Les investisseurs ont passé des années à exhorter les banques centrales à injecter toujours plus d’argent dans le système financier, pour soutenir leurs paris risqués. Mais dans leur schizophrénie habituelle, ils pointent maintenant du doigt les banquiers centraux parce que cette énorme manne d'argent a contribué à créer un monstre inflationniste combattu par des hausses de taux punitives, qui pénalisent l'économie et par ricochet les marchés financiers.

Dans un excellent article publié lundi dans The Atlantic, le journaliste américain Derek Thomson illustre avec justesse la situation. Dans ce papier, intitulé "la fin du sponsoring du style de vie des Millenials", il raconte comment sa propre vie d'urbain connecté a été facilitée par les Uber, Peloton, DoorDash, WeWork et compagnie, autant de sociétés qui proposent depuis des années des services qui n'auraient pas été possibles sans l'argent gratuit. Des sociétés qui perdent chaque année des milliards de dollars. "Tant que l'argent n'était pas cher et que la Silicon Valley se disait que la prochaine entreprise de technologie grand public conquérante était à un tour de financement près, la meilleure façon pour une start-up de gagner de l'argent auprès des investisseurs en capital-risque était de perdre de l'argent en acquérant des milliards de clients", écrit Thomson. Maintenant, il faut passer à la caisse : ces entreprises sont rattrapées par les pénuries, le coût de la main d'œuvre et des approvisionnements. Résultat, elles augmentent leurs prix, mais cela suffira-t-il à les rendre rentables ? Rien n'est moins sûr.

En tout cas, "l'âge d'or du discount urbain-technologique à la demande a pris fin", estime le journaliste, et il a probablement raison. L'âge d'or de l'investissement décérébré aussi, probablement, même s'il ne faut pas sous-estimer la capacité des financiers à refabriquer à intervalle régulier des usines à gaz qui finissent par leur exploser à la figure.

Hier, Wall Street a limité la casse après un lundi noir. Le S&P500 n'a perdu que 0,38%, tandis que le Nasdaq tentait une petite incursion en territoire positif (+0,21%). En Europe, les indices avaient terminé en baisse plus marquée parce qu'ils avaient mieux résisté lundi. Les regards se tournent donc vers la décision de politique monétaire de la Fed ce soir (post séance boursière européenne). Depuis lundi, les financiers sont presque persuadés que la banque centrale va relever ses taux de 75 points de base, soit un triple tour de vis selon les standards habituels, qui veulent que les hausses de taux directeurs se fassent de façon bien plus progressive, soit 25 points de base à chaque réunion. Il faut remonter à 1994 pour trouver une telle hausse en une fois. Le patron de l'institution, Jerome Powell, va devoir s'employer à faire passer un double message, comme le souligne ce matin l'économiste d'ING Robert Carnell : "Nous maîtrisons l'inflation" et "Nous n'allons pas faire basculer l'économie dans la récession". Ce qui paraît presque impossible dans les faits, mais que la magie des mots pourrait rendre à peu près crédible.

Les marchés retiennent donc leur souffle. La dernière enquête mensuelle menée par Bank of America auprès des gérants montre qu'ils sont toujours un peu tétanisés et scotchés sur des positions telles que le cash (argent immédiatement disponible), la santé (sécurité) et les matières premières (bouclier contre l'inflation). La position la plus consensuelle du moment reste d'être exposé au pétrole, aux matières premières et à la hausse du dollar. La principale touche d'exotisme que s'autorisent les gérants est de s'exposer à certains marchés émergents. Autre information intéressante de cette enquête conduite la semaine dernière, le "Fed Put", c’est-à-dire le niveau qui pousserait la Fed à adapter sa politique monétaire pour éviter une déroute boursière, est à 3453 points sur le S&P500, selon la moyenne des retours des sondés. Pour information, c'est 7,5% en-dessous du niveau du jour (le mois dernier, l'écart était de 13,7% sur la base d'un Fed Put à 3529 points).

Ce matin, les indices d'Asie Pacifique prennent des chemins différents. La baisse l'emporte partout sauf en Chine où les statistiques de production et de consommation de mai sont ressorties meilleures que prévu. Les chiffres restent très volatils à cause de la politique zéro covid de Pékin, mais le signal est jugé positivement à Shanghai et à Hong Kong. C'est toutefois insuffisant pour tracter les autres places de la région. Les indicateurs avancés européens sont plutôt haussiers ce matin, mais sans grosse conviction. Comme je le répète souvent depuis plusieurs jours, la nervosité ambiante invalide parfois les tendances matinales, donc prudence sur ces indications. Le CAC40 a finalement ouvert en hausse de 1,3% à 6030 points.

Les temps forts économiques du jour

En attendant la décision de la Fed sur ses taux (20h00), grosse série de statistiques américaines avec les ventes de détail et l'indice Empire State (14h30) puis les stocks d'entreprises et l'indice des prix immobiliers (16h00), avant les stocks pétroliers (16h30). Tout l'agenda macro ici. Ce matin, la Chine a annoncé une contraction moins prononcés que prévu de ses ventes de détail en mai, tandis que la production industrielle s'est reprise.

