. Non pas qu'elle soit dénuée d'intérêt, je ne me permettrais pas, mais plutôt parce qu'il va y avoir beaucoup de bruit, beaucoup d'hypothèses et beaucoup d'interprétations, comme d'habitude, Et comme d'habitude, il faudra attendre que la poussière retombe pour avoir une bonne vision des conséquences de la décision. Bref, je cherchais d'autres idées et j’avais commencé à en trouver quand j'ai renversé mon Infusion des Marmottes© sur mon bureau. Ou plutôt dans mon clavier, pour faire bonne mesure. Alors bien sûr, ça m'a fait perdre du temps de sécher tout ça. Depuis, je baigne dans un mélange tilleul, verveine, pétales d'oranger, menthe poivrée, m'apprend la boîte, et je n'ai pas pu correctement organiser mes idées. Mais j'ai quelques bribes d'informations intéressantes quand même à vous soumettre, parce que vous vous fichez sûrement de mes titanesques déboires tisanesques.

En trifouillant un peu, je me suis rendu compte que ce 16 mars est particulier. C'est non seulement le jour du pissenlit et de la Sainte-Bénédicte, mais aussi la date-anniversaire du plus bas du CAC40 lors du krach-éclair de mars 2020. Vous savez, quand le coronavirus devait permettre au monde de renaître différent et meilleur. L'indice parisien était descendu à 3632 points en séance ce jour-là. Pour remonter à 7382 points le 5 janvier 2022 lors du record absolu de l'indice, qui a donc plus que doublé dans l'intervalle. Depuis, les choses se passent un peu moins bien mais ceux qui raisonnent en verre à moitié plein peuvent toujours se rappeler que l'indice parisien a gagné 75% en deux ans, même s'il a cédé 1000 points depuis début janvier.

J'avais aussi trouvé un autre chiffre intéressant. 22%. 22% de quoi me direz-vous ? Soyez patients, j'y viens. L'Intelligencer, qui est une émanation du magazine New York, a publié un long papier titré "Le capitalisme moderne est plus étrange que vous ne le pensez" et sous-titré "Il ne fonctionne plus non plus comme annoncé". A lire ici. Le journaliste rappelle que 22% de l'entreprise type de l'indice S&P500 est désormais entre les mains du trio BlackRock, Vanguard, State Street, les trois principaux gérants d'actifs américains. On pourrait dire gérant d'actifs passifs d'ailleurs, ce qui est probablement un oxymore. Car leurs stratégies sont essentiellement indicielles, vous le savez sans doute, via des ETF. Comme l'écrit l'auteur de l'article, "ils possèdent une part importante de pratiquement tout", si bien "qu'il n'y a pas de précédent à cette forme extraordinaire de pouvoir". Le plus paradoxal, c'est que ces colosses n'ont pas d'intérêt direct pour les performances des entreprises dans lesquelles ils sont investis, puisqu'ils sont payés en honoraires et que ce sont leurs clients qui sont exposés aux rendements des actifs. Ils ont quand même intérêt à ce que le système fonctionne, sans quoi ils n'auraient plus de clients, mais cela passe surtout par un prix des actifs élevé… donc par une approche très accommodante de la politique monétaire. On comprend dès lors beaucoup mieux que la part du trio dans l'entreprise type du S&P500 soit passée de 13,5 à 22% entre 2008 et 2022, période dorée du bazooka à liquidités.

La politique monétaire est donc est au cœur de la séance du jour. La Fed devrait relever ce soir ses taux directeurs d'un quart de point pour commencer à lutter contre l'inflation. C'est le pronostic ultra-majoritaire du marché. Il y a quelques semaines, certains pensaient qu'une hausse plus musclée de 50 points de base constituerait un meilleur remède, mais ils ont l'air de s'être évaporés dans la nature. Entretemps, la guerre en Ukraine a bouleversé les analyses, même si elle n'a fait qu'amplifier le problème de hausse des prix. Alors pour éviter de provoquer la peur des marchés et un choc économique trop fort, la banque centrale devrait s'en tenir au scénario de base. Mais je ne peux m'empêcher de penser qu'elle enverrait un message sacrément plus efficace en prenant tout le monde à contrepied ce soir avec un double tour de vis monétaire. Mais ce genre de surprise n'arrive plus dans le monde feutré du guidage prospectif (forward guidance), qui consiste pour les banques centrales du monde post-2008 à étaler leurs intentions le plus clairement possible. Attention, la décision sera rendue à 19h00 et non à 20h00 car les Etats-Unis sont déjà passés à l'heure d'été. Jerome Powell tiendra la conférence de présentation de la décision à partir de 19h30.

D'ici là, les rapports de combats et de pourparlers en Ukraine vont continuer à pleuvoir comme les bombes russes sur le pays. Et c'est aujourd'hui que Moscou doit honorer un paiement d'intérêts sur sa dette. La Russie a prévu de le faire en roubles et pas en dollars, ce qui constituerait un cas de défaut souverain, a prévenu l'Agence Fitch. Toutefois, et malgré les titres sur la faillite de l'Etat Russe qui ne manqueront pas de paraître, ce 16 mars n'est pas une date couperet parce qu'il existe dans ce domaine une tolérance de plusieurs semaines pour rattraper le coup. Ceci dit, il s'agira quand même d'un événement à forte portée symbolique.

