Londres (awp/afp) - Blé, café, coton... Les phénomènes climatiques extrêmes de plus en plus fréquents agitent les marchés agricoles en amplifiant les mouvements de prix et en faisant durablement monter celui de certaines denrées.

Ce sont "les conditions météorologiques qui ont suscité des tensions sur le marché" ces derniers temps, constate auprès de l'AFP Geordie Wilkes, investisseur chez Sucden.

Après un épisode de gel historique au Brésil en juillet, le café arabica a par exemple vu ses prix s'enflammer de 35% en cinq séances et s'est installé depuis à ces sommets, à plus de 2 dollars la livre sur l'ICE Futures US de New York.

Quelques mois plus tôt, un épisode de sécheresse dans le pays avait fait grimper les cours du maïs de plus de 20% en sept séances pour atteindre plus de 7,5 dollars le boisseau (environ 25 kg) sur la place d'échanges de Chicago, avant de refluer.

La sécheresse qui avait touché à la fin du printemps le sud-ouest du Canada et les plaines du nord des Etats-Unis avait également enflammé les prix du blé, qui se maintiennent encore aujourd'hui à un niveau historiquement élevé, à près de 300 dollars la tonne de blé tendre sur le marché Euronext.

M. Wilkes s'attend à devoir surveiller ces épisodes de plus en plus, d'autant que, selon le dernier rapport des experts de l'ONU sur le climat (Giec) publié cet été, la fréquence de ces phénomènes météorologiques extrêmes - inondations, incendies, typhons, sécheresses... - va s'accélérer.

Dépendance géographique

"La fréquence de ce type d'événements ces dernières années nous incite à penser que les prix des produits agricoles resteront élevés" à l'avenir, estime Carlos Mera, analyste chez Rabobank.

La forte volatilité est amplifiée pour les denrées réparties inégalement sur la planète et dépendante d'une seule principale zone de production, comme c'est le cas pour l'arabica, mais aussi le sucre, au Brésil.

"Parce qu'il est principalement cultivé sur les hauts plateaux (du Brésil), où les conditions météorologiques peuvent fluctuer plus fortement et où les pertes de récoltes peuvent être plus graves", le café est la matière première agricole la plus sujette à ce type de sursauts, explique Carsten Fritsch, analyste de Commerzbank.

Les secousses de prix sont également rendues plus fréquentes par les limites des outils qu'utilisent les investisseurs pour anticiper les conditions climatiques dans les principales zones de production.

"Nous constatons que les prévisions météorologiques à courte et moyenne échéance sont moins fiables", déplore auprès de l'AFP un investisseur sur le marché du café, "car basées sur des historiques de moins en moins valables".

"Cela ajoute de l'incertitude et contribue à des fluctuations de prix plus importantes", ajoute-t-il, citant des écarts "de plus de 10 cents pour l'arabica en l'espace d'une seule séance, ce qui est énorme".

Effet domino

Certaines matières premières agricoles sont également influencées indirectement par ces phénomènes climatiques extrêmes et plus fréquents.

Les passages successifs des ouragans dans le Golfe du Mexique à la fin de l'été ont par exemple provoqué des dégâts sur les installations pétrolières américaines au large et à terre.

L'effet de cette baisse soudaine et inattendue de l'offre de brut chez le premier producteur mondial, dans un marché déjà contraint, a fait flamber le cours du pétrole brut, ce qui a eu répercussions directes sur le prix du sucre.

Lorsque le prix de l'or noir monte, cela favorise l'utilisation de la canne pour produire de l'éthanol, et limite d'autant le sucre disponible sur le marché, mais aussi sur le prix du coton, dont la demande est encouragée face aux fibres synthétiques devenues plus chères.

Le cours d'une livre de coton tourne toujours autour de 1,20 dollar cette semaine, un prix plus vu depuis plus de dix ans.

afp/jh