L'euro se stabilise autour de 1,0444 USD. L'once d'or baisse à 1815 USD. Le pétrole reste d'une stupéfiante résistance, avec un Brent de Mer du Nord à 121,20 USD le baril et un brut léger américain WTI à 119 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans atteint à 3,43% pendant que le 3 mois accélère à 1,75%. Le bitcoin se négocie 21 350 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Airbus : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 140 à 150 EUR.
  • Akzo Nobel: AlphaValue reste à alléger avec un objectif de cours réduit de 74,40 à 70,80 EUR.
  • Alfa Laval : Nordea reprend le suivi à l'achat en visant 305 SEK.
  • Alliance Pharma : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 145 GBp.
  • Amundi : Crédit Suisse réduit son objectif de cours de 64 à 54 EUR.
  • Cranswick: Jefferies passe de conserver à acheter en visant 3650 GBp.
  • Datagroup : Baader Helvea passe d'alléger à accumuler en visant 69 EUR.
  • DS Smith: Jefferies reste à l’achat avec un objectif de cours réduit de 430 à 400 GBp.
  • Essity: AlphaValue reste à accumuler avec un objectif de cours réduit de 309 à 285 SEK.
  • Feintool : ZKB reprend le suivi à surperformance.
  • Getinge : Nordea passe d'acheter à conserver.
  • Hexagon : Nordea démarre le suivi à l'achat en visant 40 SEK.
  • Hornbach : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 150 à 125 EUR.
  • HSBC : Investec passe de conserver à acheter en visant 560 GBp.
  • Kering: Jefferies passe de conserver à acheter en visant 605 EUR.
  • Logitech: AlphaValue reste à l’achat avec un objectif de cours réduit de 93,60 à 87,60 CHF.
  • London Stock Exchange : UBS passe de neutre à achat en visant 8500 GBp.
  • MTU Aero Engines : Berenberg passe de conserver à acheter en visant 230 EUR.
  • Neste Oyj: Goldman Sachs passe d’acheter à neutre en visant 52 EUR.
  • Renewi : Oddo BHF démarre le suivi à surperformance en visant 949,51 GBp.
  • Roche: Mirabaud reprend le suivi à l’achat en visant 278,29 CHF.
  • Rolls-Royce : Berenberg passe d'acheter à conserver en visant 100 GBp.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Bruno Le Maire a déclaré mardi que "toutes les option" sont sur la table pour Electricité de France.
  • TotalEnergies et La Compagnie des Bois du Gabon s'associent pour développer un nouveau modèle de gestion forestière.
  • Vinci signe un contrat pour la ligne 18 du Grand Paris.
  • Stellantis va licencier des salariés à partir de la semaine prochaine dans son usine d'emboutissage de Sterling Heights, dans le Michigan.
  • Euronext annonce le succès de la migration de son centre de données principal.
  • 60% des droits au dividende d'Elis ont été exercés en actions.
  • Veolia, Esker, Roche Bobois tiennent leurs assemblées générales.
  • Drone Volt prend du retard dans le bouclage des opérations avec Pragma.
  • Lhyfe et les Chantiers de l’Atlantique signent un protocole d’accord pour développer la filière de l’hydrogène vert renouvelable en offshore.
  • Alan Allman signe une "obligation Relance" avec Turenne Groupe.
  • Oeneo, Vente-Unique et Groupe Partouche ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Compass va réduire ses effectifs d'environ 10% dans un contexte de ralentissement du marché immobilier américain.
  • BP Plc pend 40,5% et devient l'opérateur d'un projet d'énergie solaire et éolien australien destiné à produire de l’hydrogène vert.
  • Fedex s’est envolé hier de 14% sur fond de projet de fonds activiste.
  • Deutsche Bank ouvre sa propre enquête sur les accusations de "greenwashing" visant DWS.
  • Softbank pourrait demander une ligne de cotation secondaire à Londres pour ARM.
  • Clariant affiche une vive croissance au T1. Les objectifs de moyen terme sont confirmés.
  • WH Smith vise le haut de la fourchette des attentes pour ses résultats annuels.
  • MicroStrategy dit ne pas avoir reçu d'appel de marge pour son prêt Silvergate, même si le prix du bitcoin s’est effondré.
  • Ford rappelle 49 000 EV Mach-E aux États-Unis en raison d'une perte de puissance potentielle.
  • Hybe chute en Corée sur fond de dissensions dans le groupe de K-Pop BTS.
  • Toyota, T-Mobile US, Sonova, International Consolidated Airlines et Konecranes tiennent leurs assemblées générales.
  • Principales publications du jour : Hennes & Mauritz, Clariant, Whitbread, WH Smith, BabcockTout l'agenda ici.

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