Je me demande comment on appellera la crise en cours dans les manuels d'économie dans les années à venir. Après la bulle internet ("dot.com bubble" pour les anglosaxons) de la fin des années 1990 et la crise financière mondiale (global financial crisis) de 2007-2008, on parlera probablement de crise de l'inflation ou de crise des prix de 2022. A ce stade, on peut juste espérer que le qualificatif retenu ne sera pas flanqué de "2022/2023" voire de "2022/2024". Pour le reste, l'économie mondiale a l'air d'être complètement déréglée et il ne se passe pas un jour sans qu'un nouveau désordre apparaisse. On se prendrait presque à regretter les bonnes vieilles tensions sino-américaines des années Trump, les trépignements chroniques du jovial Kim Jong-Un ou les boulettes de politique monétaire de 2018.

La semaine qui s'achève aujourd'hui est franchement glauque pour les investisseurs. Les indices se sont fait pulvériser et les cachettes se font rares, d'autant que les marchés actions et obligataires sont logés à la même enseigne. Hier, les places européennes ont généralement perdu plus de 1%, tandis que Wall Street, sans terminer au plus bas de la journée, a pris une nouvelle gifle. Le Nasdaq 100 s'est enfoncé de 2,9% pour porter son passif annuel à 31,6%.

L'actualité financière tourne autour du relèvement des taux directeurs indiens, conformément aux attentes, et de la publication d'indicateurs PMI chinois pour septembre qui n'apportent pas grand-chose aux débats en confirmant que la dynamique économique est au point mort dans le pays. La semaine a apporté son lot de nouvelles bizarres. On a par exemple appris, j'en parlais hier, que le gouvernement britannique est capable de marquer contre son camp dans la lutte contre l'inflation. Ou que la foudre des taxes exceptionnelles sur les profits peut frapper n'importe où, par exemple sur les éleveurs de saumon en Norvège. Ou encore que les photos de surface suite au sabotage d'un gazoduc sous-marin sont d'une esthétique raffinée. Ce matin, si l'on fait abstraction des informations majeures comme le soutien apporté par le footballeur Neymar au président brésilien sortant Bolsonaro, il faut noter que la Russie a officiellement annexé quatre régions d'Ukraine et que les dégâts de l'ouragan Ian dans le sud-est des Etats-Unis sont considérables (plus considérables que ça).

Dans un autre registre, un second baromètre du marché a déçu. Après Apple en milieu de semaine – qui a renoncé à accroître sa production d'iPhone face au contexte économique - c'est Nike qui se retrouve pointé du doigt. Le groupe a expliqué hier soir après la clôture de Wall Street que ses résultats seront affectés par les ristournes pour déstocker et le dollar fort, tout en expliquant que la demande ne faiblit pas. Les investisseurs, qui ne sont pas des perdreaux de l'année, ont vite conclu que la coordination des phrases "la demande ne faiblit pas" / "ristournes pour déstocker" ne fonctionne pas et qu'il eut mieux fallu dire "la demande est faiblarde donc on est forcés de faire des promotions pour écouler le stock". Ce qui explique probablement pourquoi Nike perd 9% hors séance. En France, le saut vers la qualité s'est traduit par un bond de 10% de l'action Atos hier. Blague à part, l'entreprise a reçu et repoussé une offre à 4,2 Mds€ pour sa division cybersécurité alors qu'elle ne capitalise que 960 M€ en bourse, ce qui explique cette petite poussée spéculative.

La séance du jour sera encore marquée par les statistiques et l'inflation. Notamment en Europe où Eurostat dévoilera à 11h00 sa première estimation de l'évolution des prix dans l'UE en septembre. Après la mauvaise surprise de l'Allemagne en la matière hier (10% de hausse sur un an), il n'y a sans doute rien de bon à attendre, en dehors de conforter le marché sur la trajectoire que vont prendre les taux de la BCE dans les mois à venir. Aux Etats-Unis, il sera aussi question de prix avec l'inflation "PCE" d'août, cet indicateur qui est très suivi par la Fed pour sa politique monétaire. Il y aura aussi la seconde lecture de l'indice de confiance de l'Université du Michigan, qui prend le pouls des consommateurs américains.

Ce matin, c'est la déprime en Asie Pacifique, où le Nikkei 225 japonais perd 2% en clôture et où l'ASX 200 australien rend 1,2%. Le Hang Seng tente de se stabiliser après s'être effondré hier. Les indicateurs avancés européens sont proches de l'équilibre, mais la nervosité ambiante peut faire pencher la balance de n'importe quel côté d'ici l'ouverture. Ce fut d'ailleurs le cas hier puisque les indicateurs de préouverture bien installés dans le vert se sont brutalement retournés pour entraîner une ouverture baissière. Le CAC40 démarre la séance en hausse de 0,5% à 5705 points.

Les temps forts économiques du jour

Beaucoup de statistiques pour terminer la semaine, en particulier l'inflation européenne de septembre (11h00), avant aux Etats-Unis les revenus et dépenses des ménages (14h30) et l'inflation PCE (16h00). Tout l'agenda macro ici. Cette nuit, le Japon a fait état d'une production industrielle plus élevée que prévu en août, tandis que les indicateurs PMI sont contradictoires : le PMI manufacturier officiel est à 50,1 points et le PMI Caixin à 48,1 points, en deçà des attentes. Le PMI officiel des services est lui aussi sous les prévisions à 50,6. La banque centrale indienne a relevé son taux directeur de 50 points de base, comme prévu.

