* Taxation à 11,8% dès jeudi

* Les droits pourraient atteindre 47,6% en août

* Pas de protectionnisme, assure le commissaire Karel De Gucht

* La CE est passée outre les résistances, notamment allemandes (Actualisé avec réaction du gouvernement français (§6-7)

par Robin Emmott et Ethan Bilby

BRUXELLES, 4 juin (Reuters) - L'Union européenne imposera dès jeudi des droits de douane anti-dumping aux panneaux solaires fabriqués en Chine, mais à un taux bien inférieur à celui évoqué initialement, et Bruxelles poursuivra les discussions avec Pékin pour chercher une solution négociée à ce conflit.

Les droits de douane seront fixés à 11,8% dès jeudi, alors que la Commission évoquait ces dernière semaines une taxation à 47%. Ils pourront toutefois être portés à ce niveau en août si aucun accord n'est conclu d'ici-là avec Pékin, a précisé mardi Karel De Gucht, le commissaire au Commerce, lors d'une conférence de presse.

"Il s'agit d'une offre unique faite à la partie chinoise qui lui donne une incitation très claire à négocier", a-t-il souligné. "Cela laisse un espace libre pour la négociation mais la balle est dans le camp chinois."

Si le blocage persiste, le relèvement des droits de douane pourra être prolongé pour cinq ans à partir de décembre, à condition que la décision soit avalisée par le Conseil européen.

La taxation progressive a été décidée après des discussions au téléphone entre responsables européens et chinois pendant le week-end, explique-t-on de sources européennes.

"La France soutient la position de la Commission européenne", indique un communiqué signé à la fois par Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur et Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif. "La décision qui a été prise est équilibrée et responsable. Elle protège les intérêts des constructeurs européens."

"Alors que la France s'est engagée dans une transition énergétique ambitieuse (...) il est en effet essentiel de garantir à la filière photovoltaïque, comme à toutes les autres filières, les conditions d'une concurrence loyale permettant leur développement efficace et pérenne."

Le dossier des panneaux solaires chinois est le plus important conflit commercial jamais engagé par Bruxelles et constitue un test de la capacité des Etats membres à se rassembler derrière la Commission sur des sujets touchant au commerce international, malgré les menaces de représailles des pays visés, en l'occurrence la Chine.

Lundi, le Premier ministre chinois Li Keqiang avait déclaré au président de la Commission européenne José Manuel Barroso que le dossier touchait aux "intérêts économiques majeurs" de la Chine.

BRUXELLES VEUT "UNE CONCURRENCE LOYALE"

Karel De Gucht lui s'est défendu de toute volonté protectionniste.

"C'est tout simplement faux et trompeur", a-t-il déclaré . "La vérité, c'est que notre action vise à assurer une concurrence loyale et le respect des règles du commerce international."

L'Allemagne et une quinzaine d'autres Etats membres de l'UE ont exprimé ces dernières semaines des réserves face à l'initiative de Karel De Gucht. La Commission reproche à la Chine d'avoir fait pression sur certains pays en les menaçant de mesures de représailles, ce que réfute la République populaire.

Les producteurs de panneaux solaires de l'Union affirment que leurs concurrents chinois ont accaparé en quelques années plus de 80% du marché européen alors qu'ils en étaient pratiquement absents, une hausse si rapide que, pour certains pays comme la France et l'Italie, elle aurait été irréalisable sans des aides d'Etat illégales.

La production chinoise de panneaux solaires représente aujourd'hui une fois et demi la demande mondiale, selon la Commission.

L'Europe est le premier débouché pour cette industrie, dominée désormais par des groupes chinois comme Yingli Green Energy, Suntech Power Holdings, Trina Solar et Canadian Solar.

* Le communiqué de la Commission (en anglais): http://link.reuters.com/syc68t (Robin Emmott, Francesco Guarascio et Ethan Bilby, Véronique Tison et Marc Angrand pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)