Pour jauger de la réaction des investisseurs américains à une décision de politique monétaire de la Fed, il suffit généralement de regarder la couleur des indices à la clôture de la séance du jour de l'annonce. En l'occurrence, Wall Street a perdu du terrain hier, avec un Nasdaq 100 à -0,8% et un S&P500 à -0,6%. Un coup d'œil au graphique de la journée donne un peu de granularité au scénario : les indices gagnaient du terrain jusqu'à 20h00 pile, moment où ils sont descendus de plusieurs étages à la fois. Cela correspond à l'horaire de la publication de la décision de la banque centrale américaine. Il y a bien eu un sursaut pendant la conférence de présentation des choix de la Fed qui a suivi, mais il a été de courte durée. Au final, Wall Street a terminé en baisse, mais pas sur ses plus bas non plus.

Quels enseignements peut-on en tirer ? Eh bien d'abord que la retenue dont avaient fait preuve les investisseurs mardi à l'annonce d'une inflation moins défavorable que prévu aux Etats-Unis était plutôt bien vue. D'habitude, ces petits polissons ont tendance à surréagir, mais pas cette fois. Le ton employé par la Fed leur donne raison. Aux dires des gens sérieux, la Fed a fait ce que le marché attendait, c’est-à-dire qu'elle a relevé ses taux d'un demi-point pour les porter entre 4,25 et 4,50%. C'est encore une hausse maousse, mais moins que les quatre précédentes qui étaient de 75 points de base. Mais en parallèle, le discours est resté celui du père Fouettard et pas du père Noël. Les financiers espéraient un ton plus neutre. D'ailleurs, légère digression : cela rend d'autant plus étranges les déclarations du patron de la Fed Jerome Powell le 1er décembre dernier, déclarations qui avaient réveillé la libido des investisseurs en étant à contrecourant des prises de positions plus austères des autres membres de la banque centrale. JayJay était peut-être un peu éméché ce jour-là. Ou peut-être qu'il s'est simplement pris les pieds dans le tapis dans sa communication. Je referme cette parenthèse pour me concentrer sur ce qui a été dit hier.

En gros, la Fed a bien modéré le rythme de ses hausses de taux mais elle a aussi prévenu que le nombre de tours de vis à venir est plus élevé que ce que pense le marché. Elle a aussi ajusté ses projections économiques : moins de croissance et davantage d'inflation en vue en 2023 par rapport aux prévisions formulées en septembre. Je vous disais lundi que les investisseurs aiment bien regarder les pronostics des membres du comité de politique monétaire qui sont publiés chaque trimestre. Ceux qui ont été révélés hier sont intéressants. Le pic médian envisagé par ce beau monde pour les taux directeurs l'année prochaine est à 5,125% alors que le marché misait sur 4,875%. Mais si 10 membres de la Fed s'accordent sur ce point, seuls 2 pensent qu'il sera plus faible. Les 7 autres le voient plus haut. Par ailleurs, et Powell l'a dit pendant la conférence, il ne devrait pas y avoir de baisse de taux l'année prochaine, alors qu'une partie du marché misait sur ce scénario, naturellement plus favorable aux actifs à risques, donc aux actions.

Pour résumer, quelques expressions glanées çà et là pour décrire le comportement de la banque centrale, qui valent souvent plus qu'un long discours.

  • Version dépouillée : "La Fed est passée à des hausses de taux plus faibles, mais elle n'est pas près d'en finir".
  • Version médicale : "Le remède économique, bien qu'amer, fait partie du prix à payer pour les erreurs politiques commises ces dernières années".
  • Version festive, ma préférée : "La Fed emporte le saladier de punch juste au moment où la fête commençait".
  • Version optimiste : "La fin est proche pour les hausses de taux, mais la fin n'est pas encore là".
  • Version pessimistes : "La théorie d'un atterrissage économique brutal a gagné du terrain".

Dans le reste du monde, la Chine a publié ce matin des statistiques, excusez ma trivialité, assez dégueulasses. En particulier une contraction de ses ventes de détail de 5,9% en novembre, nettement plus marquée que ce qui était attendu (-3,9%). La hausse de la production industrielle s'est limitée à 2,2%, là où le marché espérait 3,4%. Je radote mais méfions-nous quand même du retour de manivelle du passage du "zéro-covid" au "zéro-contrainte" dans un pays où une explosion des contaminations pourrait provoquer des nouveaux désordres économiques et affecter des chaînes d'approvisionnement toujours fragiles. En Europe, les dirigeants politiques de l'UE discutent aujourd'hui de la façon dont ils peuvent soutenir les industries de leurs pays, prises en étau entre la flambée des prix de l'énergie, des contraintes ESG que n'ont pas à subir leurs rivales étrangères et les efforts déployés par "l'ami" Biden pour attirer la production aux Etats-Unis. C'est bien d'y réfléchir, même si c'est fort tardif.