L'euro remonte à 0,9801 USD. L'once d'or profite aussi du reflux du billet vert à 1661 USD. Le pétrole consolide son rebond, avec un Brent de Mer du Nord à 87,99 USD le baril et un brut léger américain WTI à 80,93 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans se stabilise à 3,79%. Le bitcoin évolue autour de 19 400 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Amadeus : Redburn démarre le suivi à l'achat.
  • Burberry : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 1880 à 1900 GBp.
  • Clariant : Crédit Suisse passe de neutre à surperformance en visant 23 CHF.
  • Entain : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 2250 à 2025 GBp.
  • Global Bioenergies : Kepler Cheuvreux reste acheteur avec un objectif réduit de 8,40 à 6,50 EUR.
  • Hornbach : Kepler Cheuvreux reste à l'achat avec un objectif réduit de 120 à 110 EUR.
  • Hugo Boss : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 57,80 EUR.
  • Just Eat : Berenberg reste à conserver avec un objectif relevé de 16,30 à 17,60 EUR.
  • KPN : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 2,99 à 2,90 EUR.
  • Mitchells & Butlers : Liberum reste à l'achat avec un objectif réduit de 280 à 205 GBp.
  • Polypeptide : Baader Helvea passe d'alléger à accumuler en visant 35 CHF.
  • Quadient : AlphaValue reste à l'achat avec un objectif réduit de 27,60 à 23,60 EUR.
  • Rational AG : Berenberg reste à l'achat avec un objectif réduit de 975 à 860 EUR.
  • Rockwool : Morgan Stanley passe de souspondérer à pondération ligne en visant 1550 DKK.
  • Solaria Energia : Berenberg reste à l'achat avec un objectif réduit de 24 à 21,50 EUR.
  • Svenska Cellulosa : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 169 à 160 SEK.
  • Symrise : UBS reste à l'achat avec un objectif réduit de 127 à 121 EUR.
  • Temenos : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 87 à 74 CHF.
  • Verbund : Société Générale passe d'acheter à conserver en visant 97,50 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Thales va payer un acompte sur dividende de 0,70 EUR par action, détaché le 6 décembre.
  • Société Générale acquiert la fintech PayXpert dans les paiements.
  • TotalEnergies renforce la sécurité de ses actifs pétroliers après une activité inhabituelle des drones près d'une plateforme danoise.
  • Atos ne donne pas suite à une offre de rachat de 4,2 Mds€ sur sa division cybersécurité Evidian, présentée par OnePoint et ICG.
  • Luc Rémont (Schneider Electric) proposé pour prendre les commandes d'Electricité de France.
  • Valneva va finalement lever 102,9 M€ au lieu de 40 M€ dans le cadre de son augmentation de capital réservée, en raison d'une demande forte.
  • Gaztransport & Technigaz se voit confier par DSME la conception des cuves de dix nouveaux méthaniers. Par ailleurs, Elogen (Gaztransport & Technigaz) reçoit 86 M€ de subvention dans le cadre du programme français sur l'hydrogène.
  • Groupe Gorgé finalise l’acquisition de iXblue et lance le rapprochement de ses équipes avec celles d’ECA Group.
  • Lumibird acquiert Innoptics, entreprise spécialisée dans l'encapsulation de composants optoélectroniques.
  • La date de finalisation de l'accord entre Olympique Lyonnais et Eagle Football décalée au-delà du 30 septembre.
  • Arcure réalise sa plus importante livraison de Blaxtair pour un acteur majeur sur le marché américain.
  • Genfit boucle l'acquisition de Versantis.
  • Kaufman noté "BBB-" par Fitch Rating.
  • Audacia entre au capital d'aerial coboticus.
  • Amoeba annonce que l'Agence américaine pour la protection de l'environnement (US EPA) a émis une pré-décision favorable suite à l'évaluation du dossier de demande d'autorisation du Lysat de Willaertia magna C2c Maky comme substance active de biocontrôle (biopesticide) utilisable en agriculture.
  • Gaussin signe un accord pour une offre de Transport "As A Service" en Grèce incluant deux stations H2 et la conversion à l’hydrogène d’un bateau à grande vitesse.
  • Aurea, Jacques Bogart, Amoeba, Wedia, Graines Voltz, Makheia, Enertime, Groupe Berkem, Genomic Vision, Abionyx, Lacroix, Ateme, ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Nike plonge de 9% hors séance après avoir publié ses trimestriels. Les résultats sont grevés par les remises destinées à écouler ses stocks et la hausse du dollar.
  • Micron est stable post-séance après des résultats plus élevés que prévu.
  • Orsted conclut la vente de sa participation de 50% dans le parc éolien offshore Hornsea 2 au Royaume-Uni pour un montant de 3,3 Mds$.
  • Meta Platforms gèle ses embauches et prévient ses employés qu'une restructuration approche.
  • Barclays va payer 361 M$ pour couvrir les dommages liés à des erreurs de ventes de titres aux États-Unis.
  • Les entrées de Cineworld en berne au T3.
  • Swiss Re échange sa participation dans Granular Insurance contre une participation dans Verily, une entreprise d'Alphabet.
  • Softbank va vendre la totalité de sa participation de 5% dans Sinch.
  • ABB vend ses dernières parts dans Hitachi Energy à Hitachi.
  • Principales publications du jour : Pennon, Robertet, Floridienne… Tout l'agenda ici.

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