Pour être complet ce matin, il me faut ajouter qu'il se passe toujours n'importe quoi sur les marchés actions chinois. Après avoir sombré en début de semaine, ils s'offrent un énorme rebond (des gains de plus de 20% sont en cours sur Alibaba et Tencent) après des "rumeurs" propagées par l'agence officielle Xinhua sur la volonté des autorités chinoises d'œuvrer à la stabilité des marchés actions et de "soutenir la cotation des entreprises chinoises à l'étranger". Si même le parti communiste chinois se met à transformer la bourse en casino, on n'est pas sortis de l'auberge.

Les indicateurs avancés européens et américains sont haussiers ce matin. Le vieux continent a un rattrapage à effectuer puisque Wall Street a fortement rebondi hier. En Asie, Tokyo a gagné 1,6% et Sydney 1,1%. De la gnognotte à côté des +8% affichés par le Hang Seng en fin de parcours. Le CAC40 reprend 2% à l'ouverture à 6484 points.

Les temps forts économiques du jour

Cap sur les Etats-Unis aujourd'hui avec les ventes de détail de février (13h30), puis l'indice immobilier de la NAHB de mars et les stocks d'entreprises de janvier (15h00), ainsi que les stocks pétroliers hebdomadaires (15h30), pour finir par la décision de la Fed sur ses taux à 19h00.

La paire euro / dollar se négocie 1,09667 USD. L'once d'or perd à nouveau du terrain à 1915 USD. La décrue du pétrole continue, avec un Brent de Mer du Nord à 100,86 USD et un brut léger américain WTI à 96,91 USD. Le rendement de la dette américaine tient ses pics récents à 2,14% sur 10 ans, pendant que la dette allemande se stabilise à 0,36% sur la même durée. Le bitcoin navigue autour de 39 000 USD. Le LME reprend ce matin la cotation du nickel, qui avait été interrompue la semaine dernière après un épisode de volatilité insensé.

Les principaux changements de recommandations

  • ABN Amro : HSBC passe de conserver à achat à visant 14 EUR.
  • Ahold Delhaize : Kepler Cheuvreux passe de conserver à achat en visant 32,60 EUR.
  • Aker BP : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 257 à 267 NOK.
  • Alcon : UBS reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 85 à 83,50 CHF.
  • Anheuser-Busch Inbev : AlphaValue reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 74 à 72,40 EUR.
  • Atlas Copco : Jefferies passe de sousperformance à conserver en visant 520 SEK.
  • Carl Zeiss Meditec : UBS démarre le suivi à l'achat.
  • Crédit Agricole : HSBC passe d'achat à conserver en visant 11 EUR.
  • Delivery Hero : J.P. Morgan passe de surpondérer à neutre en visant 53,20 EUR.
  • Feintool : Research Partners passe de conserver à acheter.
  • Fresenius Medical Care : UBS démarre le suivi à l'achat.
  • Imperial Brands : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 1616 à 1595 GBp.
  • Kuehne + Nagel : BS passe de neutre à l'achat en visant 310 CHF.
  • Leonteq : Credit Suisse démarre le suivi à surperformance en visant 90 CHF.
  • NN Group : Deutsche Bank passe de conserver à achat en visant 48 EUR.
  • Novo Nordisk : Deutsche Bank passe de conserver à acheter en visant 850 DKK.
  • On the Beach : Jefferies passe de sousperformance à conserver en visant 240 GBp.
  • Swedish Match : Jefferies reste à sousperformance avec un objectif de cours relevé de 53 à 54 SEK.
  • Tecan : Credit Suisse réduit son objectif de cours de 600 à 480 CHF.
  • Zignago Vetro : Intesa passe d'accumuler à achat en visant 17,20 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Stellantis va réduire les équipes de production sur son site italien en raison d'une pénurie de puces électroniques.
  • TotalEnergies met en œuvre son retrait du Myanmar.
  • Bernard Arnault pourrait prolonger son mandat au-delà de l'âge actuel de la retraite chez LVMH.
  • Pernod Ricard poursuit ses rachats d'actions.
  • Dassault Systèmes proposera un dividende de 17 centimes par action pour l'exercice 2021.
  • Publicis se désengage de Russie.
  • Havas (Vivendi) prend le contrôle de Frontier Australia.
  • Peugeot Frères boucle l'acquisition du savoyard Tivoly à 42,05 EUR l'action.
  • Gaztransport & Technigaz obtient une commande de Hyundai Heavy Industries pour la conception des cuves de trois nouveaux méthaniers.
  • Voltalia cède à STOA une participation minoritaire dans sa plus grande centrale solaire, SSM1&2, au Brésil.
  • Hydrogen Refueling Solutions va coopérer avec Burckhardt dans les compresseurs pour stations hydrogène.
  • Witbe lance deux nouveaux modèles de Witbox.
  • Agripower labellisée Qualimétha.
  • Altur entre au capital de EMP Rotomoulage.
  • Verimatrix retenue pour sécuriser le service de streaming d'Alphazet.
  • Pharnext tire de nouvelles obligations convertibles.
  • Atari demande son transfert sur Euronext Growth.
  • Mersen, Precia, RocTool, CBo Territoria, Valbiotis et Assystem ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et autres)

Lectures