Total a annoncé jeudi un projet de transformation de sa raffinerie de Grandpuits (Seine-et-Marne) en une plate-forme "zéro pétrole", le groupe prévoyant dans ce cadre un investissement de plus de 500 millions d'euros à horizon 2024 ainsi que 135 suppressions de postes sur le site.

A l'horizon 2024, la plate-forme de Grandpuits accueillera des activités de production de biocarburants, majoritairement destinés au secteur aérien, ainsi que de production de bioplastique, de recyclage de plastiques et d'exploitation de deux centrales solaires photovoltaïques.

Total a précisé dans un communiqué qu'il conduirait ce projet sans aucun licenciement, grâce à des départs en retraite anticipés et des mobilités internes vers d'autres sites du groupe, "en fournissant à chaque collaborateur une solution adaptée à sa situation".

La CFDT a prévenu qu'elle n'accepterait "aucune suppression d'emploi".

"Salariés de Total, salariés des entreprises contractantes ou salariés des entreprises sous-traitantes, personne ne doit être laissé sur le bord de la route !", ajoute dans un communiqué la fédération Chimie Energie du syndicat, qui appelle la direction de Total à "être honnête et très clair dans l'explication qui sera faite aux élus sur les choix industriels et sociaux à venir".

Pour Thierry Defresne, délégué syndical central CGT Total Raffinage Pétrochimie, "le compte n'y est pas" en matière d'emplois - le syndicat estime que le projet pour Grandpuits se traduira par 209 suppressions de postes chez Total et 500 chez les sous-traitants - mais aussi en matière d'investissements, la CGT excluant de son calcul ceux qui étaient déjà programmés.

"Nous allons proposer aux salariés de créer un rapport de force pour obliger Total à revoir sa copie et faire en sorte qu'aucun emploi ne soit supprimé", a ajouté Thierry Defresne, qui prône de nouveaux projets pour Grandpuits, tels que de la production d'hydrogène "vert" et du captage de CO2.

La décision d'arrêter le raffinage à Grandpuits fait suite à un audit mené sur le pipeline d'Ile-de-France (PLIF) - qui approvisionne le site en pétrole brut acheminé depuis le port maritime du Havre -, après des fuites survenues en 2014 et 2019 qui ont conduit à réduire la pression maximale d'utilisation de l'oléoduc et à limiter le fonctionnement de la raffinerie à 70% de sa capacité, menaçant ainsi sa pérennité.

Il ressort de l'audit que le remplacement du PLIF "est la seule solution pour revenir à un fonctionnement normal de la raffinerie, mais nécessiterait un investissement de près de 600 millions d'euros", a expliqué Total.

"Pour cette raison, compte tenu des orientations en termes de transition énergétique retenues par la France à horizon 2040, Total fait le choix d'arrêter le raffinage de pétrole et d'engager une transformation industrielle du site grâce à un programme d'investissement majeur."

PAS D'INCIDENCE SUR L'APPROVISIONNEMENT DE L'ILE-DE-FRANCE

En parallèle, le raffinage du pétrole brut à Grandpuits s'arrêtera au premier trimestre 2021 et le stockage de produits pétroliers fin 2023, "sans aucune incidence sur le bon fonctionnement" des stations-service et des aéroports d'Ile-de-France qui seront approvisionnés par les raffineries de Donges (Loire-Atlantique) et de celle de Normandie.

Sur les 400 postes que comptent aujourd'hui la plate-forme de Grandpuits et le dépôt associé de Gargenville (Yvelines), 250 postes seront maintenus. En outre, 15 emplois supplémentaires seront créés à Grandpuits dans une unité d'emballage en aval de l'unité de bioplastiques.

Total estime également que les chantiers générés par ses investissements permettront également de créer jusqu'à 1.000 emplois pendant les trois années de construction des nouvelles unités.

Le groupe ajoute avoir réalisé une cartographie des entreprises partenaires intervenant sur la plate-forme, qui représentent l'équivalent de 300 emplois à temps plein. Il s'engage à "accompagner chaque entreprise concernée par l'évolution du site" et dans sa nouvelle configuration, de continuer à "faire appel en priorité à ses entreprises partenaires", représentant 200 emplois à temps plein.

La future usine de biocarburants de Grandpuits, majoritairement destinés au secteur aérien et dont la mise en service est prévue en 2024, aura une capacité de traitement de 400.000 tonnes par an.

Elle sera alimentée majoritairement par des graisses animales en provenance d'Europe et des huiles de cuisson usagées qui seront complétées par des huiles végétales de type colza, à l'exception de l'huile de palme.

(édité par Jean-Stéphane Brosse et Henri-Pierre André)

par Benjamin Mallet