Dans le volet judiciaire de l'affaire, le Parquet national financier (PNF) a ordonné une enquête préliminaire, selon Le Monde, à l'origine des révélations au même titre que l'émission Cash investigation, sur France 2.

En janvier, le patron du groupe italien Passavant a déposé une plainte contre X à Paris pour "entente illicite", "corruption" et "trafic d'influence" afin de dénoncer les manoeuvres de concurrents français qui auraient tenté de l'écarter d'un marché et par la suite de le dissuader de former un recours, moyennant une compensation représentant une trentaine de millions d'euros.

Joint par Reuters, l'avocat de l'entrepreneur italien Marco Schiavio, Me Pierre-Alexandre Kopp, dit avoir "plusieurs preuves assez éclairantes" sous la forme d'enregistrements de conversations réalisés clandestinement en 2015 par son client.

"Si les faits sont avérés, on assiste à un montage assez nouveau puisqu'on aurait d'une part une entente dans la répartition des marchés et d'autre part on aurait une entente au moment de la tentative de corruption", a-t-il dit.

Autrement dit, il pourrait s'agir selon lui d'"une conjonction entre un cartel qui se partagerait le marché et par ailleurs serait capable de discuter ensemble de savoir comment corrompre quelqu'un pour l'empêcher de déposer une plainte".

ENREGISTREMENTS CLANDESTINS

Le litige porte sur la refonte d'une usine "de prétraitement" à Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine), un marché à 341 millions d'euros attribué par la Syndicat interdépartemental pour l'assainissement de l'agglomération parisienne (Siaap) à un groupement comprenant OTV, filiale de Veolia.

Les dirigeants d'OTV dont les noms apparaissent dans l'article du Monde, Patrick Barbalat et Didier Le Tallec, récusent la version de Passavant, selon un message de Veolia adressé à Reuters.

Les rencontres qui ont fait l'objet d'enregistrements de la part de Marco Schiavio "se sont faites à la demande de Passavant et c'est Passavant qui a deux reprises nous a fait chanter", peut-on lire dans la réponse de Veolia citant les employés d'OTV.

Toujours selon les deux dirigeants, "il convient de s’interroger sur la crédibilité à apporter à des enregistrements datant de 2015, qui après recours et pertes de marchés, font aujourd’hui surface non pas auprès de la justice, mais auprès des journalistes".

Le groupe précise cependant que son PDG, Antoine Frérot, a saisi le directeur de la conformité du groupe "en vue d’apporter tout l’éclairage nécessaire sur les propos et agissements que l’émission Cash Investigation (diffusée ce mardi soir-NDLR) et les journalistes de la société de production Premières Lignes, ainsi que du Monde, prêtent aux cadres d’OTV".

Un porte-parole de Veolia a par ailleurs fait savoir à Reuters qu'Antoine Frérot n'avait pas eu connaissance des rencontres entre les représentants d'OTV et Marco Schiavio.

Selon Le Monde, les appels d'offre colossaux du Siaap, qui peuvent atteindre plusieurs centaines de millions d'euros, sont régulièrement adjugés à OTV mais aussi à Degrémont, filiale de Suez, et Stereau, filiale de Saur.

Le PNF, sollicité par Reuters, a souhaité ne faire "aucun commentaire" et le Siaap n'était pas joignable dans l'immédiat.

Pierre-Alexandre Kopp a annoncé à Reuters qu'il allait saisir l'Autorité de la concurrence "dans les prochains jours", probablement en début de semaine prochaine.

(Simon Carraud, Benjamin Mallet et Geert de Clercq, édité par Yves Clarisse)

Valeurs citées dans l'article : Bouygues, Eiffage, Veolia Environnement, Suez Environnement