"Pouvez-vous nous présenter DONTNOD en quelques mots et son positionnement ?
DONTNOD est un studio de développement de jeux vidéo, spécialisé dans les jeux narratifs. Il est au sommet de la chaîne de valeur du jeu vidéo : nous concevons les idées et développons les jeux avec des équipes spécialisées sur toutes les phases de la production. La société, créée en 2008 et basée à Paris, compte plus de 150 collaborateurs, avec quatre chaînes de production qui travaillent en parallèle sur quatre jeux différents.
Nous avons créé des partenariats forts avec des éditeurs internationaux pour le financement de la production, la distribution et la communication. Ce sont des géants de l’industrie classés dans le top 10 mondial : Capcom, Square Enix, Focus Home Interactive, Bandaï Namco et un cinquième éditeur qui reste confidentiel pour le moment.
DONTNOD affiche une belle croissance avec un chiffre d’affaires de 9,7 millions d’euros en 2017 sur la base des comptes retraités, en hausse de 33 % et un bénéfice net de 2,1 millions d’euros.

Quels jeux vidéo ont fait votre renommée ?

Notre premier jeu Remember Me, édité par Capcom, qui a bénéficié d’un beau succès critique à sa sortie en 2013 et qui s’avère, sur la longueur/dans le temps, être également une réussite commerciale puisqu’aujourd’hui nous touchons des royalties dessus. Mais le jeu qui a vraiment fait grandir la notoriété de DONTNOD est le blockbuster Life Is Strange, édité par Square Enix. Ce jeu d’aventure en cinq épisodes - un modèle particulièrement bien adapté à la distribution digitale - a créé un véritable phénomène mondial, avec plus de 3 millions de joueurs payants et 5,6 millions de téléchargements sur PC.

Dans quels pays vos jeux sont-ils distribués ?

Nos partenariats avec des éditeurs internationaux nous permettent de bénéficier de leurs forces commerciales et de pouvoir toucher les joueurs du monde entier. Plus de 50 % de nos joueurs se trouvent sur les territoires occidentaux (Europe de l’Ouest et Amérique du Nord). Nous sommes aussi présents en Asie avec 18 % de nos joueurs ainsi que sur les nouveaux territoires de jeux, comme l’Europe de l’Est (13 %), l’Amérique Latine (12 %) mais aussi en Afrique et au Moyen-Orient.

Sur quels supports sont-ils disponibles ?

Nos jeux sont multi-écrans. Ils sont disponibles sur les consoles classiques (Playstation, Xbox), ordinateurs (PC et Mac) et sur les plateformes mobiles (smartphone et tablette). Nous avons d’ailleurs reçu le prix du public il y a quelques semaines à la Game Developers Conference (GDC) de San Francisco pour Life Is Strange (qui totalise plus de 200 récompenses dans le monde).

Comment fonctionne votre modèle économique ?

Nous avons un modèle économique mixte qui repose sur deux types de contrat de financement de nos productions. Dans le contrat classique, l’éditeur prend en charge tous les coûts de développement et de marketing du jeu en nous versant une redevance à l’avancement. Il nous reverse des royalties une fois qu’il a récupéré tous les frais engagés, ce que l’on appelle dans notre secteur le recoupement de la redevance forfaitaire. C’est un contrat très sécurisant et qui marche bien, mais il est peu rémunérateur car nous touchons entre 15 et 20 % des royalties sur la durée du jeu.
Pour améliorer la rentabilité, nous avons mis en place il y a deux ans un autre type de contrat pour le développement du jeu Vampyr : le contrat de co-production. Il est similaire au contrat classique sur la durée de production mais le studio prend en charge une partie des coûts de développement (entre 20 et 40 %). Cela nous permettra de neutraliser l’effet du recoupement forfaitaire et de toucher des royalties dès la sortie du jeu. Selon nos estimations, un contrat de co-production nous rapportera des revenus jusqu’à 6 fois supérieurs au contrat classique. L’intérêt de ce modèle est aussi une co-détention de la propriété intellectuelle (entièrement détenue par l’éditeur dans le contrat classique).
Cependant nous ne souhaitons pas remplacer le modèle de financement classique par le modèle de co-production. Nous préférons fonctionner avec un modèle économique équilibré, où les risques sont maîtrisés : nous ne voulons pas plus de 50 % de contrats en co-production et nous n’irons pas au-delà de 40 % de parts de co-production par jeu.

Pour quelles raisons introduisez-vous DONTNOD en Bourse aujourd’hui ?