La journée sera marquée par une nouvelle activité macroéconomique intense. Ainsi trois banques centrales se prononcent sur leurs taux (BNS, BoE, BCE), avant une grosse salve d'indicateurs importants aux Etats-Unis entre 14h30 et 16h00.

En Asie Pacifique, la baisse domine dans des proportions modestes à Tokyo (-0,4%) et à Shanghai (-0,2%) et un peu plus fortes à Sydney (-0,64%), Séoul (-1,2%) et Hong Kong (-1,2%). Les indicateurs avancés européens sont modérément baissiers.

Les temps forts économiques du jour

Encore une grosse journée "macro", avec trois décisions de banques centrales : en Suisse (9h30), en Grande-Bretagne (13h00) et en Europe (14h15). Aux Etats-Unis, place à l'indice Empire Manufacturing, à l'indice Philly Fed, aux inscriptions hebdomadaires au chômage et aux ventes de détail (14h30), puis à la production industrielle (15h15) et aux stocks des grossistes (16h00). Tout l'agenda macro ici. Ce matin, la Chine a annoncé une contraction de ses ventes de détail plus marquée que prévu en novembre et un rebond de la production industrielle décevant.

L'euro a signé un pic au-dessus de 1,07 avant de revenir à 1,0648 USD. L'once d'or redescend à 1790 USD. Le pétrole consolide ses gains récents, avec un Brent de Mer du Nord à 82,01 USD le baril et un brut léger américain WTI à 76,53 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans se maintient autour de 3,49%. Le bitcoin s'échange toujours autour de 17 700 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Ariston : Morgan Stanley démarre le suivi à pondération ligne en visant 10 EUR.
  • Big Yellow : Goldman Sachs passe de neutre à achat en visant 1250 GBp.
  • Capelli : GreenSome Finance reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 29 à 17,90 EUR.
  • Compagnie des Alpes : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 23 à 24 EUR.
  • Flatexdegiro : Morgan Stanley passe de souspondérer à pondération ligne en visant 7,10 EUR. Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 18,50 à 11 EUR.
  • Inditex : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 32 à 33,50 EUR.
  • Logitech : UBS reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 68 à 70 CHF.
  • Leonardo : AlphaValue reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 12,54 à 12 EUR.
  • Tod's : Goldman Sachs reprend le suivi à neutre en visant 35,20 EUR.
  • TotalEnergies : Exane BNP Paribas passe de surperformance à neutre en visant 68 EUR.
  • UBS : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 27,30 à 30,20 CHF.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Sanofi annonce que Dupixent est le premier et seul médicament ciblé approuvé par la Commission européenne pour le traitement du prurigo nodulaire.
  • Technip Energies va concevoir un important projet d'éoliennes offshore.
  • Biomérieux relève ses perspectives financières pour 2022 et 2023.
  • Stef présente son plan stratégique 2022/2026.
  • L'Arcom met en demeure Eutelsat de cesser la diffusion de chaînes russes.
  • Hydrogène de France et Deezer musclent leur management.
  • Signaux Girod cède sa filiale espagnole Girodservices.
  • Amoéba émet une nouvelle tranche de convertibles.
  • Valbiotis signe un partenariat de recherche dans le microbiote intestinal avec l'Université Clermont Auvergne.
  • Les actions TEAM seront radiées le 16 décembre après l'offre de rachat volontaire.
  • Pixium Vision confirme l'annonce des résultats de son étude pivot PRIMAvera d'ici à la fin 2023 et envisage la soumission réglementaire en Europe au premier semestre 2024. Et
  • Patrice Angot prend la direction générale d'Erold.
  • Plastivaloire, Graines Voltz et Capelli ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • L'Allemagne approuve l'achat de F-35 à Lockheed Martin pour 10 Mds€.
  • Les actionnaires mécontents de HSBC lancent une nouvelle campagne pour une scission.
  • Elon Musk vend 22 millions d'actions Tesla d'une valeur de 3,6 Mds$.
  • Microsoft va mettre en place une "frontière de données" pour les clients de l'UE à partir du 1er janvier.
  • Implenia démarre les travaux d'excavation à l'entrée du tunnel Lyon-Turin, côté français.
  • Carlsberg rachète la brasserie canadienne Waterloo Brewing pour 106 M$.
  • Blackstone envisagerait de racheter le laboratoire Ayumi Pharma pour 1 Md$, selon Bloomberg
  • British American Tobacco va cesser définitivement ses activités dans son usine suisse en 2023.
  • Cofinimmo va construire une extension à une maison de repos et de soins en exploitation en Finlande.
  • Le bénéfice trimestriel du constructeur de maisons Lennar augmente de 11%.
  • Ford Motor et Contemporary Amperex Technology envisagent de construire une usine de batteries dans le Michigan ou en Virginie.
  • Valora obtient le feu vert pour l'exploitation d'autres magasins de stations-service Oel-Pool.
  • Chubb, Albemarle et Burberry détachent des coupons.
  • Principales publications du jour : Adobe, JabilTout l'agenda ici.

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