Nous introduisons DONTNOD sur Euronext Growth au travers d’une augmentation de capital pour accélérer notre croissance et capter plus de valeur par jeu.
La levée de fonds servira principalement à étoffer notre catalogue avec plus de jeux, à optimiser nos chaînes de production en internalisant des fonctions externes comme la motion capture et à augmenter nos royalties par jeu via la co-production.
Un quart des fonds levés viseront à saisir des opportunités de croissance externe. Nous identifions des studios qui ont moins de succès que nous mais qui ont des talents et avec l’application de nos méthodes nous pourrions constituer une 5e chaîne de production. Nous sommes très actifs dans différents clusters français, le syndicat national du jeu vidéo et nous rencontrons régulièrement des développeurs du monde entier, notamment à l’occasion de trois grands rendez-vous : le GDC à San Francisco, l’Electronic Entertainment Expo (E3) à Los Angeles en juin et la Gamescom à Cologne en août. Cependant nous ne sommes pas dans l’urgence. Il est, avant tout, important pour nous de réaliser une croissance maîtrisée.

Combien espérez-vous collecter à l’occasion de cette introduction en Bourse ?

Nous visons une levée de 20,1 millions d’euros en milieu de fourchette qui pourra être portée à 26,6 millions d’euros si la clause d’extension et l’option de surallocation sont exercées.
Nous sommes confiants sur cette levée de fonds sachant que nous avions déjà des engagements pour plus de 10 millions d’euros avant l’ouverture de la période de souscription. Trois nouveaux investisseurs se sont engagés sur un total de 7,5 millions d’euros : Keren Finance, Ostrum Asset Management et Turenne Capital. Et notre actionnaire majoritaire, via Modern Vision Entertainment, va souscrire pour un montant de 3,1 millions d’euros par compensation de créances.
Notre confiance est confortée par celle de nos actionnaires, puisqu’il n’y a aucune cession de parts à l’occasion de cette opération.

Quelles sont vos perspectives à court-moyen terme ?

Nous avons de belles perspectives de développement sur les prochaines années compte tenu de notre pipeline de jeux d’ici à 2020. A commencer par la sortie programmée le 5 juin de Vampyr, un des jeux les plus attendus de 2018 par la presse et les joueurs du monde entier. Suivra le nouvel opus de Life Is Strange - dont la date de sortie est encore confidentielle - également très attendu, comme souvent pour les suites de blockbuster qui rencontrent généralement un beau succès commercial. Nous sommes aussi en cours de production avec l’éditeur japonais Bandaï Namco, qui est venu nous voir afin d’étoffer son catalogue avec un jeu dans l’ADN de DONTNOD. Un quatrième projet est en cours de développement avec un éditeur confidentiel et nous en avons deux autres en conception pour la période 2020-2022.

Comment se porte le marché des jeux vidéo ?

C’est un marché en excellente santé. Il a enregistré en France une année record en 2017 avec un chiffre d’affaires de 4,3 milliards d’euros, en hausse de 18 %. Le marché mondial du jeu vidéo connaît aussi une croissance très soutenue depuis plusieurs années. Son chiffre d’affaires, qui s’élève à 120 milliards de dollars en 2017, dépasse celui du cinéma depuis plus de 10 ans maintenant. DONTNOD bénéficie à plein de ce vent favorable.

Comment DONTNOD se démarque-t-il dans ce secteur concurrentiel ?

Le jeu vidéo est un secteur concurrentiel mais ce qui est important pour un studio est d’être capable de passer les barrières à l’entrée, ce que DONTNOD a démontré par sa capacité à sortir des succès d’envergure mondiale. Nous avons aujourd’hui plusieurs éditeurs du top 10 à nos côtés. Au départ, nous allions les solliciter. Maintenant, ce sont eux qui cherchent à travailler avec nous pour avoir des jeux développés par DONTNOD. Car au-delà de l’expérience de jeu, notre ADN repose sur des talents créatifs forts pour développer des jeux différents, porteurs de valeurs. Chacun traite de problématiques de société qui touchent la jeune génération à l’entrée à l’âge adulte mais aussi des personnes plus âgées qui se retrouvent dans les thématiques abordées. Des sujets que l’on trouve dans les séries TV mais qui n’existaient pas dans les jeux vidéo jusque-là, tels que l’amitié, mais aussi des sujets plus sombres comme le harcèlement sur les réseaux sociaux ou le problème des armes dans les lycées et collèges américains.

Quels sont vos atouts pour poursuivre votre succès ?

Notre ADN créatif et unique déployé sur tous nos jeux, notre savoir-faire aujourd’hui reconnu dans le monde entier grâce notre blockbuster Life Is Strange, nos partenariats avec des éditeurs internationaux nous permettant de toucher les joueurs partout dans le monde. Nous sommes confiants en l’avenir et heureux de franchir une nouvelle étape avec l’introduction en Bourse pour poursuivre sur notre lancée."